Ils s’étaient donné rendez-vous à la Maison de la presse à Bujumbura, et ils étaient tous là, du moins les principales figures de la société civile burundaise. Vital Nshimirimana, coordinateur du Forum pour le renforcement de la société civile (le Forsc), a été le premier à signer la pétition. Jusqu’ici, explique-t-il, les autorités burundaises « ont refusé catégoriquement la moindre enquête » sur ces allégations de distribution d’armes aux membres de la Ligue des jeunes du parti au pouvoir (le CNDD-FDD), ou sur d’éventuels entraînements paramilitaires que de jeunes Burundais suivraient dans l’est de la RDC.
L’objectif de cette pétition est de recueillir des dizaines voire des centaines de milliers de signatures dans les deux semaines, pour contraindre le Burundi et la communauté internationale à de véritables investigations sur la question. Pacifique Nininahazwe, à la tête du Forum pour la conscience et le développement (Focode), explique vouloir que la communauté internationale « donne une attention suffisante à cette question, et qu’on organise une enquête crédible et indépendante ».
Mais pire selon ces organisations, Bujumbura veut maintenir le couvercle à tout prix. Au moins une dizaine de simples citoyens qui ont évoqué des distributions d’armes dans leurs communes ont été arrêtés, des journalistes sont convoqués par la justice. La crispation du pouvoir burundais a poussé les organisations des professionnels des médias à s’impliquer dans cette pétition. Innocent Muhozi, président de l’Observatoire de la presse au Burundi estime qu' « il y a une véritable atteinte à la liberté de presse et d’expression dans cette affaire-là, d’où la mobilisation, l’implication totale des organisations des professionnels des médias dans cette pétition ». La société civile appelle la population burundaise à signer massivement cette pétition.
La fin de non-recevoir du gouvernement burundais
La réponse du gouvernement du Burundi ? Encore une fin de non-recevoir. L’ONU, les États-Unis ainsi que plusieurs autres partenaires de ce pays ont proposé au pouvoir une commission d’enquête neutre et indépendante, mais la réponse du gouvernement a toujours été un « non » clair et net. Le secrétaire général et porte-parole du gouvernement du Burundi l’a réaffirmé ce lundi au micro de RFI. Philippe Nzobonariba dénonce plutôt une société civile qui, aux yeux du gouvernement, roulerait pour l’opposition et ne chercherait qu'à nuire. Pas besoin d’enquête pour « de fausses allégations », estime ainsi Philippe Nzobonariba :
« Le gouvernement ne voit pas l'opportunité de mener des investigations sur des allégations qui n'ont jamais été étayées par une quelconque précision, une quelconque preuve. Normalement, on enquête sur des éléments palpables, et non pas sur des rumeurs ou des allégations tendancieuses.
Sur les prétendus entraînements en République démocratique du Congo, cela a été propagé par les mêmes milieux. Ils ont voulu donner crédit aux premières allégations qui disaient que la distribution d'armes se faisait au Burundi, précisément au sud du pays, à Nyanza-lac. Maintenant ils ont inventé autre chose au-delà de la frontière burundo-congolaise : ils prétendent qu'il y a des entraînements, qu'ils ont même des preuves, mais ne disent pas d'où ils tiennent ces preuves.
Cela a conduit d'ailleurs à de regrettables incidents, qui ont conduit en prison un représentant de la société civile, monsieur [Pierre Claver] Mbonimpa, qui lui aussi avait fait l'objet de manipulations. On lui avait donné de fausses photos pour donner crédibilité à ces allégations. C'est tout simplement une tactique pour faire capoter les prochaines élections ».
Source : Rfi.fr