Sur une scène, deux DJ, un Marocain et un Espagnol, casque vissé sur une oreille, livrent leurs premiers scratchs. Surgit ensuite, sous un flot de fumée blanche, le rappeur sénégalais Xuman. Il est accompagné du Marocain Mastaflow, vêtu d’un tee-shirt frappé du sigle des Wu-Tan Clan, qui veut ainsi revendiquer ouvertement ses sources d’inspiration. Les deux rappeurs entonnent en cœur un refrain sur l’émigration clandestine. "Enfin, je vois les lumières de la ville / J’ai quitté ma famille, pour le chemin de l’exil / C’est le destin qui m’appelle, il m’a promis une existence beaucoup plus belle." Le public s’approprie spontanément le refrain. Le message semble passer. "J’ai apprécié cet appel contre l’émigration clandestine", dit Ibrahima Thiam, assis sur le rebord du mur d’une école pour mieux voir la scène. "Il y a encore beaucoup des jeunes qui tentent de partir en pirogue, c’est dangereux, déplore le jeune de 18 ans. C’est bien de rendre hommage à ceux qui restent".
Projet transmusical
Tranzik sur Facebook
Les artistes présentent ainsi un échantillon du projet "Tranzik", mené entre DJ et rappeurs sénégalais, espagnols et marocains, dont les trois pays sont touchés depuis 2006 par la migration clandestine des jeunes. Résultat de cet échange : une compilation de six à huit titres axée sur les thèmes du désespoir des jeunes, le racisme, la politique des frontières. "C’est un problème qui nous réunit tous, parce qu'à un moment donné, les personnes se demandent ce que le Maroc leur a apporté et se disent : " Ça fait quelques années que je suis là, il n’y a rien", observe Mastaflow. Donc c’est souvent un constat pessimiste." A l’inverse, "à travers ce projet, il s’agit d’encourager les jeunes à aimer leur pays ; pour moi, le Maroc est encore vierge, on peut tout faire !", s’enthousiasme l’artiste marocain, membre du Casa Crew.
Sur la scène du centre culturel Léopold Sédar Senghor de Pikine, entre deux chansons, Xuman interrompt un instant le public du Festa2H, festival créé en 2006 par l’association Africulturban. Face à plusieurs centaines de jeunes, il interroge d’un ton sérieux : "Savez vous qu’en 2012, il y a une élection présidentielle et qu’il faudra voter ? Avez-vous retiré vos cartes d’identité ?, poursuit-il. Il est important que vous vous inscriviez sur les listes électorales pour accomplir votre devoir citoyen". Le public applaudit chaudement. Xuman n’est pas le seul à utiliser son micro pour alerter les consciences, véhiculer des messages forts pour la société.
"Y'en a marre"
Festa 2H sur Facebook
Les après-midis, pendant le festival, le rappeur Fou Malade (Malal Tall, de son vrai nom), Thiat (du groupe Keur Gui), accompagnés d’autres artistes "underground" de la banlieue, comme Rappatack, sillonnent les rues de Dalifort, Yembeul, Pikine ou des Parcelles Assainies… plusieurs quartiers de la banlieue dakaroise où les jeunes n’ont pas toutes les clés du scrutin de 2012 en main. "Nous faisons du porte- à-porte pour mobiliser les citoyens à s’inscrire sur les listes électorales", explique Fou Malade, connu pour son engagement contre les longues détentions préventives en prison. En mars dernier, le leader du studio Youkounkoung, basé à Guediawaye (en banlieue dakaroise, ndlr), a initié le mouvement "Y en a marre". "C’est un mouvement apolitique", souligne le rappeur qui, à moins d’un an des échéances électorales, estime qu’il est urgent d’" éveiller" les consciences. De dénoncer la mal-gouvernance. Et d’appeler les jeunes au vote "pour changer de système", martèle Fou Malade.
Un air de déjà-vu ? En 2000, les rappeurs avaient également joué ce rôle de sentinelle et encouragé une "Alternance démocratique", incarnée par l'actuel président Abdoulaye Wade, après vingt ans de régime socialiste. Aujourd’hui, cet engagement a tout de même changé, relativise Xuman, ancien membre des Pee Frois, pionnier du rap sénégalais dans les années 1990. Ce dernier fustige ces rappeurs "saisonniers", qui adaptent leur discours selon les actualités. Mais, reconnaît l’artiste, "le rappeur n’est que le reflet de ce qui se passe autour de lui (…). en 2007, se souvient-il, les gens n’étaient pas prêts pour qu’il y ait un changement. En 2012, beaucoup de choses se sont détériorées, dans la manière de se comporter des gens, leur niveau de vie, dans la gestion de l’Etat… Avec les tensions sociales, les gens décident tacitement qu’il faut que cela change". Et Xuman de conclure : "Cela va forcément se ressentir dans le texte des rappeurs".
Source: Rfi
Projet transmusical
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Les artistes présentent ainsi un échantillon du projet "Tranzik", mené entre DJ et rappeurs sénégalais, espagnols et marocains, dont les trois pays sont touchés depuis 2006 par la migration clandestine des jeunes. Résultat de cet échange : une compilation de six à huit titres axée sur les thèmes du désespoir des jeunes, le racisme, la politique des frontières. "C’est un problème qui nous réunit tous, parce qu'à un moment donné, les personnes se demandent ce que le Maroc leur a apporté et se disent : " Ça fait quelques années que je suis là, il n’y a rien", observe Mastaflow. Donc c’est souvent un constat pessimiste." A l’inverse, "à travers ce projet, il s’agit d’encourager les jeunes à aimer leur pays ; pour moi, le Maroc est encore vierge, on peut tout faire !", s’enthousiasme l’artiste marocain, membre du Casa Crew.
Sur la scène du centre culturel Léopold Sédar Senghor de Pikine, entre deux chansons, Xuman interrompt un instant le public du Festa2H, festival créé en 2006 par l’association Africulturban. Face à plusieurs centaines de jeunes, il interroge d’un ton sérieux : "Savez vous qu’en 2012, il y a une élection présidentielle et qu’il faudra voter ? Avez-vous retiré vos cartes d’identité ?, poursuit-il. Il est important que vous vous inscriviez sur les listes électorales pour accomplir votre devoir citoyen". Le public applaudit chaudement. Xuman n’est pas le seul à utiliser son micro pour alerter les consciences, véhiculer des messages forts pour la société.
"Y'en a marre"
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Les après-midis, pendant le festival, le rappeur Fou Malade (Malal Tall, de son vrai nom), Thiat (du groupe Keur Gui), accompagnés d’autres artistes "underground" de la banlieue, comme Rappatack, sillonnent les rues de Dalifort, Yembeul, Pikine ou des Parcelles Assainies… plusieurs quartiers de la banlieue dakaroise où les jeunes n’ont pas toutes les clés du scrutin de 2012 en main. "Nous faisons du porte- à-porte pour mobiliser les citoyens à s’inscrire sur les listes électorales", explique Fou Malade, connu pour son engagement contre les longues détentions préventives en prison. En mars dernier, le leader du studio Youkounkoung, basé à Guediawaye (en banlieue dakaroise, ndlr), a initié le mouvement "Y en a marre". "C’est un mouvement apolitique", souligne le rappeur qui, à moins d’un an des échéances électorales, estime qu’il est urgent d’" éveiller" les consciences. De dénoncer la mal-gouvernance. Et d’appeler les jeunes au vote "pour changer de système", martèle Fou Malade.
Un air de déjà-vu ? En 2000, les rappeurs avaient également joué ce rôle de sentinelle et encouragé une "Alternance démocratique", incarnée par l'actuel président Abdoulaye Wade, après vingt ans de régime socialiste. Aujourd’hui, cet engagement a tout de même changé, relativise Xuman, ancien membre des Pee Frois, pionnier du rap sénégalais dans les années 1990. Ce dernier fustige ces rappeurs "saisonniers", qui adaptent leur discours selon les actualités. Mais, reconnaît l’artiste, "le rappeur n’est que le reflet de ce qui se passe autour de lui (…). en 2007, se souvient-il, les gens n’étaient pas prêts pour qu’il y ait un changement. En 2012, beaucoup de choses se sont détériorées, dans la manière de se comporter des gens, leur niveau de vie, dans la gestion de l’Etat… Avec les tensions sociales, les gens décident tacitement qu’il faut que cela change". Et Xuman de conclure : "Cela va forcément se ressentir dans le texte des rappeurs".
Source: Rfi
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