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Après 30 mois d'hibernation, la sonde spatiale Rosetta s'est réveillée



Le suspense a duré 45 minutes au centre de contrôle de l'Agence spa­tiale européenne (ESA) à Darmstadt en Allemagne, mais le signal tant attendu est finalement arrivé lundi soir à 19h17, prouvant que Rosetta  s'était bien réveillée.

Après trente mois d'hibernation, la sonde de l'ESA est sortie de sa torpeur lundi matin, à 11 heures, pour amorcer ses premières manœuvres en vue de sa rencontre avec la comète Churyumov-Gerasimenko en juillet. Cette mission à 1 milliard d'euros, la plus ambitieuse jamais entreprise par l'Europe, a pour objectif de mieux comprendre ces boules de glace et de roche, vestiges des premiers instants du système solaire, qui viennent de temps à autre se désintégrer en s'approchant trop près du Soleil. Envoyée en mars 2004, elle est dans l'es­pace depuis bientôt dix ans.

Quand son réveil a sonné, le premier réflexe de Rosetta a été de réchauffer ses instruments «engourdis» par le froid. «La sonde est sur une orbite très elliptique qui l'a envoyée en juillet 2011 à plus de 4,5 unités astronomiques (673 millions de kilomètres) du Soleil», explique Philippe Gaudon, chef de projet au Cnes à Toulouse en charge de la participation française à cette mission hors norme.

À ces distances, la puissance générée par les panneaux solaires de 32 mètres d'envergure - l'équivalent de trois bus bout à bout - représente moins de 5 % de celle disponible sur une orbite terrestre. Ce n'est pas suffisant pour maintenir tous les équipements à leur température de fonctionnement (entre 5 et 40°C en fonction des appareils) dans le froid spatial extrême (- 160°C).

«Seuls quelques composants vitaux, comme le calculateur de bord programmant le réveil ou les réservoirs d'ergols, étaient chauffés», explique Vincent Guillaud, directeur de l'ingénierie des satellites scientifiques chez Airbus Defense and Space (ex-Astrium). «Rosetta est la première sonde moderne à aller aussi loin dans le système solaire sans pile nucléaire», rappelle son constructeur.

Pendant son hibernation, la sonde filait à une vitesse de croisière de plus de 30.000 km/h tout en tournoyant sur ­elle-même pour stabiliser sa trajectoire. Rosetta a désormais mis fin à cette longue vrille avant de mesurer sa position par rapport aux étoiles grâce à ses senseurs stellaires.
Après ce repérage, elle a pointé son antenne vers la Terre pour envoyer un signal attestant que l'ensemble de la procédure automatisée de réveil s'était déroulé correctement. Elle est si loin de nous - 800 millions de kilomètres - que ce message a mis 45 minutes à nous parvenir. Il a été reçu à 18h30 par le télescope de 70 mètres de Goldstone, opéré par la Nasa, le seul capable de détecter un signal aussi ténu, puis transmis au centre de contrôle de l'ESA (l'Esoc), à Darmstadt, en Allemagne.

Rosetta est littéralement en train de courir après la comète. Comme elle va un peu plus vite (1 km/s de plus), elle est en train de la rattraper peu à peu. «À partir de fin mai, la sonde va être ralentie pour se synchroniser avec sa cible», rappelle Gerhard Schwehm, ancien responsable et directeur scientifique de la mission à l'ESA. Fin août, Rosetta devrait ainsi se situer à une distance stable de 100 km derrière la boule de glace qu'elle poursuit.
Cette «rencontre» avec une comète est une grande première. La précédente mission cométaire européenne, Giotto, s'était contentée de survols rapides à plusieurs centaines de kilomètres de deux comètes, dont la comète de Halley. Rosetta va cette fois-ci accompagner son objet d'étude pendant plusieurs mois, jusqu'en décembre 2015.
 

Opération délicate

Mais ce n'est pas tout: la sonde dispose également d'un atterrisseur, Philae, qu'elle va larguer dans le champ d'attraction de la comète en novembre. Pour cela, elle va devoir s'approcher à quelques kilomètres seulement de la surface, la gravité étant environ 100.000 fois plus faible que sur Terre. Philae va ensuite «tomber» sur la comète. L'opération est délicate sur un astre aussi petit: tout contact un peu trop brusque peut entraîner un rebond catastrophique de l'atterrisseur.

Le déroulé précis des opérations reste très incertain. «On ne connaît pas la densité, le relief exact ou la dureté du sol de la comète, rappelle Philippe Gaudon. On sait simplement que la comète est un ellipsoïde de 3 km sur 5 km et qu'elle fait un tour sur elle-même en 12 heures environ.» Philae a donc été conçu pour s'adapter à différents types de situation. Elle dispose notamment de harpons pour s'agripper à la comète et ne pas en être éjectée. La puissante caméra embarquée de Rosetta, Osiris - le premier télescope construit en carbure de silicium, une céramique très peu sensible aux variations de température -, doit permettre de déterminer ces paramètres entre juillet et octobre. Ce qui ne laissera que quatre mois aux ingénieurs spatiaux du Science Operation and Navigation Center (SONC) du CNES pour définir un site précis d'atterrissage et mettre au point le programme automatisé correspondant.

Après avoir largué son atterrisseur, Rosetta s'éloignera à quelques dizaines de kilomètres pour continuer à suivre la comète jusqu'en décembre 2015. L'atterrisseur n'aura, lui, que quelques jours à quelques mois de durée de vie en fonction des conditions qui régneront à la surface de l'astre. Au fur et à mesure qu'elle se rapprochera du Soleil, la glace cométaire va se vaporiser, provoquant la formation d'une atmosphère très brillante de plusieurs milliers de kilomètres d'épaisseur, sa chevelure, et d'une longue traînée de poussières de plusieurs millions de kilomètres, sa queue. Si tout se passe comme prévu, Rosetta sera aux premières loges pour observer cet incroyable spectacle.


Figaro

Mardi 21 Janvier 2014 - 09:51


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