- Mort du chef Morgan : des blessures qui contredisent la version officielle
En guise d'introduction, les experts onusiens rappellent que lors d'un précédent rapport, il avait été documenté que le chef de guerre Morgan entretenait des relations étroites avec des hauts responsables de la 9e région militaire, celle de la Province orientale. Le chef des Maï-Maï Simba avait choisi de négocier sa reddition avec l'armée congolaise et demandé son intégration dans ses rangs au grade de général. Il avait même écrit une lettre en ce sens au président Joseph Kabila, dont le groupe d'experts a eu copie.
Officiellement, c'est parce qu'il aurait voulu retourner en brousse que le général Fall Sikabwe, le chef des opérations en Ituri, aurait donné l'ordre de lui tirer dans les jambes. Le groupe d'experts note, photos à l'appui, que Morgan avait plus de blessures que celles-là, et notamment une à la hanche qui saignait abondamment. Il remarque également que l'armée congolaise s'est arrêtée pour déposer des blessés en route, mais pas Morgan, que le chef de guerre maï-maï avait été remis quasi-mourant à la Monusco quelque 3h30 après la fusillade. (RE)LIRE : Mort du chef maï-maï Morgan : que s’est-il passé à Molokaï ?
Les experts onusiens estiment donc qu'il y a eu, au minimum, un usage disproportionné de la force et un défaut de soins. Mais surtout que cette situation a déjà eu plusieurs conséquences négatives, en portant notamment un coup d'arrêt au processus de désarmement des Maï-Maï Simba de Morgan et à la libération des femmes et des enfants qui sont sur leur coupe. Elle pourrait également laisser penser à ceux qui voudraient désarmer qu'ils ne peuvent pas faire confiance aux FARDC dans leurs négociations.
- Les FDLR continueraient à recruter
« A l'heure où le présent rapport a été rédigé, note le groupe d'experts, le gouvernement de la RDC n'a pas autorisé d'opération majeure contre les FDLR ». Ce que Kinshasa a toujours démenti. Ce rapport est aussi antérieur à la décision de la réunion des ministres des Grands Lacs et de l'Afrique australe de donner six mois de plus, au maximum, aux FDLR pour désarmer. Ce qu'ils assurent vouloir faire depuis décembre dernier.
Pourtant, d'ex-combattants FDLR et des sources onusiennes ont assuré au groupe d'experts que les FDLR continuaient de recruter et d'entraîner des individus. Les experts soulignent également que deux chefs importants, Ferdinand Nsengiyumwa, qui avait été arrêté par l'armée congolaise et s'était évadé, et Hamada Habimana qui avait déserté, ont à nouveau rejoint la rébellion rwandaise en mars dernier. Hamada Habimana faisait d'ailleurs partie de la délégation qui était à Sant'Egidio.
Le groupe rapporte aussi que le président par intérim des FDLR, email à l'appui, refusait de remettre ses armes à l'ONU, que les FDLR souhaitaient l'implication de la communauté d'Afrique australe, et surtout qu’ils avaient créé des liens politiques avec des partis d'opposition, comme celui de l'ex-Premier ministre Faustin Twagiramungu, pour « mobiliser des soutiens internationaux et forcer le gouvernement rwandais à négocier ».
Le groupe d'experts dit vouloir continuer à enquêter sur les liens entre les FDLR et les FARDC. Des liens locaux que confirment de nouveaux témoignages, notamment sur la vente aux FDLR de matériel militaire par des soldats congolais.
- ADF-Nalu : une chaîne de commandement et de contrôle intacte
Le groupe d'experts a visité à plusieurs reprises les camps des ADF-Nalu repris par l'armée congolaise depuis le début de son offensive en janvier. Il a récolté des centaines de pages de documents et d'enregistrement audio.
Deux conclusions s'imposent : d'abord, contrairement à ce que disaient leurs prédécesseurs, les nouveaux experts onusiens n'ont trouvé aucun lien entre les ADF-Nalu et al-Qaïda ou les shebabs, ni aucune trace de soutien. Ensuite, le groupe croit que malgré les opérations menées par les FARDC, le chaîne de commandement et de contrôle des ADF reste intacte. Celle-ci a le potentiel de se reconstituer comme cela a été le cas après la précédente offensive en 2010.
Et pourtant, selon l'armée congolaise, les combats ont été violents. Entre janvier et mai 2014, 217 militaires auraient été tués et 416 blessés. Côté ADF, sur la même période, 531 auraient été tués. Les experts onusiens n'ont pas réussi à savoir ce que sont devenus les rebelles ougandais blessés qui, estiment-ils, devraient être nombreux. De même, il n'y a que très peu de prisonniers, peu ou pas de libération d'otages que les ADF sont censés avoir kidnappés.
Concernant les engins explosifs artisanaux retrouvés dans les camps des ADF, le groupe note qu'ils sont peu sophistiqués, ce qui ne permet pas justement de confirmer l'existence d'un transfert de compétences ou de savoir-faire à d'autres groupes comme al-Qaïda ou les shebabs.
Source : Rfi.fr
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