Quand la crise a démarré et que ce qui restait d'Etat à l'intérieur du pays s'est effondré, certains chefs traditionnels ont fait en sorte que leur zone ne sombre pas dans l'anarchie. Comme le sultan de Ndélé, dans le nord-est du pays, Senoussi Ibrahim : « Quand les structures étatiques ont disparu, j’ai assumé les fonctions du préfet, sous-préfet, du juge, tout et tout. Et c’est à travers notre sultanat qu’on a pu ramener la paix et la sécurité dans la zone à Ndélé, et activer même la cohésion sociale. Si je ne [suis] pas là, c’est la pagaille qui va s’installer et on ne va plus respecter personne parce qu’il n’y a pas d’autorité dans la localité. »
Maintenant que le pays essaie de sortir de cette crise, les chefs traditionnels disent qu'ils peuvent accompagner la reconstruction grâce notamment à la justice traditionnelle, une justice qui peut permettre de faire fonctionner des structures d'arbitrage dans le désert judiciaire de l'intérieur du pays. Maxime-Faustin Mbringa Takama est le sultan de Bangassou, dans la préfecture de Mbomou au Sud, sur le fleuve : « L’appareil judiciaire dans le Mbomou existe, mais il est impuissant parce qu’il est limité en termes de ressources. La justice n’est pas proche des populations. Ce sont les populations voyant cette déficience qui m’ont interpelé pour mettre en place au moins un premier palier de justice locale. Et c’est le sultan qui va faire le transfert des dossiers à l’appareil judiciaire officiel. »
Reconstruire la justice
Il faut d'abord reconstruire la justice à la base avant de remonter vers la capitale, estime Maxime-Faustin Mbringa Takama : « Il faut commencer par développer des structures qui vont fonctionner et redonner confiance aux citoyens. »
Le sultan de Birao dans l'extrême nord-est du pays est aussi venu jusqu'à Bangui. La préfecture dans laquelle il exerce son autorité, la Vakaga, est celle d'où est partie la crise. Le point de départ des rebelles de la Seleka, une préfecture qui se sent historiquement marginalisée. Ahmad Moustapha Am-Gabo lance une forme de mise en garde au Forum : « La crise a démarré dans le Vakaga parce que nous sommes abandonnés depuis l’indépendance. Il n’y a pas d’écoles, il n’y a pas de médecins, il n’y a pas de routes. Et du coup, on en a eu assez de parler au gouvernement centrafricain, ils ne veulent pas répondre à nos besoins. C’est pour cela qu’on a repris les armes pour revendiquer notre problème. Nous sommes à 1 200 kilomètres de la capitale et personne ne pense à nous. Qu’est-ce qu’on va faire ? ».
« Nous sommes prêts à rester en Centrafrique, continue-t-il, à condition qu’ils nous donnent tout comme dans les autres préfectures, les routes, des écoles, des hôpitaux ; vraiment on ne peut pas accepter de rester comme ça. Qu’on divise ce pays, qu’on soit libres. S’ils ne veulent pas qu’on divise le pays, qu’ils nous donnent la fédération ».
Un forum qui voit aussi la participation de délégués venus de l'ouest du pays. La Lobaye fait partie de ces préfectures de l'Ouest qui ont connu les pillages et les exactions de la Seleka en 2013, et que les ex-rebelles ont quitté après le départ de Michel Djotodia du pouvoir. La peur pourtant reste dans les cœurs. Suzanne Malonga a été mandatée pour dire que les déplacés n'attendent qu'un signal pour rentrer : l'organisation des élections : « Dans la préfecture de La Lobaye, les Seleka sont venus tuer nos enfants, tuer nos maris, tuer tout le monde. C’est pour cela qu’ils ont fui pour rester en brousse. Ils sont encore en brousse. Ils ont encore peur. Ils disent qu’ils ne veulent pas sortir tant que les élections ne sont pas passées ».
Les problèmes d'accès aux soins
Privat Békonou, lui, représente au Forum une autre préfecture de l'Ouest, la Mambere-Kadeï. Et son message est simple : la population fait face à de gros problèmes d'accès aux soins : « Le principal problème des habitants de Mambere-Kadeï, c’est le problème de santé. Il n’y a pas de grand hôpital là-bas, il y en a un dans une sous-préfecture qui est loin, presque 100 kilomètres, 200 kilomètres. Précisément à Berbérati, il y a un grand hôpital là-bas et il faut faire beaucoup de route parce que chez nous, il n’y a pas d’ambulance. Quand ils sont malades, il faut payer les taxis-motos pour aller jusqu’à Berbérati. Ça coûte presque quelque 50 000 Francs CFA [près de 76 euros] ».
Un troisième délégué intervient. Eloi Yamandji, il représente la Nana-Mambéré. Et pour lui, si on veut sortir de la crise, il faut trouver une activité à la foule des jeunes sans emploi qui erre dans les localités car, dit-il, « s'il n'y a pas d'argent, comment peut-il y avoir la paix ».
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