Le défunt Président Senghor avait une belle formule, en wolof, pour parler de son expérience au sommet de l’Etat : « il ne faut pas racler l’écuelle du pouvoir ». En d’autres termes, un chef d’Etat doit savoir partir à temps.
Ce bon mot de Senghor garde toute son actualité à l’heure où on agite et annonce à dose homéopathique l’idée de la candidature de Me Abdoulaye Wade à la prochaine élection présidentielle. Des comités d’initiative et courants appelés 2012 se mettent en place pour pousser le Chef de l’Etat à se porter candidat à sa propre succession. La dernière sortie du porte-parole du Pds, Babacar Gaye corrobore cette volonté qui semble avoir atteint le stade de forte probabilité. L’ex-directeur de cabinet politique de la présidence déclare dans les colonnes du journal Le Populaire de ce samedi : « Wade est un point de convergence, je ne vois pas pourquoi sa candidature en 2012 pourrait gêner ».
Si cette candidature est confirmée, elle devrait objectivement gêner. En 2012, le Président Wade aura 86 ans et 93 à la fin de son mandat, s’il venait à être réélu. Dans les annales de l’histoire des pays démocratiques, nous n’avons pas encore vu un président-candidat âgé de 86 ans. Cela serait d’autant plus malvenu qu’il dirigerait, après deux mandats, un pays où l’écrasante majorité de la population est constituée de jeunes de moins de 35 ans. Quel décalage générationnel! A moins que l’actuel chef de l’Etat veuille égaler les durées de Senghor et de Diouf au pouvoir : environ vingt ans. A ce propos, l’augmentation de la durée du mandat présidentiel ramené à 7 ans a laissé planer de fortes suspicions sur les intentions prêtées au locataire du Palais Léopold Senghor de briguer de nouveau les suffrages .
Mais les risques d’un revers sont réels. Les doctes leçons de Senghor ne semblent pas être suffisamment retenues. Le Président-poète, mu d’un flair visionnaire, avait vu venir en léguant, certes de manière contestable, le pouvoir afin de négocier une sortie en douceur. La montée en puissance de l’opposant de « contribution » Wade aux élections de 1978 lui révélait les signes annonciateurs de la fin de son magistère en raison de l’usure pouvoir.
Son successeur n’a pas voulu suivre ses enseignements en voulant rester aux commandes publiques après presque deux décennies. Il est resté sourd aux coups de semonce des élections de 1996 et 1998 où l’opposition avait gagné du terrain malgré les manœuvres du régime socialiste. En 2000, il a été battu à la régulière.
L’histoire est en train de se répéter ou, du moins, de bégayer avec les dernières élections locales où la coalition Benno Siggil Sénégal a remporté quasiment toutes les grandes villes imposant une cohabitation à la sénégalaise à la majorité présidentielle et parlementaire. Cela vaut comme avertissement au pouvoir devant une opposition requinquée et ayant repris du poil de la bête. Elle se dit que c’est maintenant possible de faire mordre la poussière aux adversaires d’en face confrontés à une conjoncture économique et sociale difficile.
En définitive, le Président Wade jouerait gros s’il se lance dans la course à un nouveau mandat. Les nombreux jeunes électeurs qui voteront, pour l’essentiel, seront peu sensibles à l’argument éculé des « 40 ans du PS au pouvoir ». Ce parti aura eu le temps de purger sa peine au purgatoire de l’opposition et de se débarrasser de ses tares pour apparaître sous un meilleur jour. Plus globalement, l’opposition consciente que dispersée elle diminue ses chances, se regroupe. Elle met en gestation la dynamique d’une nouvelle coalition à l’image de la CA 2000, même si elle butte encore sur l’écueil du leadership. Mais la contradiction principale de la conquête du pouvoir pourrait prendre le dessus sur cette contradiction secondaire de la candidature unique. Ce qui place Abdoulaye Wade, qui souhaite «cinquante de pouvoir» au PDS presque à l’image du PS, dans l’urgence de se pencher rigoureusement sur ce tournant décisif. Continuer de dire que Wade est le seul point de convergence et donc le seul candidat crédible est une solution de faciliter qui est désuète.
Le choc frontal des ambitions au sein de la famille libérale ne vient pas pour arranger les choses dans le camp du pouvoir. L’autoproclamé actionnaire majoritaire du Pds Idrissa Seck et le leader de la génération dite du concret Karim Wade ainsi que les autres encagoulés aux ambitions encore tues se mènent déjà une bataille fratricide qui risque de dégénérer à l’approche de ces échéances électorales. Il est évident que le Chef de l’Etat ne peut pas encore officialiser sa non-candidature pour ne pas créer un remue-ménage ingérable. Mais d’ores et déjà, force est de constater que le génie politique du mathématicien Wade est devant une équation existentielle à plusieurs inconnues que ne résoudront pas les combinaisons et autres astuces dépassées souvent expérimentées. Y aller ou ne pas y aller mais avec qui ? That’s the question !
Abdoulaye SYLLA
syllaye@gmail.com
Ce bon mot de Senghor garde toute son actualité à l’heure où on agite et annonce à dose homéopathique l’idée de la candidature de Me Abdoulaye Wade à la prochaine élection présidentielle. Des comités d’initiative et courants appelés 2012 se mettent en place pour pousser le Chef de l’Etat à se porter candidat à sa propre succession. La dernière sortie du porte-parole du Pds, Babacar Gaye corrobore cette volonté qui semble avoir atteint le stade de forte probabilité. L’ex-directeur de cabinet politique de la présidence déclare dans les colonnes du journal Le Populaire de ce samedi : « Wade est un point de convergence, je ne vois pas pourquoi sa candidature en 2012 pourrait gêner ».
Si cette candidature est confirmée, elle devrait objectivement gêner. En 2012, le Président Wade aura 86 ans et 93 à la fin de son mandat, s’il venait à être réélu. Dans les annales de l’histoire des pays démocratiques, nous n’avons pas encore vu un président-candidat âgé de 86 ans. Cela serait d’autant plus malvenu qu’il dirigerait, après deux mandats, un pays où l’écrasante majorité de la population est constituée de jeunes de moins de 35 ans. Quel décalage générationnel! A moins que l’actuel chef de l’Etat veuille égaler les durées de Senghor et de Diouf au pouvoir : environ vingt ans. A ce propos, l’augmentation de la durée du mandat présidentiel ramené à 7 ans a laissé planer de fortes suspicions sur les intentions prêtées au locataire du Palais Léopold Senghor de briguer de nouveau les suffrages .
Mais les risques d’un revers sont réels. Les doctes leçons de Senghor ne semblent pas être suffisamment retenues. Le Président-poète, mu d’un flair visionnaire, avait vu venir en léguant, certes de manière contestable, le pouvoir afin de négocier une sortie en douceur. La montée en puissance de l’opposant de « contribution » Wade aux élections de 1978 lui révélait les signes annonciateurs de la fin de son magistère en raison de l’usure pouvoir.
Son successeur n’a pas voulu suivre ses enseignements en voulant rester aux commandes publiques après presque deux décennies. Il est resté sourd aux coups de semonce des élections de 1996 et 1998 où l’opposition avait gagné du terrain malgré les manœuvres du régime socialiste. En 2000, il a été battu à la régulière.
L’histoire est en train de se répéter ou, du moins, de bégayer avec les dernières élections locales où la coalition Benno Siggil Sénégal a remporté quasiment toutes les grandes villes imposant une cohabitation à la sénégalaise à la majorité présidentielle et parlementaire. Cela vaut comme avertissement au pouvoir devant une opposition requinquée et ayant repris du poil de la bête. Elle se dit que c’est maintenant possible de faire mordre la poussière aux adversaires d’en face confrontés à une conjoncture économique et sociale difficile.
En définitive, le Président Wade jouerait gros s’il se lance dans la course à un nouveau mandat. Les nombreux jeunes électeurs qui voteront, pour l’essentiel, seront peu sensibles à l’argument éculé des « 40 ans du PS au pouvoir ». Ce parti aura eu le temps de purger sa peine au purgatoire de l’opposition et de se débarrasser de ses tares pour apparaître sous un meilleur jour. Plus globalement, l’opposition consciente que dispersée elle diminue ses chances, se regroupe. Elle met en gestation la dynamique d’une nouvelle coalition à l’image de la CA 2000, même si elle butte encore sur l’écueil du leadership. Mais la contradiction principale de la conquête du pouvoir pourrait prendre le dessus sur cette contradiction secondaire de la candidature unique. Ce qui place Abdoulaye Wade, qui souhaite «cinquante de pouvoir» au PDS presque à l’image du PS, dans l’urgence de se pencher rigoureusement sur ce tournant décisif. Continuer de dire que Wade est le seul point de convergence et donc le seul candidat crédible est une solution de faciliter qui est désuète.
Le choc frontal des ambitions au sein de la famille libérale ne vient pas pour arranger les choses dans le camp du pouvoir. L’autoproclamé actionnaire majoritaire du Pds Idrissa Seck et le leader de la génération dite du concret Karim Wade ainsi que les autres encagoulés aux ambitions encore tues se mènent déjà une bataille fratricide qui risque de dégénérer à l’approche de ces échéances électorales. Il est évident que le Chef de l’Etat ne peut pas encore officialiser sa non-candidature pour ne pas créer un remue-ménage ingérable. Mais d’ores et déjà, force est de constater que le génie politique du mathématicien Wade est devant une équation existentielle à plusieurs inconnues que ne résoudront pas les combinaisons et autres astuces dépassées souvent expérimentées. Y aller ou ne pas y aller mais avec qui ? That’s the question !
Abdoulaye SYLLA
syllaye@gmail.com