11h45 : Invité ce matin sur l’antenne de RFI, Francis Kpatindé, journaliste et maître de conférences à Sciences-Po Paris, a affirmé qu’il ne croyait « pas du tout » que le lieutenant-colonel Zida soit manipulé à distance par Blaise Compaoré. «Vous avez dû remarquer que le mouvement citoyen, le 'Balai citoyen' et les jeunes ont semblé le soutenir » a expliqué le journaliste. « En face de lui, il y a le général Honoré Traoré, le chef d’état-major, général des Armées qui est plutôt un homme, en dépit de tout, qui est proche de Blaise Compaoré, dont il a été le premier aide de camp après l’assassinat de Thomas Sankara. Maintenir quelque part Traoré au pouvoir aurait été aux yeux de la population, perpétuer le pouvoir de Blaise Compaoré » a repris Francis Kpatindé. Selon lui, « l’heure n’est plus aux militaires, fussent-ils providentiels ; l’heure est à une démocratie beaucoup plus ouverte et le pouvoir militaire doit obéir au civil, et le Burkina Faso ne peut pas échapper à cette règle là ».Retouvez l'intégralité de l'interview en cliquant ici.
11h30 : Le lieutenant-colonel Zida promet une transition « dans un cadre constitutionnel », annonce une dépêche de l’Agence France-Presse.
11h00 : Ce matin, la capitale avait retrouvé le calme et, ce lundi, les habitants ont repris le travail et les écoliers le chemin des classes, les établissements scolaires ayant rouvert leurs portes. Le couvre-feu a par ailleurs été allégé, il est désormais fixé de minuit à 5h00 du matin. Les frontières terrestres aussi ont rouvert et, normalement, le trafic aérien devrait reprendre peu à peu à l’aéroport de « Ouaga ». À signaler, parallèlement, l’inquiétude de l’épouse de l’ancien général Kouamé Lougué qui avait tenté en vain de prendre le pouvoir dimanche lors d’une allocution avortée dans les locaux de la télévision publique RTB. Elle est sans nouvelle de son mari depuis les échauffourées qui ont eu lieu à la RTB suite à son annonce, non diffusée.
10h45 : Le lieutenant-colonel Zida rencontre en ce moment des représentants du corps
diplomatique au ministère des Affaires étrangères, tandis que les chefs de
l'opposition doivent se concerter en milieu de journée au siège du parti de leur chef de file, Zéphirin Diabré.
Le chef du régime de transition s'était déjà entretenu dimanche soir avec les ambassadeurs de France, des Etats-Unis et de l'Union européenne, mais rien n'a filtré sur leurs discussions, les diplomates se refusant à toute déclaration. La communauté internationale avait toutefois vivement réprouvé la prise de pouvoir de facto par les militaires.
Les Etats-Unis, alliés de poids, avaient entre autres condamné « la tentative de l'armée burkinabè d'imposer sa volonté au peuple », appelant « l'armée à transmettre immédiatement le pouvoir aux autorités civiles ». De son côté la médiation internationale tripartite au Burkina, conduite par l'ONU, l'Union africaine (UA) et la Cédéao, la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest, a évoqué la menace de « sanctions » si l'ordre constitutionnel, qui prévoit un intérim du président du Parlement, n'était pas respecté.
Quant à l'Union européenne, elle a demandé à l'armée burkinabè à respecter les droits fondamentaux de la population, y compris celui de manifester pacifiquement,
tandis que le président ghanéen John Dramani Mahama, qui dirige la Cédéao, a
appelé « au dialogue » et à la retenue pour éviter que « la situation déjà précaire » ne dégénère. La France en revanche ne s'est pas encore exprimée sur les derniers événements.
9h30 : On évoque la possibilité de réactiver la Constitution suspendue depuis quelques jours par le chef militaire, ce qui permettrait au Conseil constitutionnel de constater la vacance du pouvoir, y compris au niveau du président de l’Assemblée nationale, puisque celui-ci est en fuite en Côte d’Ivoire. Dès lors le conseil pourrait se tourner vers l’ensemble des forces vives du pays pour qu’elle désigne en consensus un nouveau président de transition qui pourrait être alors un civil. Est-ce que l’armée acceptera cette option ? Est-ce que le profil d’un homme ou d’une femme consensuel existe au Burkina Faso ? On devrait le savoir dans les prochaines heures.
Parmi les personnalités reçues hier, on note qu’il y avait l’ancien président Jean-Baptiste Ouédraogo, au pouvoir entre novembre 1982 et août 1983. Après cette rencontre il avait appelé ses concitoyens au calme et à la reprise du travail. Une autre série de consultation aura lieu dans la journée avec les autorités coutumières et religieuses notamment.
La situation au matin du lundi 3 novembre
8h00 : La contestation d'hier dimanche s'était traduite, par un épisode assez rocambolesque, où l’on a vu une immense foule faire le siège de la RTB, la Radio-Télévision nationale, en scandant le nom de Saran Sérémé, qui est la présidente d’un parti de l’opposition à Blaise Compaoré, le PDC. Cette foule souhaitait la voir prendre la tête du pays, le temps de la transition démocratique, une foule qui voulait absolument qu’elle se rende à la télévision nationale pour faire cette annonce au plus grand nombre.
En fait, selon Saran Sérémé elle-même, qui s’expliquera un plus tard dans la journée, il s’agissait là d’un immense malentendu. Les Burkinabè massés place de la Nation et très impatients de voir un civil organiser la transition, l' a littéralement forcée à se rendre à la télévision, ce qu’elle n’a finalement pas fait. Au contraire d’un général, le général à la retraite Kouamé Lougué, qui lui a pris tout le monde de vitesse, en se déclarant chef de l’Etat au nom du peuple. Une annonce parfaitement vaine car les caméras de la RTB n’étaient même pas branchées au moment de cette annonce !
Il y a pas mal de confusion, pas mal de cafouillage, en ce moment, au Burkina Faso où la société civile et les partis politiques maintiennent toujours la pression sur l’armée, pour qu’elle ne cède pas à un civil pour conduire la transition. A ce titre, en fin de journée, le colonel Auguste Barry, porte-parole du lieutenant-colonel Zida, s’était fendu d’un communiqué. Un communiqué dans lequel il stigmatisait ces initiatives d’auto-proclamation à la télévision publique et dans lequel il rappelait que si les forces armées burkinabè occupaient un leadership dans le pays, c’était à l’appel des forces vives du pays, pour se prémunir contre un chaos, qui aurait pu s’installer après le soulèvement de jeudi dernier.
Parallèlement, une médiation internationale est toujours en cours, pour tenter de trouver une issue à la crise. Une mission conjointe des Nations Unies, de l'Union Africaine et de la Cédéao, la Communauté des États d'Afrique de l'Ouest, qui a rencontré tous les acteurs de la crise. Elle demande le retour à l'ordre constitutionnel, avec à sa tête, un civil.
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