Egypte: Mohamed Morsi détenu par l’armée, ses partisans dénoncent un coup d’Etat

La fête populaire envahit depuis hier, mercredi 3 juillet, la place Tahrir. La colère des soutiens des Frères musulmans est quant à elle palpable sur une autre place de la capitale égyptienne. Ils dénoncent un coup d'Etat après le limogeage par la force du seul civil à avoir accédé à la fonction suprême en Egypte, Mohamed Morsi, qui est actuellement détenu par l’armée.



Aux scènes de liesse place Tahrir ont répondu des scènes de désespoir près de la mosquée Rabaa al-Adiwiya. Comme tous les Egyptiens, les dizaines de milliers de partisans du président déchu Mohamed Morsi ont écouté, avec anxiété, la déclaration du général Sissi. Ils ont été sonnés par son annonce.

Il y a eu chez eux une immense déception, beaucoup de frustration, de la colère aussi. Ils ne comprennent pas pourquoi on leur a volé leur victoire obtenue dans les urnes il y a un an. Ils sont convaincus que c’est un coup porté contre la démocratie. « Je me sens très malheureux, explique Moustapha, un enseignant du Caire. Là, je me sens comme si toute ma famille était morte. Je ne sais pas de quoi le futur sera fait, mais les islamistes ne sont pas violents. (...) On avait le rêve de construire une démocratie, on avait remporté l’élection présidentielle, on avait une Constitution. Et en un instant, tout s’est effondré. Nous avions l’opportunité de construire un Etat, d’avoir une alternance au pouvoir, d’avoir la paix, une grande démocratie. Bien sûr la répression (contre) les islamistes va reprendre, comme avant la révolution. Ce sera peut-être même pire. C’est peut-être pour ça que la violence va revenir. Et tout le monde en souffrira. Pas seulement l’Egypte. »
Beaucoup disaient hier mercredi refuser tout simplement ce coup d’Etat. Ils vont rester dans la rue, de manière pacifique, assurent-ils. Même si certains se disent prêts à sacrifier leur vie pour rétablir, pour récupérer, ce qu’on leur a volé.
Il n’y a pas eu de violences au Caire cette nuit. L’armée s’est déployée tout autour de ce rassemblement. Il y a en revanche eu des affrontements meurtriers entre pro et anti-Morsi à l’extérieur de la capitale. Au moins une dizaine de morts dans les villes d’Alexandrie, Marsa Matrouh et Miniyah.
Mohamed Morsi détenu par l’armée
Pour l’instant, officiellement, le président Morsi est détenu par les forces armées au sein du ministère de la Défense, où il a été transféré à l’aube. D’autres versions annoncent qu’il serait détenu dans le bâtiment des renseignements militaires. Il avait auparavant été placé en résidence surveillée dans un bâtiment de la Garde républicaine.
 
Ce qui est certain à cette heure, c’est que Mohamed Morsi n’est pas libre de ses mouvements. Une vidéo, diffusée sur Youtube et reprise par la chaîne qatarienne Al-Jazeera sur laquelle Mohamed Morsi réaffirme qu’il est le président, a provoqué la confusion quelque temps. Cette vidéo amateur aurait été cependant réalisée, selon des experts, avant le renversement du président.
Les Frères musulmans décapités
La direction de la confrérie des Frères musulmans est pratiquement décapitée. Entre arrestations et interdictions de quitter le territoire, 300 personnes sont concernées. Parmi elles, le guide suprême de la confrérie Mohamad Badie et son éminence grise Khayrat el-Chater ainsi que Saad al-Katatni, le chef du parti des Frères musulmans, le Parti liberté et justice.
Les Frères musulmans perdent aussi le Sénat où ils jouissaient de la majorité absolue. Avec la suspension de la Constitution, le jugement de la Haute Cour constitutionnelle invalidant le Sénat devient effectif. Plus grave, la Confrérie a perdu ses organes de propagande. Trois chaînes de télévision Masr 25, Al Hafez et Al Nass ont été fermées pour « incitation à la haine ». Ce sont ces chaînes qui mobilisaient les militants Frères musulmans lors des grandes manifestations.
De plus, la Confrérie fait aujourd’hui face à une crise interne. Une partie des jeunes Frères musulmans est en colère contre sa direction. Une direction qu’elle accuse d’avoir dévoyé la Confrérie avant de la mener droit dans le mur.
Source: RFI
 

Charles Thialice SENGHOR

Jeudi 4 Juillet 2013 10:06


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