Il s’agit de l’affaire dans l’affaire. En renvoyant Jean-Pierre Bemba et les quatre autres suspects en procès, la chambre préliminaire II de la CPI confirme les charges d’atteintes à l’administration de la justice à l’encontre de Jean-Pierre Bemba, de son avocat Aimé Kilolo Musamba, et du député du Mouvement de libération du Congo (MLC) Fidèle Babala, ainsi que des deux autres suspects : Jean-Jacques Mangenda Kabongo et Narcisse Arido. En d’autres termes, des accusations de tentatives de la subornation de témoins.
Fidèle Babala Wandu et ses co-accusés Aimé Kilolo Musamba et Narcisse Arido venaient d’être libérés de la garde de la Cour pénale internationale, fin octobre. Les accusés auraient donné de l’argent et des instructions à certains témoins afin qu'ils produisent de faux témoignages, auraient produit des éléments de preuves faux ou falsifiés et présentés eux-mêmes de faux témoignages dans la salle d’audience.
Un procès long et critiqué
Ces infractions auraient été commises entre la fin de 2011 et le 14 novembre 2013 dans divers lieux par divers moyens, selon l’accusation. L’accusation et la défense ont encore possibilité d'interjeter l'appel, après quoi la présidence de la CPI constituera une chambre de première instance en temps utile, qui sera en charge du procès.
Cette décision intervient à la veille de la dernière étape du procès Bemba à La Haye. C’est, en effet, ces 12 et 13 novembre qu’auront lieu les dernières plaidoiries et réquisitoires avant le verdict des juges, dans ce procès entamé en 2010.
Les accusations de subornation de témoins ont été l’un des rebondissements les plus saillants d’un long procès. Les crimes jugés auraient été commis en Centrafrique en 2002-2003 et l'accusé a été arrêté en 2008, ce qui fait de ce procès l'un des premiers de la CPI, le troisième exactement, et l'un des plus longs, souvent critiqué.
Pour les victimes, cette dernière étape ne peut être qu’un soulagement, douze ans après les faits. Pour les proches de Jean-Pierre Bemba et de son parti, le MLC, c’est la fin d’un procès à rebondissements entamé en novembre 2010, après son arrestation en 2008 à Bruxelles et l’audience de confirmation des charges en 2009.
Un procès à valeur d’exemple
Cinq charges de crimes de guerre et crimes contre l’humanité sont retenues, dont meurtres, viols et pillages, commis par les troupes de son mouvement - plus de 1 500 hommes - venues de RDC soutenir le président Ange-Félix Patassé en Centrafrique, contre la rébellion de François Bozizé, entre octobre 2002 et mars 2003.
Impliquant 40 témoignages de victimes, ce procès a valeur d’exemple à plusieurs niveaux : d’abord pour la reconnaissance du viol comme crime de guerre, ensuite parce que l’opposant congolais est une figure politique majeure, parce que plus de 750 demandes de participation de personnes ont été acceptées parmi les 2 500 victimes, enfin parce qu’il s’agit du premier procès de la CPI jugeant les crimes d’un chef rebelle commis dans un pays voisin. Le jugement sera prononcé « en temps voulu », selon la CPI, de toute évidence pas avant 2015.
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