Ce n'est pas la première fois que des accrochages se produisent à la hauteur du pont de Doutchi, le poste frontière qui enjambe la Komadougou Yobé, à quelques kilomètres au sud de Diffa. Il y a quinze jours, l’armée nigérienne avait déjà repoussé des insurgés. De source militaire, ils souhaitaient saboter le pont.
Les tirs d'obus, qui ont sorti les habitants de Diffa de leur sommeil dimanche matin, interviennent surtout 48 heures après une double offensive de Boko Haram sur ce même pont à Diffa mais aussi à Bosso à deux heures de piste vers l’est.
Boko Haram semble donc envisager l’ouverture d'un nouveau front au Niger. Quelque 2 500 soldats tchadiens appuient l’armée nigérienne le long de la frontière, ce qui affaiblit sans doute leur dispositif près des montagnes Mandara, côté Cameroun, sur l'autre front, et c'est sans doute l'objectif recherché par les insurgés.
Si l'explosion, survenue dimanche matin au marché aux poivrons de Diffa, est bien due à une bombe comme cela a été évoqué, cela indiquerait qu’au Niger, Boko Haram puisera largement dans sa palette de moyens d’action, qui comprend rapts de masses et déferlantes de violences sur des villages entiers.
Ce volet asymétrique est inquiétant pour les populations civiles le long de la frontière, car les soldats nigériens ne le cachent pas, Boko Haram y compte de nombreux alliés et même des combattants infiltrés. Néanmoins, le ministre de la Défense nigérien Mahamadou Karidjo a assuré que l'explosion de dimanche était due à la chute d'un obus tiré depuis le Nigeria.
L'attaque avait en tout cas un « timing ». Les parlementaires nigériens vont en effet se réunir ce lundi en session extraordinaire, en principe à 16h, pour examiner la demande d'autorisation de l'exécutif, qui souhaite envoyer des troupes pour participer à la lutte contre Boko Haram aux côtés des armées du Tchad, du Cameroun et du Nigeria engagées sur le terrain.
En convoquant cette session extraordinaire suite à un décret présidentiel, le gouvernement nigérien veut se conformer à l'article 104 de la Constitution, qui stipule que l'envoi de troupes à l'étranger est autorisé par l'Assemblée nationale.
Comme pour le cas du Mali il y a deux ans, où l'unanimité avait été trouvé, la demande devrait passer comme une lettre à la poste. Quelque 70 députés 113 sont favorables à l'action du gouvernement, et l'attaque de la localité de Bosso, vendredi dernier, a servi de déclic.