Les caricatures des «Echos de Forto», un journal clandestin en Erythrée. CApture d'écran
En apparence, ce n'est rien. Quatre pages, avec une mise en page de débutant. Mais pour les Erythréens, c'est un coup de tonnerre, une petite bombe à retardement qu'on se passe discrètement, de mains en mains : le premier journal clandestin du pays le plus fermé d'Afrique.Tenu secret jusque-là, circulant dans le cercle restreint des familles, ce bulletin rudimentaire a été officiellement lancé le 18 septembre dernier par le mouvement de la jeunesse érythréenne en exil Eritrean Youth Solidarity for Change (EYSC).
Une date symbolique
La date n'a pas été choisie au hasard : elle marque le douzième anniversaire de la fermeture soudaine de la presse privée, le jour de l'arrestation des réformistes du G15. Baptisé Meqaleh Forto (« Echos de Forto »), cette nouvelle publication sulfureuse rend hommage aux militaires mutins du 21 janvier. Une unité mécanisée avait, ce jour-là, pris le contrôle du ministère de l'Information, située sur la colline de Forto, à l'ouest de la capitale Asmara, pour exiger la libération des prisonniers politiques et la ratification de la Constitution. « L'éditorial de cette première édition rend hommage à l'esprit des mutins, explique Selam Kidane, l'une des responsables de l'EYSC. Nous rendons évidemment hommage à la signification des événements du 21 janvier. Ils devraient inspirer l'esprit de résistance des Erythréens et nourrir leur exigence d'une gouvernance constitutionnelle. »
Articles d'information sur les activités de l'EYSC, dessins satiriques, appels à la désobéissance civile face aux rouages du pouvoir, mode d'emploi pour la libération des esprits : le journal fait passer des messages extrêmement subversifs pour ce petit pays reclus de la Corne de l'Afrique, l'un des rares territoires du monde où n'existe aucune publication privée. « Il est difficile de savoir combien de copies ont circulé, explique Selam Kidane. La distribution s'est faite sur une base individuelle et aucun maillon de notre chaîne n'est tenu de rendre des comptes. C'est une initiative basée sur la liberté et la responsabilité de chacun. »
Echos de Forto, un lien fort entre la diaspora et les Erythréens
En Erythrée, la scène médiatique est écrasée par l'omniprésence des médias de propagande du gouvernement : la chaîne Eri-TV, la radio Voix des masses populaires, celle du ministère de la Défense et les journaux officiels. Seules quelques stations de journalistes en exil parviennent à se faire entendre à l'intérieur du pays, dont la plus importante et la plus indépendante, Radio Erena, fait l'objet d'une campagne de brouillage du pouvoir. Inaccessible en dehors des cybercafés et des ministères, Internet est si étroitement surveillé qu'il est impensable de consulter un site sans être identifié par la Sécurité d'Etat.
Dans ces conditions, Meqaleh Forto constitue une première historique, depuis ce « maudit septembre », voici douze ans, où le pays a basculé dans le totalitarisme. « Tout ceci n'a qu'un seul but, conclut Selam Kidane. Nous voulons tisser un lien fort entre nous qui sommes en diaspora et nos concitoyens qui sont restés à l'intérieur. » Les Erythréens mesurent ainsi, entre les quatre coins de ce journal clandestin, l'espace qui leur est octroyé pour penser autrement, en-dehors du cadre délimité par le président Issayas Afeworki et ses fidèles.
Souce : Rfi.fr
Une date symbolique
La date n'a pas été choisie au hasard : elle marque le douzième anniversaire de la fermeture soudaine de la presse privée, le jour de l'arrestation des réformistes du G15. Baptisé Meqaleh Forto (« Echos de Forto »), cette nouvelle publication sulfureuse rend hommage aux militaires mutins du 21 janvier. Une unité mécanisée avait, ce jour-là, pris le contrôle du ministère de l'Information, située sur la colline de Forto, à l'ouest de la capitale Asmara, pour exiger la libération des prisonniers politiques et la ratification de la Constitution. « L'éditorial de cette première édition rend hommage à l'esprit des mutins, explique Selam Kidane, l'une des responsables de l'EYSC. Nous rendons évidemment hommage à la signification des événements du 21 janvier. Ils devraient inspirer l'esprit de résistance des Erythréens et nourrir leur exigence d'une gouvernance constitutionnelle. »
Articles d'information sur les activités de l'EYSC, dessins satiriques, appels à la désobéissance civile face aux rouages du pouvoir, mode d'emploi pour la libération des esprits : le journal fait passer des messages extrêmement subversifs pour ce petit pays reclus de la Corne de l'Afrique, l'un des rares territoires du monde où n'existe aucune publication privée. « Il est difficile de savoir combien de copies ont circulé, explique Selam Kidane. La distribution s'est faite sur une base individuelle et aucun maillon de notre chaîne n'est tenu de rendre des comptes. C'est une initiative basée sur la liberté et la responsabilité de chacun. »
Echos de Forto, un lien fort entre la diaspora et les Erythréens
En Erythrée, la scène médiatique est écrasée par l'omniprésence des médias de propagande du gouvernement : la chaîne Eri-TV, la radio Voix des masses populaires, celle du ministère de la Défense et les journaux officiels. Seules quelques stations de journalistes en exil parviennent à se faire entendre à l'intérieur du pays, dont la plus importante et la plus indépendante, Radio Erena, fait l'objet d'une campagne de brouillage du pouvoir. Inaccessible en dehors des cybercafés et des ministères, Internet est si étroitement surveillé qu'il est impensable de consulter un site sans être identifié par la Sécurité d'Etat.
Dans ces conditions, Meqaleh Forto constitue une première historique, depuis ce « maudit septembre », voici douze ans, où le pays a basculé dans le totalitarisme. « Tout ceci n'a qu'un seul but, conclut Selam Kidane. Nous voulons tisser un lien fort entre nous qui sommes en diaspora et nos concitoyens qui sont restés à l'intérieur. » Les Erythréens mesurent ainsi, entre les quatre coins de ce journal clandestin, l'espace qui leur est octroyé pour penser autrement, en-dehors du cadre délimité par le président Issayas Afeworki et ses fidèles.
Souce : Rfi.fr