C’est le principal rendez-vous annuel des musulmans de France. Une « rencontre » de quatre jours, ouverte à tous, croyants ou non, pour débattre de politique et de spiritualité, pour prier ou découvrir l’islam. « Le tout, dans une ambiance fraternelle et de paix », peut-on lire sur la page d’accueil du site officiel de l’Union des organisations islamiques de France (UOIF), sous la plume de son président, Ahmed Jaballah.
L’édition 2012 s’annonce toutefois bien plus tendue que l’auraient imaginé ses organisateurs. « L’affaire Merah » a en effet tout bouleversé. Non pas tant les sept assassinats – trois parachutistes, trois enfants et un enseignant juifs - commis par ce jeune Toulousain, se revendiquant d’un islam radical et combattant qui a été tué le jeudi 22 mars par les policiers du Raid. Mais bien plutôt le retour brutal de « la menace islamiste », comme thème majeur de la campagne pour l’élection présidentielle des 22 avril et 6 mai 2012.
L’UOIF sur la sellette
C’est l’extrême droite qui, sans surprise, a sonné la charge, deux jours seulement après la mort de Mohamed Merah. Le Front national a directement attaqué la Rencontre annuelle des musulmansde France en dénonçant le visa accordé à Youssef Qaradaoui, un théologien qatarien d’origine égyptienne, habitué du rendez-vous du Bourget. Sa candidate, Marine Le Pen est allée jusqu’à demander la dissolution de l’UOIF, que « les responsables de notre pays considèrent (…) comme proche des islamistes, sinon même des terroristes ».
Le message a été en partie reçu par le gouvernement sortant. Dès le lendemain, le cheikh sunnite était interdit d’entrée sur le territoire français en raison du « fort risque de troubles à l’ordre public », un motif qui n’avait jamais été invoqué les années précédentes. Cinq autres invités de l’UOIF se sont vus signifier un refus similaire. Depuis, deux opérations de police, très médiatisées, dans les « milieux islamistes radicaux » ont conduit à l’interpellation de près de trente personnes - dont neuf sont à ce jour écrouées -, tandis que cinq étrangers, dont trois imams, étaient expulsés du pays. Nicolas Sarkozy s’est, quant à lui, fendu d’une lettre ouverte à l’UOIF avertissant qu’il « ne tolèrerai[t] pas que puisse s’exprimer au cours d’une manifestation publique organisée sur le sol français les porteurs de messages d’appels à la violence, à la haine, à l’antisémitisme (…) ».
L’islam français fragilisé
Ce propos signe la rupture du candidat Sarkozy avec la politique du ministre de l’Intérieur Sarkozy, engagée en 2002, pour l’institutionnalisation d’un islam de France. A l’époque, il avait plaidé, avec succès, pour l’adhésion de l’UOIF à la création du Conseil français du culte musulman (le CFCM, établi dès 2003, année lors de laquelle Nicolas Sarkozy prend la parole à la Rencontre annuelle du Bourget), afin de doter la deuxième religion du pays, d’interlocuteurs consensuels. Que l’Union soit présentée par certains comme la « filiale française » du mouvement fondamentaliste égyptien des Frères musulmans ou qu’elle se revendique de « l'école réformiste » dont fait partie notamment l’AKP, au pouvoir en Turquie, ne posait pas problème. Deuxième fédération musulmane de France, elle était incontournable.
La bonne entente « Sarkozy-UOIF » a connu ses premiers accrocs avec la loi sur l’interdiction des signes religieux à l’école publique, en mars 2004. Avant que l’UMP ne prenne ses distances avec l’organisation et, à vrai dire, avec l’islam en France, au fil d’un discours et de décisions associant régulièrement insécurité et immigration. Certains datent ce tournant politique de la certitude de la droite républicaine française et de son leader de ne pas parvenir à emporter le vote des musulmans français. D’autres insistent surtout sur la reconnaissance tardive d’une erreur : avoir cru pouvoir s’appuyer sur l’UOIF, plutôt que sur la Mosquée de Paris – estimée trop chiraquienne – pour encadrer les cinq à six millions de musulmans de l’Hexagone, résidents étrangers ou Français.
De fait, l’UOIF a claqué la porte du CFCM en 2011, le chef de l’Etat s’étant spectaculairement rapproché du recteur de la Mosquée de Paris depuis son élection en 2007. Un jeu de réseaux et d’influences, ici algériennes, là (UOIF) plutôt marocaines et tunisiennes (financées principalement par les Etats du Golfe arabo-persique) dans lequel les grands perdants sont les musulmans français, renvoyés au pays d’origine de leurs parents ou grands-parents. Comme s’ils relevaient d’une citoyenneté douteuse.
RFI
L’édition 2012 s’annonce toutefois bien plus tendue que l’auraient imaginé ses organisateurs. « L’affaire Merah » a en effet tout bouleversé. Non pas tant les sept assassinats – trois parachutistes, trois enfants et un enseignant juifs - commis par ce jeune Toulousain, se revendiquant d’un islam radical et combattant qui a été tué le jeudi 22 mars par les policiers du Raid. Mais bien plutôt le retour brutal de « la menace islamiste », comme thème majeur de la campagne pour l’élection présidentielle des 22 avril et 6 mai 2012.
L’UOIF sur la sellette
C’est l’extrême droite qui, sans surprise, a sonné la charge, deux jours seulement après la mort de Mohamed Merah. Le Front national a directement attaqué la Rencontre annuelle des musulmansde France en dénonçant le visa accordé à Youssef Qaradaoui, un théologien qatarien d’origine égyptienne, habitué du rendez-vous du Bourget. Sa candidate, Marine Le Pen est allée jusqu’à demander la dissolution de l’UOIF, que « les responsables de notre pays considèrent (…) comme proche des islamistes, sinon même des terroristes ».
Le message a été en partie reçu par le gouvernement sortant. Dès le lendemain, le cheikh sunnite était interdit d’entrée sur le territoire français en raison du « fort risque de troubles à l’ordre public », un motif qui n’avait jamais été invoqué les années précédentes. Cinq autres invités de l’UOIF se sont vus signifier un refus similaire. Depuis, deux opérations de police, très médiatisées, dans les « milieux islamistes radicaux » ont conduit à l’interpellation de près de trente personnes - dont neuf sont à ce jour écrouées -, tandis que cinq étrangers, dont trois imams, étaient expulsés du pays. Nicolas Sarkozy s’est, quant à lui, fendu d’une lettre ouverte à l’UOIF avertissant qu’il « ne tolèrerai[t] pas que puisse s’exprimer au cours d’une manifestation publique organisée sur le sol français les porteurs de messages d’appels à la violence, à la haine, à l’antisémitisme (…) ».
L’islam français fragilisé
Ce propos signe la rupture du candidat Sarkozy avec la politique du ministre de l’Intérieur Sarkozy, engagée en 2002, pour l’institutionnalisation d’un islam de France. A l’époque, il avait plaidé, avec succès, pour l’adhésion de l’UOIF à la création du Conseil français du culte musulman (le CFCM, établi dès 2003, année lors de laquelle Nicolas Sarkozy prend la parole à la Rencontre annuelle du Bourget), afin de doter la deuxième religion du pays, d’interlocuteurs consensuels. Que l’Union soit présentée par certains comme la « filiale française » du mouvement fondamentaliste égyptien des Frères musulmans ou qu’elle se revendique de « l'école réformiste » dont fait partie notamment l’AKP, au pouvoir en Turquie, ne posait pas problème. Deuxième fédération musulmane de France, elle était incontournable.
La bonne entente « Sarkozy-UOIF » a connu ses premiers accrocs avec la loi sur l’interdiction des signes religieux à l’école publique, en mars 2004. Avant que l’UMP ne prenne ses distances avec l’organisation et, à vrai dire, avec l’islam en France, au fil d’un discours et de décisions associant régulièrement insécurité et immigration. Certains datent ce tournant politique de la certitude de la droite républicaine française et de son leader de ne pas parvenir à emporter le vote des musulmans français. D’autres insistent surtout sur la reconnaissance tardive d’une erreur : avoir cru pouvoir s’appuyer sur l’UOIF, plutôt que sur la Mosquée de Paris – estimée trop chiraquienne – pour encadrer les cinq à six millions de musulmans de l’Hexagone, résidents étrangers ou Français.
De fait, l’UOIF a claqué la porte du CFCM en 2011, le chef de l’Etat s’étant spectaculairement rapproché du recteur de la Mosquée de Paris depuis son élection en 2007. Un jeu de réseaux et d’influences, ici algériennes, là (UOIF) plutôt marocaines et tunisiennes (financées principalement par les Etats du Golfe arabo-persique) dans lequel les grands perdants sont les musulmans français, renvoyés au pays d’origine de leurs parents ou grands-parents. Comme s’ils relevaient d’une citoyenneté douteuse.
RFI