Au milieu de l’été, la nouvelle fait le tour des boucles d’information ukrainiennes. Le 28 juillet, à proximité du village de Mkhy, dans la région de Chernihiv, cinq saboteurs russes ont été abattus. Âgés de 28 à 36 ans, ces hommes sont tombés dans une embuscade tendue par les forces spéciales ukrainiennes à une bonne heure à pied de leur frontière. Un succès notable pour Kiev : les morts appartiennent à Senezh, une unité d’élite de l’armée russe.
« Les services spéciaux ukrainiens ont essayé de chasser les militaires de Senezh depuis plus d’un an, parce que ces forces spéciales sont classées comme top secrètes et hautement dangereuses », explique l’équipe de Molfar, une agence privée d’enquête en sources ouvertes qui collabore avec l’armée, dans une présentation à la presse.
Les Ukrainiens accusent ces commandos de l’ombre de régulièrement assassiner les civils qu’ils croisent. « Senezh a un "rituel sanglant", poursuit l’équipe de Molfar. Après la remise de leur diplôme, une fois intégrés dans les groupes de reconnaissance subversifs, ils sont censés pénétrer le territoire ukrainien et ramener un Ukrainien tué. S’ils ne parviennent pas à ramener un soldat, ils prennent un civil. » Des informations invérifiables, tant cette unité reste mystérieuse, y compris dans son propre pays.
Rêve de forces spéciales à l’occidentale
Comme de nombreux pays, l’Union soviétique commence à développer des unités de forces spéciales à la sortie de la Seconde Guerre mondiale. Ces commandos, les spetsnaz en russe, sont majoritairement affiliés au renseignement militaire, la GRU, mais aussi par la suite au KGB et à la marine. « Le spetsnaz, décrypte Vincent Tourret, spécialiste de la stratégie militaire russe, c’est l’un des premiers éléments utilisés pour aller détruire l’artillerie adverse, dont le nucléaire. Ils parlent de "frappes de troupes": les spetsnaz sont envoyés devant pour détruire les lance-roquettes multiples ou les aérodromes, par exemple. »
Les spetsnaz-GRU sont largement utilisés en Afghanistan, dans les années 1980, et dans les différentes guerres de Tchétchénie. Mais plutôt que d’être employés pour faire de l’infiltration et récolter du renseignement, ils font office d’infanterie de choc. En 2008, ils se voient reprocher les échecs de l’armée russe en Géorgie, justement parce qu’ils n’ont pas su aller chercher les informations nécessaires pour que l’état-major puisse adapter sa stratégie. Les autorités décident qu’il faut réformer les forces spéciales et font le tour des capitales occidentales pour s’inspirer des unités les plus respectées en la matière.
Une première unité surnommée Senezh, du nom du lac à proximité duquel est installée cette force, à une soixantaine de kilomètres au nord de Moscou, est créée en 1999. Elle devient le Commandement des opérations spéciales en 2013 et vise à regrouper des hommes aguerris dans plusieurs centres d’entrainement spécialisés, dont un qui va être installé à Sébastopol, en Crimée occupée.
« L’entrainement de ces unités est plus important, explique Tor Bukkvoll, chercheur à l’Établissement de recherche de la défense norvégienne (FFI). Ils sont presque tous officiers, ont de l’expérience et sont dotés des meilleurs équipements. » Les effectifs sont estimés entre 1 000 et 1 500 hommes selon les sources. Contrairement aux spetsnaz de la GRU, tous sont des contractuels : pas de conscrits, uniquement des vétérans.
Plus brutaux que discrets
Les hommes de Senezh sont rapidement utilisés sur les missions les plus sensibles. Ils participent selon une étude de l’Institut international pour les études stratégiques (IISS) à la sécurisation des Jeux olympiques d'hiver de 2014, à Sotchi, et sont en première ligne de l'annexion de la Crimée, la même année. En 2015, ils sont impliqués dans les prises d’Alep et de Palmyre, en Syrie, où ils guident les frappes de l’aviation russe en soutien aux troupes du président Bachar el-Assad.
En Ukraine, les forces spéciales - de Senezh ou de la GRU - ne sont dans un premier temps pas employées pour leurs compétences rares. « Ils étaient utilisés comme de l’infanterie classique, observe Tor Bukkvol. Ils étaient donc tués en grandes quantités, ce qui représente pour la Russie un réel gaspillage de gens compétents. Il semble que, passée la panique des premiers mois, ils ont commencé à les utiliser dans le rôle pour lequel ils sont formés : l’infiltration. »
En 2023, une partie de Senezh est déménagée dans la région russe de Belgorod, pour faire face aux incursions ukrainiennes. Selon l’agence Mostar, qui a eu accès à des sources militaires, les commandos de Senezh ont mené une soixantaine d’opérations de sabotage dans les régions frontalières de Chernihiv, Soumy et Khakhiv. Les Ukrainiens n’ont aucun doute sur le fait qu’ils sont responsables de nombreuses morts civiles, causées lors de ces infiltrations : « Les soldats originaires de l’armée russe n’ont ni les compétences, ni l’équipement, pour franchir la frontière, argumente-t-on chez Molfar. C’est typique de ces unités spéciales : ne pas faire de prisonnier, mais les tuer brutalement. »
« Les services spéciaux ukrainiens ont essayé de chasser les militaires de Senezh depuis plus d’un an, parce que ces forces spéciales sont classées comme top secrètes et hautement dangereuses », explique l’équipe de Molfar, une agence privée d’enquête en sources ouvertes qui collabore avec l’armée, dans une présentation à la presse.
Les Ukrainiens accusent ces commandos de l’ombre de régulièrement assassiner les civils qu’ils croisent. « Senezh a un "rituel sanglant", poursuit l’équipe de Molfar. Après la remise de leur diplôme, une fois intégrés dans les groupes de reconnaissance subversifs, ils sont censés pénétrer le territoire ukrainien et ramener un Ukrainien tué. S’ils ne parviennent pas à ramener un soldat, ils prennent un civil. » Des informations invérifiables, tant cette unité reste mystérieuse, y compris dans son propre pays.
Rêve de forces spéciales à l’occidentale
Comme de nombreux pays, l’Union soviétique commence à développer des unités de forces spéciales à la sortie de la Seconde Guerre mondiale. Ces commandos, les spetsnaz en russe, sont majoritairement affiliés au renseignement militaire, la GRU, mais aussi par la suite au KGB et à la marine. « Le spetsnaz, décrypte Vincent Tourret, spécialiste de la stratégie militaire russe, c’est l’un des premiers éléments utilisés pour aller détruire l’artillerie adverse, dont le nucléaire. Ils parlent de "frappes de troupes": les spetsnaz sont envoyés devant pour détruire les lance-roquettes multiples ou les aérodromes, par exemple. »
Les spetsnaz-GRU sont largement utilisés en Afghanistan, dans les années 1980, et dans les différentes guerres de Tchétchénie. Mais plutôt que d’être employés pour faire de l’infiltration et récolter du renseignement, ils font office d’infanterie de choc. En 2008, ils se voient reprocher les échecs de l’armée russe en Géorgie, justement parce qu’ils n’ont pas su aller chercher les informations nécessaires pour que l’état-major puisse adapter sa stratégie. Les autorités décident qu’il faut réformer les forces spéciales et font le tour des capitales occidentales pour s’inspirer des unités les plus respectées en la matière.
Une première unité surnommée Senezh, du nom du lac à proximité duquel est installée cette force, à une soixantaine de kilomètres au nord de Moscou, est créée en 1999. Elle devient le Commandement des opérations spéciales en 2013 et vise à regrouper des hommes aguerris dans plusieurs centres d’entrainement spécialisés, dont un qui va être installé à Sébastopol, en Crimée occupée.
« L’entrainement de ces unités est plus important, explique Tor Bukkvoll, chercheur à l’Établissement de recherche de la défense norvégienne (FFI). Ils sont presque tous officiers, ont de l’expérience et sont dotés des meilleurs équipements. » Les effectifs sont estimés entre 1 000 et 1 500 hommes selon les sources. Contrairement aux spetsnaz de la GRU, tous sont des contractuels : pas de conscrits, uniquement des vétérans.
Plus brutaux que discrets
Les hommes de Senezh sont rapidement utilisés sur les missions les plus sensibles. Ils participent selon une étude de l’Institut international pour les études stratégiques (IISS) à la sécurisation des Jeux olympiques d'hiver de 2014, à Sotchi, et sont en première ligne de l'annexion de la Crimée, la même année. En 2015, ils sont impliqués dans les prises d’Alep et de Palmyre, en Syrie, où ils guident les frappes de l’aviation russe en soutien aux troupes du président Bachar el-Assad.
En Ukraine, les forces spéciales - de Senezh ou de la GRU - ne sont dans un premier temps pas employées pour leurs compétences rares. « Ils étaient utilisés comme de l’infanterie classique, observe Tor Bukkvol. Ils étaient donc tués en grandes quantités, ce qui représente pour la Russie un réel gaspillage de gens compétents. Il semble que, passée la panique des premiers mois, ils ont commencé à les utiliser dans le rôle pour lequel ils sont formés : l’infiltration. »
En 2023, une partie de Senezh est déménagée dans la région russe de Belgorod, pour faire face aux incursions ukrainiennes. Selon l’agence Mostar, qui a eu accès à des sources militaires, les commandos de Senezh ont mené une soixantaine d’opérations de sabotage dans les régions frontalières de Chernihiv, Soumy et Khakhiv. Les Ukrainiens n’ont aucun doute sur le fait qu’ils sont responsables de nombreuses morts civiles, causées lors de ces infiltrations : « Les soldats originaires de l’armée russe n’ont ni les compétences, ni l’équipement, pour franchir la frontière, argumente-t-on chez Molfar. C’est typique de ces unités spéciales : ne pas faire de prisonnier, mais les tuer brutalement. »