Appel au président de la République: Ne faudrait-il pas reporter ces élections et engager de larges concertations ?



Sénégalaises, Sénégalais,
 
Le Gouvernement du Sénégal vient de boucler la première phase des Réformes dénommée Acte III de la Décentralisation avec l’adoption d’un nouveau code général des collectivités locales. Nous mesurons toute la portée de cette réforme qui ambitionne de booster le développement local à travers notamment la territorialisation des politiques publiques. L’Acte III de la Décentralisation, impactant subséquemment sur le système électoral, a rendu nécessaire la révision de la loi électorale.


Dans cette perspective, il a été institué, conformément à la tradition, une Commission Technique chargée de la Revue du Code Electoral (CTRCE) qui regroupe les représentants de l’Administration, des organismes de contrôle et de suivi des élections (CENA, CNRA, ONP), de la Société civile et des partis politiques.
Nous aurions voulu que la détermination du mode de scrutin, du fait de ses enjeux  dans l’édification et le fonctionnement d’un système démocratique, ne soit nullement sous-tendue par des logiques partisanes.
Nous aurions également voulu que l’Acte III de la Décentralisation débouchât sur l’adoption d’un nouveau Code Electoral Consensuel.


Cependant, la Majorité Présidentielle, avec le consentement, la complicité et le mutisme coupable de la quasi-totalité des partis de Bennoo Bokk Yakaar (BBY), a voulu imposer un système électoral rétrograde.
La proposition visant l’institution d’un mode de scrutin qui impose l’administration des villes  par des CONSEILLERS DESIGNES à partir des listes des communes constitutives, quoiqu’elle ne fût pas portée par l’Administration installe une véritable régression démocratique.


C’est le lieu de louer la compétence et la neutralité de l’Administration sénégalaise qui demeure républicaine. C’est également l’occasion de saluer les efforts constants de la CENA pour le respect de la loi électorale par tous les acteurs du processus ainsi que les nombreuses initiatives de la Société civile en vue de faciliter le dialogue politique.
Nous devons admettre que la nécessité de préserver les acquis démocratiques et d’œuvrer au renforcement de notre système électoral n’a pas été perçue par tous les acteurs.
La volonté de contribuer à l’instauration d’un système électoral performant et crédible n’a pas non plus prévalu. 


Il va sans dire que les limites et les zones d’ombre décelées dans le Code Général des Collectivités Locales (CGCL) adopté en procédure d’urgence par l’Assemblée nationale et promulgué le 28 décembre 2013, à six (6) mois moins un (01) jours de la date des élections, allait secréter une controverse autour de l’opacité des dispositions concernant ses articles 167 et 168 au point de poser la problématique de l’inconstitutionnalité de cette loi et subséquemment du projet de loi n°11/2014 portant code électoral, chapitre VI, articles L.251 et L.252.
 
Chers concitoyens,
Juristes, Constitutionnalistes, Politologues, Sociologues, Spécialistes de la décentralisation et de la Gestion urbaine, Défenseurs des droits humains et Démocrates,

 
Nous voudrions partager avec vous ces questionnements qui nous taraudent l’esprit.
 
1- Le Gouvernement du Sénégal n’est-il pas sur le point de violer, de manière flagrante, le Protocole additionnel de la CEDEAO sur la démocratie et la bonne gouvernance, en son article 2, alinéa 1, qui stipule: "Aucune réforme substantielle de la loi électorale ne doit intervenir dans les six (6) mois précédant les élections, sans le consentement d’une large majorité des acteurs politiques." ?
2- La VOLONTE du LÉGISLATEUR devrait-elle primer sur celle du CONSTITUANT ?
3- Les CONSEILLERS DE LA VILLE devraient-ils être DESIGNES ou ELUS ? 

4- Le mode de désignation des conseillers à la ville se ferait-il par voie de suffrage universel direct ?
5- Ce système respecterait-il les valeurs et les principes démocratiques, de la décentralisation et les droits du citoyen ?
6- Ce système serait-il conforme aux principes de parallélisme des formes et d’uniformité du mode de scrutin ?


7- La VILLE demeure-t-elle une COLLECTIVITE  LOCALE ou devient-elle  une    INTERCOMMUNALITE (communauté de communes, communauté d’agglomération ou communauté urbaine) ?
8- En mutualisant les communes pour donner la VILLE ne risquerait-on pas d’exercer une TUTELLE de celle-ci sur les COMMUNES CONSTITUTIVES ?
09- Ne faudrait-il pas revoir l’échelle de l’intercommunalité ?
10- Quel sort serait réservé aux agents des collectivités locales dissoutes ?
11- Ce Mode de scrutin favoriserait-il la PLURALITE au sein des Assemblées locales, ne procéderait-il pas de l’exclusion des minorités ?
 

12- Ce Mode de scrutin pourrait-il garantir la stabilité politique et sociale ?
13- Ce Mode de scrutin renforcerait-il  la DEMOCRATIE LOCALE ?
14- Gagnerions-nous à éviter le mimétisme du modèle français sans une véritable approche d’adaptabilité ?
15- Comment déconstruire les logiques politiques et administratives au profit des logiques sociales ?
16- Ce système ne bafouerait-il pas  les règles démocratiques, n’installerait-il pas la confusion et n’abuserait-il pas les citoyens ?
17- Ce mode d’élection par ricochet ne risquerait-il pas de faire PERDRE à des  Villes  de plusieurs centenaires toute  leur AME ?
18- Les conseillers ne siègeraient-ils pas à la ville avec des consignes ou des mots d’ordre émanant de leurs communes respectives ?
 

19- Ce mode de scrutin ne serait-il pas porteur de germes de conflits et sources de blocage du fonctionnement des conseils de ville ?

20- Serait-il judicieux que les citoyens de Dakar, Pikine et Guédiawaye, par un seul scrutin, élisent les conseillers municipaux et désignent les représentants à la ville qui exerceront aussi les attributions dévolues au conseil départemental ?
 

21- Ne faudrait-il pas maintenir le statu quo ante pour les élections des conseillers  municipaux de la ville ?
22-  Reprenons la pertinente question de l’Honorable Abdoulaye DIOP Makhtar, Chef Suprême de la Collectivité Léboue : quand est-ce que la ville sera créée, avant ou après les élections ?
Sénégalaises, Sénégalais,
 
Permettez-nous de nous adresser au Président de la République, aux Représentants du Peuple et à la classe politique.
 

Excellence, Monsieur le Président de la République,
23- « La consolidation de notre expérience démocratique et de l’Etat de droit » ne devrait-elle pas commencer bien avant le 29 juin à travers l’adoption d’un mode de scrutin qui renforce la démocratie locale et promeut la stabilité sociale et politique de notre cher pays ?
24- Excellence, pourriez-vous épargner le Sénégal de soubresauts qui entachent la Décentralisation ou compromettent la Démocratie, leviers importants de l’Emergence ?
Honorables députés,
25- Représentants du Peuple, la majorité mécanique n’est-elle pas porteuse de germes de destruction de notre démocratie ?
26- Veillerez-vous à ce que notre système démocratique ne renferme un mode de scrutin aussi illégal qu’illégitime ?


27- Honorables, accepteriez-vous demain d’adopter un nouveau mode de scrutin aussi absurde à seulement deux (02) mois des élections et à un (01) jour franc de la date limite de dépôt des candidatures ?
Chers compatriotes,
28- Devrions-nous agir comme si tous nos efforts et sacrifices consentis pour la préservation des acquis démocratiques étaient devenus vains ? 

29- Ne devrions-nous pas bannir toute logique partisane ou idéologie qui déstabilise notre pays afin de préserver à tout prix la stabilité sociale, la cohésion et la concorde nationale ?
30- Vous souvient-il sans doute que le projet de modification du mode de scrutin ait provoqué, le 23 juin 2011, la Révolte du Peuple ?


Prenons-nos responsabilités et soyons prêts à assumer nos actes !
Le Sénégal est à la croisée des chemins et ne doit décevoir au regard des avancées démocratiques notoires qui lui vaut sa stabilité politique et sociale connue de tous.
A la classe politique,
 
31- Devrions-nous fixer de manière consensuelle l’ensemble des règles du jeu ou nous limiterions-nous uniquement à exiger le respect du calendrier électoral, un des éléments de cet ensemble ?
32- Les conditions pour engager la tenue d’élections démocratiques, transparentes et apaisées sont-elles remplies ?


33- Ne faudrait-il pas reporter ces élections, engager de larges concertations avec les acteurs et trouver les consensus forts et salutaires au nom de l’élan irrésistible du peuple sénégalais vers la liberté, la justice, l’avènement renforcé du progrès et de la stabilité sociale, de l’Etat de droit et de la consolidation de la démocratie ?
« Quand un homme ne peut croire ce qu’il trouve absurde, ce n’est pas sa faute, c’est celle de sa raison ». Rousseau, Lettre à D’Alembert


« Errare humanum est, perseverare diabolicum este. »
 
                                                                            Sénégal, le 06 avril 2014
 POUR LE COMITE D’INITIATIVE DE IPAD
                                     Ndiaga SYLLA

Dié BA

Lundi 7 Avril 2014 15:43


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