Tous les ans, à la même date et à la même heure, le chef de l’Etat du Sénégal sert un discours à la nation. Avec toute la solennité qui l’entoure, ce discours souvent, met en exergue quelques éclats et intentions en esquivant le diagnostic et l’engagement ferme. Dans ces discours, est escamotée en général la situation réelle du pays au profit du vœu pieux. Il ne s’agit pas le plus souvent dans ces discours de mettre à niveau le citoyen par une information succincte et précise sur l’état de la nation et sur les axes du projet-chronogramme pour demain. Il s’agit juste pour le chef de lire des phrases bien agencées dans un style poétique qui capte plus par la forme que par le fond.
C’est sans doute la raison pour laquelle les discours de fin d’année au Sénégal se ressemblent presque tous et la diction du lecteur acteur face au prompteur n’y change pas grand-chose.
Un discours de rupture devrait permettre d’y voir clair et répondre à la question simple de savoir « où va le Sénégal ? ». A cette question, devrait répondre en toute lucidité le chef de l’Etat qui doit dire sans ambages ni autoglorification le présent et le futur aux citoyens embarqués dans la même barque Sénégal.
Un discours véritable doit dire aux citoyens l’exactitude de la situation pour que chacun sache le chemin qui nous reste et le rôle qui doit être le sien dans l’entreprise de construction nationale.
En passager du navire Sénégal, nous osons poser ce qui nous semble être les axes d’un discours de nouvel an crédible en 11 points.
1- INSTITUTIONS DEMOCRATIE ET JUSTICE
Il y a pléthore d’institutions inutiles au Sénégal ! Le sénat et le conseil économique et social, sans impact sur la vie nationale, doivent être supprimés.
Il y a risque grave pour la démocratie sénégalaise qui ne fait plus référence en Afrique. A deux ans de l’élection présidentielle, la constitution ne doit plus être modifiée sans consensus préalable avec les partis d’opposition. Le CENA doit recevoir les moyens légaux et matériels d’exercer sa fonction de supervision des élections en amont et en aval. Le ministère de l’intérieur doit être dirigé par une personne neutre pour au moins être dans le scénario transparent de 2000.
La taille du gouvernement est hors normes. Il doit être ramené à 20 ministres.
L’indépendance du pouvoir judiciaire est lourdement menacée. La justice ne doit donner l’impression saugrenue d’être aux ordres de l’exécutif. La mission du procureur de la république doit être plus circonscrite dans les textes et dans la pratique dans des missions régaliennes et non dans une mission politique désastreuse.
2- DIPLOMATIE ET COOPERATION INTERNATIONALE
Le Sénégal tâtonne et semble s’être embourbé par le fait de prise de positions et de décisions impactant négativement à la fois sur notre image et notre développement.
La quête de l’unité africaine ne doit pas être le lieu de sublimation même tacite de régimes non démocratiques évidents. La diplomatie sénégalaise doit obéir à des principes universels de respect de la démocratie et de la bonne gouvernance. Elle doit aussi mettre en exerce l’intérêt du Sénégal et de l’Afrique des peuples.
Nous avons depuis 2000 opté pour un fort arrimage aux pays du golf arabique. Il est temps d’en faire le bilan sans complaisance ni considérations amicales insensées. Qu’est-ce que la nation sénégalaise a gagné du changement noté et en cours de partenaires stratégiques ? Quelles sont les bases textuelles stratégiques de cette coopération subite et quel est son avenir au moment où Dubaï est dans un tourbillon financier à l’issue incertaine ? Une réponse objective à cette question permettra de recadrer la diplomatie et la coopération stratégique sénégalaise qui ne doivent pas obéir aux amitiés de personne mais à l’intérêt supérieur de la nation. Au moment où on a presque fini de sceller le partenariat stratégique entre Sénégal Airlines et Fly Emirates, le constat est que Jafza n’a pas encore mis en place la DISEZ promise de Diamniadio et, DP World semble briller par sa frilosité dans les investissements avec le risque majeur de mort certaine du port de Dakar en dépit du tintamarre. Sommes-nous mariés pour le meilleur et pour le pire à Dubaï ? « L’erreur est humaine. Persister dans l’erreur est diabolique » nous disait-on dans un des discours à la nation. Il est temps de faire le bilan de cette coopération avec les pays du golf et de ne voir que l’intérêt de la nation. Sommes-nous assez libres pour le faire ? That is the question.
3- SECURITE
Les citoyens ne se sentent plus en sécurité dans leur propre pays. Des polices de proximité doivent être implantées dans toutes les communes d’arrondissement et communautés rurales et, les moyens de la protection civile doivent être renforcés sine die. La sécurité aux frontières doit être renforcée en dotant l’armée, la douane et la gendarmerie de moyens adéquats pour lutter contre le grand banditisme.
Le feu n’est malheureusement pas éteint en Casamance. Un grand débat national sur la question casamançaise doit être organisé sans folklore pour réaffirmer l’encrage national de cette région sud et, jeter les bases d’une réinsertion des maquisards dans la république.
4- ALIMENTATION AGRICULTURE PECHE ET ELEVAGE ET CONSOMMATION
Le Sénégal ne nourrit pas sa population. Il y a un problème focal d’articulation de sa production à la consommation locale extravertie sous la tyrannie du riz et des produits de masse importés. Cette situation constitue un boulet aux pieds du Sénégal. L’Etat, premier agent économique, n’échappe pas à cette désarticulation production-consommation au moment où les ministres de la république par exemple s’habillent trop souvent en costumes griffés.
Un plan hardi pour asseoir la consommation locale sur les bases nationales doit être mis en place par l’accès à la production locale et la transformation des produits agricoles, halieutiques et de l’élevage. Ce combat est d’abord culturel et doit être mené par action combinée sur plusieurs leviers qui toucheraient même le subconscient des masses.
Une loi imposant à l’état et ses démembrements de recourir systématiquement à la production locale doit être voté et, les mesures incitatives dynamiques mises en place avec les acteurs pour favoriser sur tous les plans à la fois la production et la consommation locales.
5- ECONOMIE, FINANCES ET EMPLOI
L’image profane que donne la gestion des finances publiques au Sénégal ne semble pas reluisante dans le sens orthodoxe du terme. Les récents dépassements budgétaires ont semblé donner du Sénégal une image de navire piloté à vue qui n’a pas pu éviter de cogner sur l’iceberg.
Les finances publiques doivent être assainies par un strict respect des procédures et des budgets votés à l’assemblée nationale. Le gaspillage et la gabegie doivent être fortement combattus et le ministère des finances gagnerait à s’affranchir de considérations non orthodoxes. Une communication claire et sincère doit être faite sur notre niveau d’endettement intérieur et extérieur à la lumière de l’utilisation faite des sommes que les générations futures vont devoir payer un jour. Quel est le coût réel des infrastructures ? Comment ont-elles été financées ? Quand est-ce et comment seront-elles payées ? Les citoyens doivent trouver des réponses à ces questions.
Parlant d’emploi, les sénégalais sont plus désœuvrés qu’actifs et n’ont pas assez de revenus pour tirer la croissance par la consommation. L’emploi des jeunes et des femmes doit être une priorité qui ne saurait faire l’objet de tape-à-l’œil politique ou d’appât électoral conjoncturel. La ligne directrice de l’auto entreprenariat doit être clairement définie. Les questions de la formation à l’auto entreprenariat, du financement et, du suivi des projets doivent être prises en charge par l’Etat qui définira les secteurs porteurs à forte incidence sur la stratégie de croissance. Il s’agira d’agir sur l’emploi dans un cadre autocentré et auto entretenu par une maitrise nationale de la production qui doit viser d’abord la forte satisfaction de la consommation locale. Il ne doit plus s’agir de saupoudrage ou d’effets d’annonce avec des emplois précaires aux relents électoralistes. Il doit s’agir de faire des sénégalais des autos entrepreneurs.
6- SANTE
Les sénégalais n’ont pas les moyens d’assurer leur propre santé. C’est une lapalissade. Une personne qui n’a pas les moyens de se soigner doit être prise en charge par l’Etat qui n’a pas le droit de se dérober de sa mission d’assistance au citoyen. L’Etat doit assurer le maintien et le renouvellement de l’infrastructure sanitaire publique sérieusement entamée. Il y a trop de folklore autour de la santé notamment dans la gestion des maladies endémiques comme le paludisme, les maladies nutritionnelles, respiratoires et cutanées. L’Etat doit agir dans ce domaine par une politique claire d’éducation, de sensibilisation, de prévention et de traitement loin des campagnes simplement rituelles et éphémères. Cette politique prendra en compte les avis des acteurs de la santé d’abord.
Certaines maladies graves tuent quasiment toute personne atteinte et sans moyens. Une politique de couverture sanitaire par la prise en charge des grandes maladies comme le cancer, le sida, les AVC entre autres doit être définie clairement et le rôle de l’Etat bien précisé. Il est inadmissible de gaspiller autant d’argent dans des secteurs non prioritaires au moment où l’hôpital public fout le camp. C’est une question de dignité humaine.
7- AMENAGEMENT DU TERRITOIRE, URBANISME, HABITAT, TRANSPORT ASSAINISSEMENT ET, DECENTRALISATION
Souvent on a l’impression que tout se limite à Dakar. Le Sénégal ne se limite pas au 0,3% de superficie nationale que représente Dakar. Une stratégie claire de sortie de cette macrocéphalie urbaine doit être mise en place et comprise par tous. La Capitale administrative doit être délocalisée le plus éloigné possible de Dakar pour permettre une redéfinition de l’occupation efficiente de l’espace nationale. Un projet urbain national clair doit être mis en place à l’horizon 2030. Ce projet doit prendre en compte des aspects liés à l’habitat, au transport, à l’assainissement entre autres. De même, un projet rural clair versant logique du projet urbain doit aussi être mis en place pour préserver l’espace pastorale et agricole.
L’assainissement du milieu rural doit être d’égale priorité que celui du milieu urbain et, l’ONAS doit élargir son champ d’action sur l’étendue du territoire.
Les deux projets (urbain et rural) ne sauraient tenir sans une refonte des textes sur la décentralisation qui doivent tendre vers plus d’autonomie et de moyens pour les régions, villes, communes et communautés rurales du pays. Nous devons oser déconcentrer un peu plus les pouvoirs centraux de l’Etat en recadrant le découpage administratif plus sur des bases d’homogénéité géoéconomique que sur des calculs politiques ou électoralistes.
8- EAU ET ENERGIE
L’eau et l’énergie sont vitales et n’en constituent pas moins des casse-tête au Sénégal. La Senelec semble être une société de délestage périodique et l’eau potable est une denrée rare.
L’accès à l’eau potable et à l’énergie est un problème impactant sur le développement du Sénégal.
Le Sénégal doit avoir une politique eau potable très claire. Cette eau doit être accessible à toutes les populations urbaines et rurales. La question de la sécurité eau doit être clairement posée et la forte dépendance vis-à-vis du lac de Guiers repensée.
Le Sénégal ne doit plus dépendre de la seule Senelec pour régler ses besoins en énergie. La politique énergétique doit être revue en prenant en compte les énergies renouvelables et en permettant à d’autres acteurs d’investir dans ce secteur.
9- EDUCATION ET FORMATION
L’enseignement public se meurt au Sénégal. L’école et l’université ne forment plus pour le marché de l’emploi. Aujourd’hui, inscrire son fils ou sa fille dans le privé n’est plus un effet de snobisme mais bien une nécessité que la plupart des familles ne peuvent pas supporter. Cela pose un problème de justice social. Les élites se renouvelant en fonction du rang social. Le problème de l’adéquation de l’éducation aux niches d’emploi doit être posé en relation avec les différents acteurs. Des assises de l’éducation et de la formation doivent être organisées avec les acteurs pour cerner les problèmes et mettre l’école et l’université au service du développement national.
10- AFFAIRES SOCIALES ET SOLIDARITE
L’Etat au Sénégal semble avoir démissionné de sa mission d’impulsion de la solidarité au bénéfice des véritables nécessiteux. Les personnes frappées de handicap et les victimes de la conjoncture économique n’ont pas de cadre organisé pour les aider à se passer de l’aide. Le ministère en charge de la solidarité doit être plus visible et avoir des démembrements dynamiques pour mettre en place un vaste réseau d’appui aux nécessiteux en relation avec les communes et communautés rurales. Les questions comme l’exploitation des enfants dits de la rue interpellent l’Etat au premier chef qui doit trouver des solutions durables à ces problèmes.
11- SPORT ET CULTURE
Le sport au Sénégal semble être l’affaire de quelques bénévoles suant sous la chaleur de l’amateurisme et qui ne voient l’Etat qu’au moment de la récolte des fruits de la performance. Il est trop facile de brandir en récupération politique les trophées de ces bénévoles qui dans le secret des sacrifices d’avant trophées comptaient l’Etat parmi les abonnés absents. Cette politique de la récupération doit cesser au profit d’une véritable politique sportive articulée autour de l’école, des clubs et du milieu associatif dans. La stratégie doit être claire entre sport d’élite qui doit tendre vers le professionnalisme et sport de masse qui doit être une affaire collective nationale multi générationnelle.
Dans le domaine culturel, l’écoute doit être de mise. Les projets culturels ne doivent pas obéir à la seule inspiration du chef mais bien à la somme des avis des acteurs culturels. La culture doit dépasser le stade contemplatif et simplement folklorique. L’Etat doit poser la réflexion sur l’articulation du projet culturel au formatage du sénégalais moderne enraciné autour de valeurs de progrès. Une fois le projet culturel bien campé, l’Etat doit mettre les moyens pour aider les vecteurs de ce projet que sont les acteurs culturels.
Au total, ce discours virtuel en 11 points n’a pas la prétention de l’exhaustivité. Seulement, les problèmes génériques de fond qu’il pose ne sauraient être esquivés ou mis au frigo.
Au-delà de la belle phraséologie du 31 décembre à 20 heures, un discours sur l’état réel de la nation sénégalaise est de loin préférable au simple speech vertical du maitre à la nation. Le comprendre serait déjà un pas important vers plus de respect et de considération pour les citoyens qui, eux aussi, ont leur discours quotidiens en sourdine sur la nation. Il est inquiétant de constater que ce discours silencieux des citoyens passe peu à peu de la déception à la révolte sans qu’une oreille attentive n’entende cette complainte.
Le 31 décembre à 20 heures, plus d’humilité pourrait permette au discours de voir le Sénégal au-delà de la simple lucarne électoraliste qui en plus d’être réductrice serait tentée de peindre à nouveau un tableau virtuel occultant la « réelle réalité ».
Oui pour un discours véritable calé à la mesure de ce peuple majeur et réfléchi qui préfère le miel sous la langue au miel dans les oreilles.
Où va le Sénégal ?
Un discours qui ne répond pas avec précision et assurance à cette question sera comme les autres : rangés dans les armoires moisis des simples discours qui passent et repassent.
Mamadou NDIONE
Mandione15@gmail.com
C’est sans doute la raison pour laquelle les discours de fin d’année au Sénégal se ressemblent presque tous et la diction du lecteur acteur face au prompteur n’y change pas grand-chose.
Un discours de rupture devrait permettre d’y voir clair et répondre à la question simple de savoir « où va le Sénégal ? ». A cette question, devrait répondre en toute lucidité le chef de l’Etat qui doit dire sans ambages ni autoglorification le présent et le futur aux citoyens embarqués dans la même barque Sénégal.
Un discours véritable doit dire aux citoyens l’exactitude de la situation pour que chacun sache le chemin qui nous reste et le rôle qui doit être le sien dans l’entreprise de construction nationale.
En passager du navire Sénégal, nous osons poser ce qui nous semble être les axes d’un discours de nouvel an crédible en 11 points.
1- INSTITUTIONS DEMOCRATIE ET JUSTICE
Il y a pléthore d’institutions inutiles au Sénégal ! Le sénat et le conseil économique et social, sans impact sur la vie nationale, doivent être supprimés.
Il y a risque grave pour la démocratie sénégalaise qui ne fait plus référence en Afrique. A deux ans de l’élection présidentielle, la constitution ne doit plus être modifiée sans consensus préalable avec les partis d’opposition. Le CENA doit recevoir les moyens légaux et matériels d’exercer sa fonction de supervision des élections en amont et en aval. Le ministère de l’intérieur doit être dirigé par une personne neutre pour au moins être dans le scénario transparent de 2000.
La taille du gouvernement est hors normes. Il doit être ramené à 20 ministres.
L’indépendance du pouvoir judiciaire est lourdement menacée. La justice ne doit donner l’impression saugrenue d’être aux ordres de l’exécutif. La mission du procureur de la république doit être plus circonscrite dans les textes et dans la pratique dans des missions régaliennes et non dans une mission politique désastreuse.
2- DIPLOMATIE ET COOPERATION INTERNATIONALE
Le Sénégal tâtonne et semble s’être embourbé par le fait de prise de positions et de décisions impactant négativement à la fois sur notre image et notre développement.
La quête de l’unité africaine ne doit pas être le lieu de sublimation même tacite de régimes non démocratiques évidents. La diplomatie sénégalaise doit obéir à des principes universels de respect de la démocratie et de la bonne gouvernance. Elle doit aussi mettre en exerce l’intérêt du Sénégal et de l’Afrique des peuples.
Nous avons depuis 2000 opté pour un fort arrimage aux pays du golf arabique. Il est temps d’en faire le bilan sans complaisance ni considérations amicales insensées. Qu’est-ce que la nation sénégalaise a gagné du changement noté et en cours de partenaires stratégiques ? Quelles sont les bases textuelles stratégiques de cette coopération subite et quel est son avenir au moment où Dubaï est dans un tourbillon financier à l’issue incertaine ? Une réponse objective à cette question permettra de recadrer la diplomatie et la coopération stratégique sénégalaise qui ne doivent pas obéir aux amitiés de personne mais à l’intérêt supérieur de la nation. Au moment où on a presque fini de sceller le partenariat stratégique entre Sénégal Airlines et Fly Emirates, le constat est que Jafza n’a pas encore mis en place la DISEZ promise de Diamniadio et, DP World semble briller par sa frilosité dans les investissements avec le risque majeur de mort certaine du port de Dakar en dépit du tintamarre. Sommes-nous mariés pour le meilleur et pour le pire à Dubaï ? « L’erreur est humaine. Persister dans l’erreur est diabolique » nous disait-on dans un des discours à la nation. Il est temps de faire le bilan de cette coopération avec les pays du golf et de ne voir que l’intérêt de la nation. Sommes-nous assez libres pour le faire ? That is the question.
3- SECURITE
Les citoyens ne se sentent plus en sécurité dans leur propre pays. Des polices de proximité doivent être implantées dans toutes les communes d’arrondissement et communautés rurales et, les moyens de la protection civile doivent être renforcés sine die. La sécurité aux frontières doit être renforcée en dotant l’armée, la douane et la gendarmerie de moyens adéquats pour lutter contre le grand banditisme.
Le feu n’est malheureusement pas éteint en Casamance. Un grand débat national sur la question casamançaise doit être organisé sans folklore pour réaffirmer l’encrage national de cette région sud et, jeter les bases d’une réinsertion des maquisards dans la république.
4- ALIMENTATION AGRICULTURE PECHE ET ELEVAGE ET CONSOMMATION
Le Sénégal ne nourrit pas sa population. Il y a un problème focal d’articulation de sa production à la consommation locale extravertie sous la tyrannie du riz et des produits de masse importés. Cette situation constitue un boulet aux pieds du Sénégal. L’Etat, premier agent économique, n’échappe pas à cette désarticulation production-consommation au moment où les ministres de la république par exemple s’habillent trop souvent en costumes griffés.
Un plan hardi pour asseoir la consommation locale sur les bases nationales doit être mis en place par l’accès à la production locale et la transformation des produits agricoles, halieutiques et de l’élevage. Ce combat est d’abord culturel et doit être mené par action combinée sur plusieurs leviers qui toucheraient même le subconscient des masses.
Une loi imposant à l’état et ses démembrements de recourir systématiquement à la production locale doit être voté et, les mesures incitatives dynamiques mises en place avec les acteurs pour favoriser sur tous les plans à la fois la production et la consommation locales.
5- ECONOMIE, FINANCES ET EMPLOI
L’image profane que donne la gestion des finances publiques au Sénégal ne semble pas reluisante dans le sens orthodoxe du terme. Les récents dépassements budgétaires ont semblé donner du Sénégal une image de navire piloté à vue qui n’a pas pu éviter de cogner sur l’iceberg.
Les finances publiques doivent être assainies par un strict respect des procédures et des budgets votés à l’assemblée nationale. Le gaspillage et la gabegie doivent être fortement combattus et le ministère des finances gagnerait à s’affranchir de considérations non orthodoxes. Une communication claire et sincère doit être faite sur notre niveau d’endettement intérieur et extérieur à la lumière de l’utilisation faite des sommes que les générations futures vont devoir payer un jour. Quel est le coût réel des infrastructures ? Comment ont-elles été financées ? Quand est-ce et comment seront-elles payées ? Les citoyens doivent trouver des réponses à ces questions.
Parlant d’emploi, les sénégalais sont plus désœuvrés qu’actifs et n’ont pas assez de revenus pour tirer la croissance par la consommation. L’emploi des jeunes et des femmes doit être une priorité qui ne saurait faire l’objet de tape-à-l’œil politique ou d’appât électoral conjoncturel. La ligne directrice de l’auto entreprenariat doit être clairement définie. Les questions de la formation à l’auto entreprenariat, du financement et, du suivi des projets doivent être prises en charge par l’Etat qui définira les secteurs porteurs à forte incidence sur la stratégie de croissance. Il s’agira d’agir sur l’emploi dans un cadre autocentré et auto entretenu par une maitrise nationale de la production qui doit viser d’abord la forte satisfaction de la consommation locale. Il ne doit plus s’agir de saupoudrage ou d’effets d’annonce avec des emplois précaires aux relents électoralistes. Il doit s’agir de faire des sénégalais des autos entrepreneurs.
6- SANTE
Les sénégalais n’ont pas les moyens d’assurer leur propre santé. C’est une lapalissade. Une personne qui n’a pas les moyens de se soigner doit être prise en charge par l’Etat qui n’a pas le droit de se dérober de sa mission d’assistance au citoyen. L’Etat doit assurer le maintien et le renouvellement de l’infrastructure sanitaire publique sérieusement entamée. Il y a trop de folklore autour de la santé notamment dans la gestion des maladies endémiques comme le paludisme, les maladies nutritionnelles, respiratoires et cutanées. L’Etat doit agir dans ce domaine par une politique claire d’éducation, de sensibilisation, de prévention et de traitement loin des campagnes simplement rituelles et éphémères. Cette politique prendra en compte les avis des acteurs de la santé d’abord.
Certaines maladies graves tuent quasiment toute personne atteinte et sans moyens. Une politique de couverture sanitaire par la prise en charge des grandes maladies comme le cancer, le sida, les AVC entre autres doit être définie clairement et le rôle de l’Etat bien précisé. Il est inadmissible de gaspiller autant d’argent dans des secteurs non prioritaires au moment où l’hôpital public fout le camp. C’est une question de dignité humaine.
7- AMENAGEMENT DU TERRITOIRE, URBANISME, HABITAT, TRANSPORT ASSAINISSEMENT ET, DECENTRALISATION
Souvent on a l’impression que tout se limite à Dakar. Le Sénégal ne se limite pas au 0,3% de superficie nationale que représente Dakar. Une stratégie claire de sortie de cette macrocéphalie urbaine doit être mise en place et comprise par tous. La Capitale administrative doit être délocalisée le plus éloigné possible de Dakar pour permettre une redéfinition de l’occupation efficiente de l’espace nationale. Un projet urbain national clair doit être mis en place à l’horizon 2030. Ce projet doit prendre en compte des aspects liés à l’habitat, au transport, à l’assainissement entre autres. De même, un projet rural clair versant logique du projet urbain doit aussi être mis en place pour préserver l’espace pastorale et agricole.
L’assainissement du milieu rural doit être d’égale priorité que celui du milieu urbain et, l’ONAS doit élargir son champ d’action sur l’étendue du territoire.
Les deux projets (urbain et rural) ne sauraient tenir sans une refonte des textes sur la décentralisation qui doivent tendre vers plus d’autonomie et de moyens pour les régions, villes, communes et communautés rurales du pays. Nous devons oser déconcentrer un peu plus les pouvoirs centraux de l’Etat en recadrant le découpage administratif plus sur des bases d’homogénéité géoéconomique que sur des calculs politiques ou électoralistes.
8- EAU ET ENERGIE
L’eau et l’énergie sont vitales et n’en constituent pas moins des casse-tête au Sénégal. La Senelec semble être une société de délestage périodique et l’eau potable est une denrée rare.
L’accès à l’eau potable et à l’énergie est un problème impactant sur le développement du Sénégal.
Le Sénégal doit avoir une politique eau potable très claire. Cette eau doit être accessible à toutes les populations urbaines et rurales. La question de la sécurité eau doit être clairement posée et la forte dépendance vis-à-vis du lac de Guiers repensée.
Le Sénégal ne doit plus dépendre de la seule Senelec pour régler ses besoins en énergie. La politique énergétique doit être revue en prenant en compte les énergies renouvelables et en permettant à d’autres acteurs d’investir dans ce secteur.
9- EDUCATION ET FORMATION
L’enseignement public se meurt au Sénégal. L’école et l’université ne forment plus pour le marché de l’emploi. Aujourd’hui, inscrire son fils ou sa fille dans le privé n’est plus un effet de snobisme mais bien une nécessité que la plupart des familles ne peuvent pas supporter. Cela pose un problème de justice social. Les élites se renouvelant en fonction du rang social. Le problème de l’adéquation de l’éducation aux niches d’emploi doit être posé en relation avec les différents acteurs. Des assises de l’éducation et de la formation doivent être organisées avec les acteurs pour cerner les problèmes et mettre l’école et l’université au service du développement national.
10- AFFAIRES SOCIALES ET SOLIDARITE
L’Etat au Sénégal semble avoir démissionné de sa mission d’impulsion de la solidarité au bénéfice des véritables nécessiteux. Les personnes frappées de handicap et les victimes de la conjoncture économique n’ont pas de cadre organisé pour les aider à se passer de l’aide. Le ministère en charge de la solidarité doit être plus visible et avoir des démembrements dynamiques pour mettre en place un vaste réseau d’appui aux nécessiteux en relation avec les communes et communautés rurales. Les questions comme l’exploitation des enfants dits de la rue interpellent l’Etat au premier chef qui doit trouver des solutions durables à ces problèmes.
11- SPORT ET CULTURE
Le sport au Sénégal semble être l’affaire de quelques bénévoles suant sous la chaleur de l’amateurisme et qui ne voient l’Etat qu’au moment de la récolte des fruits de la performance. Il est trop facile de brandir en récupération politique les trophées de ces bénévoles qui dans le secret des sacrifices d’avant trophées comptaient l’Etat parmi les abonnés absents. Cette politique de la récupération doit cesser au profit d’une véritable politique sportive articulée autour de l’école, des clubs et du milieu associatif dans. La stratégie doit être claire entre sport d’élite qui doit tendre vers le professionnalisme et sport de masse qui doit être une affaire collective nationale multi générationnelle.
Dans le domaine culturel, l’écoute doit être de mise. Les projets culturels ne doivent pas obéir à la seule inspiration du chef mais bien à la somme des avis des acteurs culturels. La culture doit dépasser le stade contemplatif et simplement folklorique. L’Etat doit poser la réflexion sur l’articulation du projet culturel au formatage du sénégalais moderne enraciné autour de valeurs de progrès. Une fois le projet culturel bien campé, l’Etat doit mettre les moyens pour aider les vecteurs de ce projet que sont les acteurs culturels.
Au total, ce discours virtuel en 11 points n’a pas la prétention de l’exhaustivité. Seulement, les problèmes génériques de fond qu’il pose ne sauraient être esquivés ou mis au frigo.
Au-delà de la belle phraséologie du 31 décembre à 20 heures, un discours sur l’état réel de la nation sénégalaise est de loin préférable au simple speech vertical du maitre à la nation. Le comprendre serait déjà un pas important vers plus de respect et de considération pour les citoyens qui, eux aussi, ont leur discours quotidiens en sourdine sur la nation. Il est inquiétant de constater que ce discours silencieux des citoyens passe peu à peu de la déception à la révolte sans qu’une oreille attentive n’entende cette complainte.
Le 31 décembre à 20 heures, plus d’humilité pourrait permette au discours de voir le Sénégal au-delà de la simple lucarne électoraliste qui en plus d’être réductrice serait tentée de peindre à nouveau un tableau virtuel occultant la « réelle réalité ».
Oui pour un discours véritable calé à la mesure de ce peuple majeur et réfléchi qui préfère le miel sous la langue au miel dans les oreilles.
Où va le Sénégal ?
Un discours qui ne répond pas avec précision et assurance à cette question sera comme les autres : rangés dans les armoires moisis des simples discours qui passent et repassent.
Mamadou NDIONE
Mandione15@gmail.com