Michel Thierry Atangana a passé une nuit supplémentaire dans sa cellule de la prison secondaire de Yaoundé. 48h après les décrets de remise de peine du président Biya, le prisonnier français en détention depuis 17 ans au Cameroun, devra encore faire montre de patience. «Monsieur Atangana est un homme calme, extrêmement solide. Parce qu’une autre personne à sa place aurait déjà craqué. Aujourd’hui il ne fait pas preuve de triomphalisme. C’est un homme serein mais tout de même affaibli. Parce que voyez-vous, au bout de 17 ans, quelle que soit la force morale dont on puisse être doté, on finit par craquer. Donc vous comprenez qu’aujourd’hui l’attente a été tellement longue que Monsieur Atangana ne saurait jubiler… » explique l’un des ses avocats, Me Bernard Kéou.
En théorie selon ses avocats, rien ne s’oppose à sa libération si ce n’est l’agenda chargé de la haute administration camerounaise avec le déroulement depuis une semaine des festivités commémorant le cinquantenaire de la réunification du Cameroun. Le président Paul Biya, qui préside en personne ces événements, a emménagé avec tous son gouvernement dans la ville de Buéa, à environ 400 kms de Yaoundé, depuis plusieurs jours.
Les supputations vont donc bon train dans la presse locale sur le profil des personnes éventuellement concernées par les décrets de réduction et de remise de peine. Ainsi, outre Michel Thierry Atangana, trois ou quatre autres personnalités, toutes condamnées et ayant purgé de lourdes peines dans le cadre des procès de l’atteinte à la fortune publique, pourraient recouvrer la liberté.
Parmi les autres personnalités susceptibles de bénéficier du décret, Titus Edzoa. Maître Ndem et l'épouse de Titus Edzoa lui ont rendu visite. « En ce qui concerne son état physique, raconte son avocat, il s’est toujours bien conservé en dehors de quelques bobos. Sur le plan psychologique... il s’est toujours dit qu’il ne comprenait pas ce qu’il foutait dans cette galère, passez moi le terme mais c’est ça la réalité ! » Selon Maître Ndem, son client, qui est toujours resté fidèle à ses convictions, a accueilli la nouvelle de l'éventualité d'une sortie prochaine avec un certain détachement. «Il a appris ça avec le même détachement, il n’a même pas de commentaire à faire, ajoute l’avocat. Il se dit que ça arrive tôt ou tard mais c’est néanmoins arrivé… ce détachement, c’est en rapport avec sa conception de la vie : c’est un monsieur qui a fait de bonnes études et qui croyait en ce qu’il faisait. Comme vous avez pu l’apprendre, ce dossier avait une coloration plus ou moins politique ».
Un éventuel dédommagement
«… Monsieur Atangana a toujours clamé son innocence, poursuit maître Kéou. Donc le combat va continuer. Parce que cette grâce présidentielle n’est pas un cadeau. Il n’a jamais plaidé coupable, il ne reconnaît pas les faits qui lui sont reprochés. Aucune preuve n’a d’ailleurs été apportée. Et vous le savez d’ailleurs, il y a des enjeux financiers importants. Donc pour nous, comme je le disais, ce n’est qu’une étape. Les prochaines étapes consisteront à entreprendre les voies et moyens pour qu’il soit dédommagé ».
Source : Rfi.fr