« La sueur à la manœuvre épargne le sang au combat ». La formule n’est pas très poétique, mais elle est suffisamment chargée de teneur pédagogique pour le soldat qui apprend que la tenue de combat trempée de sueur est préférable au corps du combattant mortellement vidé de son sang.
Or donc, cette phrase martiale met en exergue l’utilité des grandes manœuvres militaires qui, aux yeux du citoyen-contribuable, ont l’air strictement routinières et…budgétivores. Une mauvaise perception qui oblitère une vitale nécessité ; gage de la sauvegarde de la patrie et de sa souveraineté.
En effet, les manœuvres fournissent – hors des murs de l’École de guerre – l’occasion de tester l’entrainement des troupes et des états-majors, de vérifier opérationnellement les règles d’emploi, d’apprécier (sur le terrain et non sur le papier) les performances et/ou les contre-performances du nouveau matériel. Ce n’est pas tout. Les manœuvres sont, à la fois, le lieu et l’opportunité de montrer la puissance de la Force organisatrice aux autres États représentés par leurs attachés militaires. Sans oublier les journalistes qui sont les partenaires permanents de la DIRPA.
Ainsi, les Armées sénégalaises ont renoué, depuis vendredi dernier, avec les grandes manœuvres qui ont ponctué l’essor et accompagné la fortification de l’outil militaire, de 1960 à 1990. Ce qui constitue la fin apparente de la pause longtemps dictée par les engagements lourds des Diambars en Casamance et en Guinée-Bissau, lors de l’opération Gabou.
Au commencement, ces grands exercices représentaient un pan de la l’étroite coopération militaire entre le Sénégal et la France. Le Mur de Berlin était encore debout (jusqu’à la nuit du 9 novembre 1989) dans un contexte de guerre froide qui influençait invariablement les scénarios ou les scenarii sur le champ de la manœuvre : le parti bleu en lutte avec le parti rouge. Les guerres étaient conventionnelles et les couleurs n’étaient pas choisies au hasard. Le péril était effectivement rouge-communiste, aujourd’hui, il est nettement vert-islamiste.
Justement, le nom de code la manœuvre en cours dans les régions de Tambacounda et de Kédougou – FALÉMÉ 20 – renseigne, à la fois, sur les soucis géopolitiques et les hantises sécuritaires qui peuplent le sommeil du Président Macky Sall, chef suprême des Armées. En vérité, l’Est du Sénégal que bordent le Mali, la Mauritanie et la Guinée-Conakry, est devenu l’horizon stratégique qui reconfigure notre doctrine militaire, depuis l’accalmie en Casamance et le double avènement de régimes dignes de confiance à Banjul et à Bissau.
D’où les adaptations et les innovations doctrinales qui, dans ces manœuvres commandées par le Général Fulgence Ndour, sont en parfaite corrélation avec l’inquiétante conjoncture en vigueur dans la sous-région. L’implication de la Gendarmerie sur une grande échelle (les GARSI sont déjà opérationnels le long de la Falémé), de la Brigade nationale des Sapeurs-pompiers et de la Police nationale (Police des frontières incluse) donne une idée du rajustement de la politique gouvernementale de sécurité, désormais adaptée aux opérations asymétriques qu’impose la nouvelle génération de conflits. Une catégorie de crises dans lesquelles, le couple « Renseignement-Forces spéciales » reste l’indétrônable vedette.
En fin de semaine, les leçons de FALÉMÉ 20 seront évidemment tirées, en partie publiquement, devant la presse. Sur un autre volet, le bilan de l’exercice sera confidentiellement consigné dans un document destiné aux trois échelons de la Défense nationale : Présidence de la république, Ministère des Forces armées et État-major général.
Hier, les manœuvres de l’armée sénégalaise étaient peu ou prou tributaires d’une indispensable aide budgétaire de la France et de la décisive participation d’un volume considérable d’effectifs militaires puisés au 23ème BIMA de Dakar ou acheminés depuis les bases de l’ancienne 11ème Division de Parachutistes de Toulouse qui fut longtemps dédiée aux opérations extérieures ; notamment en Afrique et en outre-mer. Aujourd’hui, le Sénégal prélève sur le budget national, les moyens nécessaires pour financer, en toute souveraineté et en pleine dignité, l’entrainement et l’endurcissement de ses troupes.
La France n’est-elle pas vachement occupée au Sahel ? Preuve que la défense nationale n’est pas une mission régalienne à sous-traiter. Y compris dans le domaine crucial de l’aguerrissement des unités de combat. La balle est dans le camp des députés qui votent tous les budgets.
Par Babacar Justin Ndiaye
Or donc, cette phrase martiale met en exergue l’utilité des grandes manœuvres militaires qui, aux yeux du citoyen-contribuable, ont l’air strictement routinières et…budgétivores. Une mauvaise perception qui oblitère une vitale nécessité ; gage de la sauvegarde de la patrie et de sa souveraineté.
En effet, les manœuvres fournissent – hors des murs de l’École de guerre – l’occasion de tester l’entrainement des troupes et des états-majors, de vérifier opérationnellement les règles d’emploi, d’apprécier (sur le terrain et non sur le papier) les performances et/ou les contre-performances du nouveau matériel. Ce n’est pas tout. Les manœuvres sont, à la fois, le lieu et l’opportunité de montrer la puissance de la Force organisatrice aux autres États représentés par leurs attachés militaires. Sans oublier les journalistes qui sont les partenaires permanents de la DIRPA.
Ainsi, les Armées sénégalaises ont renoué, depuis vendredi dernier, avec les grandes manœuvres qui ont ponctué l’essor et accompagné la fortification de l’outil militaire, de 1960 à 1990. Ce qui constitue la fin apparente de la pause longtemps dictée par les engagements lourds des Diambars en Casamance et en Guinée-Bissau, lors de l’opération Gabou.
Au commencement, ces grands exercices représentaient un pan de la l’étroite coopération militaire entre le Sénégal et la France. Le Mur de Berlin était encore debout (jusqu’à la nuit du 9 novembre 1989) dans un contexte de guerre froide qui influençait invariablement les scénarios ou les scenarii sur le champ de la manœuvre : le parti bleu en lutte avec le parti rouge. Les guerres étaient conventionnelles et les couleurs n’étaient pas choisies au hasard. Le péril était effectivement rouge-communiste, aujourd’hui, il est nettement vert-islamiste.
Justement, le nom de code la manœuvre en cours dans les régions de Tambacounda et de Kédougou – FALÉMÉ 20 – renseigne, à la fois, sur les soucis géopolitiques et les hantises sécuritaires qui peuplent le sommeil du Président Macky Sall, chef suprême des Armées. En vérité, l’Est du Sénégal que bordent le Mali, la Mauritanie et la Guinée-Conakry, est devenu l’horizon stratégique qui reconfigure notre doctrine militaire, depuis l’accalmie en Casamance et le double avènement de régimes dignes de confiance à Banjul et à Bissau.
D’où les adaptations et les innovations doctrinales qui, dans ces manœuvres commandées par le Général Fulgence Ndour, sont en parfaite corrélation avec l’inquiétante conjoncture en vigueur dans la sous-région. L’implication de la Gendarmerie sur une grande échelle (les GARSI sont déjà opérationnels le long de la Falémé), de la Brigade nationale des Sapeurs-pompiers et de la Police nationale (Police des frontières incluse) donne une idée du rajustement de la politique gouvernementale de sécurité, désormais adaptée aux opérations asymétriques qu’impose la nouvelle génération de conflits. Une catégorie de crises dans lesquelles, le couple « Renseignement-Forces spéciales » reste l’indétrônable vedette.
En fin de semaine, les leçons de FALÉMÉ 20 seront évidemment tirées, en partie publiquement, devant la presse. Sur un autre volet, le bilan de l’exercice sera confidentiellement consigné dans un document destiné aux trois échelons de la Défense nationale : Présidence de la république, Ministère des Forces armées et État-major général.
Hier, les manœuvres de l’armée sénégalaise étaient peu ou prou tributaires d’une indispensable aide budgétaire de la France et de la décisive participation d’un volume considérable d’effectifs militaires puisés au 23ème BIMA de Dakar ou acheminés depuis les bases de l’ancienne 11ème Division de Parachutistes de Toulouse qui fut longtemps dédiée aux opérations extérieures ; notamment en Afrique et en outre-mer. Aujourd’hui, le Sénégal prélève sur le budget national, les moyens nécessaires pour financer, en toute souveraineté et en pleine dignité, l’entrainement et l’endurcissement de ses troupes.
La France n’est-elle pas vachement occupée au Sahel ? Preuve que la défense nationale n’est pas une mission régalienne à sous-traiter. Y compris dans le domaine crucial de l’aguerrissement des unités de combat. La balle est dans le camp des députés qui votent tous les budgets.
Par Babacar Justin Ndiaye