(Exclusivité Vidéo) Marche des populations de Guédiawaye : Une marée humaine assoiffée de révolte

C’est un monde immense qui a pris d’assaut les rues de Guédiawaye (banlieue dakaroise). Toute la population de cette ville est sortie, ce samedi pour dénoncer avec véhémence et des symboles à l’appui leur désarroi face à la cherté de la vie, aux coupures intempestives d’électricité et les factures salées de la Sénélec. La particularité de cette marche de protestation est qu’elle a été initiée par les imams, les pères et mères de famille qui ont occupé les premiers rangs du début à la fin.



Les populations de Guédiawaye sont, véritablement à bout de souffle. Elles ne peuvent plus supporter leurs conditions de vie, la cherté de la vie, les délestages intempestifs et les «surfacturations» de la Sénélec. Ces banlieusards l’ont démontré ce samedi à travers une grande marche qui a réuni les différentes couches de cette ville. Ils n’ont rien laissé au hasard pour crier leur désarroi, leur galère.

C’est vers les coups de 11h 30 que la procession s’est ébranlée à partir du rond point «Mor Fadam» de Guédiawaye. Les Imams et notables des différents quartiers de la dite ville ont pris les devants de la scène. Ils n’ont pas eu besoin de tee-shirts, ni de casquettes encore moins de sommes faramineuses pour mener cette impressionnante foule.

Les banlieusards réclament le départ de Wade

Les Jeunes ainsi que les femmes qui ont constitué le gros du lot n’ont cessé de scander «Gor…gui ! faut pas déconner, sinon on va déconner». Pendant que les plus radicaux n’ont pas eux-aussi arrêté de clamer : «na dem, na dem, nadéma déma dem… ». C'est dans ce tempo que la marche s’est déroulée sans musique ni tam-tams.

Parmi cette foule monstre, il y en a qui ont été plus imaginatifs et qui ont tenu à communiquer leur colère via des symboles. C’est ainsi qu’ils ont brandi des bougies en miettes, des lampes à pétrole pour symboliser les coupures fréquentes de courant. Dans cette marche qui a déferlé dans les rues de ces quartiers populeux et sinueux de la banlieue, des pancartes de fortune ont de manière clairsemée donné encore plus de vie à cette manifestation. Sur ces pancartes, on peut lire : «Non au mode de calcul de la troisième tranche, doyna (ça suffit) les voleurs, nous disons non à la surfacturation de la Sénélec, we are tired, help please, on est fatigué de l’aide». En somme, ils ont cherché à décrier par tous les moyens possibles, toute la misère qu’ils sont en train de vivre sous toutes les formes notamment la cherté de la vie, la «surfacturation des factures» de la Sénélec.


Imams et chefs de quartier en tête de peloton

C’est dans ces conditions que cette marée humaine a sillonné les rues de la ville jusqu’à la préfecture de Guédiawaye où les Imams et les chefs de quartier ont été reçus par les autorités administratives.

Cette marche a été à l’initiative des populations de Gédiawaye. Il n’y a eu aucune autorité politique. Elles l’ont menée d’une main de maître jusqu’à terme. Le président de l’Association des Consommateurs du Sénégal (ASCOSEN), Momar Ndao a été la seule personnalité connue sur la scène à avoir participé à cette procession. «Cette marche est un message d’alerte très fort lancé aux autorités, nous leur demandons de se réveiller. Sinon le réveil des populations peut faire mal et si on voit les Imams s’activer en dehors des sphères de la religion, c’est parce qu’ils veulent se battre pour ne pas mourir de faim», a-t-il commenté.

L’attraction de cette manifestation a été la détermination de l’Association des Imams. Leur présence s’explique, selon eux, par le fait cette marche est exclusivement citoyenne. Le coordonnateur du collectif des chefs de quartier, Youssoupha Sarr de déclarer : «il n’y a pas de coloration de quoique ce soit, ce sont les populations à la base qui ont décidé de prendre leur destin en main».

«Guédiawaye ne paiera plus les factures de courant»

Pour ce qui est des coupures, Youssoupha Sarr a, clairement, indiqué : «nous nous attendons à ce que la Senelec revoie son mode de facturation, qu’elle enlève l’augmentation de 17 % sur la facturation et qu’ils arrêtent les délestages. D’ici-là, nous recommandons aux populations de ne pas payer la facture du mois d’octobre et les prochaines factures».

En revanche, cette marche menée par des Imams très engagés contraste totalement avec la longue file d’Imams qui avait assiégé jeudi matin, les portes du Palais présidentiel pour recevoir des secours, de l’aide financière en perspective de la fête de la Tabaski. Par rapport à cela, le porte parole des Imams, Mouhamadou Lamine Diop, par ailleurs Imam de la mosquée Hamo 4, a tenu à préciser que «ces Imams ne savent pas ce qu’est vraiment leur rôle, les Imams ont pour mission de se mettre devant le peuple et de protéger tout le monde surtout les plus faibles. Leur rôle n’est pas de pratiquer l’usure, ni prendre l’argent du contribuable».

Un plan d’actions qui ira crescendo

Les jeunes et les femmes qui ont participé à cette marche étaient très en verve. Ils ont, également, tenu à montrer leur colère et s’avouent très déçus par le régime libéral. Ils ont même repris une citation du député, Imam Mbaye Niang qui a fait savoir «que les TGP (Très Grands projets) de Wade ne sont que des sigles mais vides dans le fond et ne signifient rien d’autre que Très Grandes Promesses».

Les organisateurs ainsi que bon nombre de participants ont indiqué que «la marche a été un franc succès. Même si la foule a été très difficile à calmer, il n’y a eu aucun incident». Cette manifestation, autorisée par les autorités, s’est déroulée dans le calme et sous l'étroite surveillance de policiers déployés dans toutes les rues et devant la préfecture.

Ainsi les notables ont pu soumettre leurs doléances à l’autorité territoriale et les organisateurs s’en félicitent. Youssoupha Sarr d’avertir, «cette marche n’est qu’un premier jalon d’un plan d’actions très bien ficelé qui ira crescendo et nous souhaitons qu’avant cela nous puissions obtenir gain de cause».

En attendant le dénouement de cette affaire, les populations de Guédiawaye décident de ne plus payer les factures encore moins de faire la queue devant les guichets de la Senelec. Elles ont exigé la révision des 17 % d’augmentation par la commission de régulation et demandent la baisse des denrées alimentaires.

Et à leurs Imams de rappeler à l’Etat que «sa réussite réside dans le fait que les plus faibles soient soutenus et aidés».



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Papa Adama Touré

Samedi 6 Décembre 2008 18:04


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