Guinée: la filière du poulet local menacée de disparaître

En Guinée, la filière du poulet local est asphyxiée par la concurrence étrangère. Les professionnels du secteur tirent la sonnette d’alarme et demandent aux autorités d’intervenir pour sauver leur industrie comme ce fut le cas, par exemple, au Sénégal ou encore au Cameroun où des mesures protectionnistes ont permis, par le passé, de protéger la production locale. La Guinée a tout intérêt à soutenir la filière, disent ses acteurs, c’est une question de souveraineté alimentaire.



Une visite comme geste de soutien. Ce matin-là, Mamadou Baïlo Baldé s’est déplacé jusqu’à Coyah, ville située à la sortie de Conakry. Le président de l'Association nationale des accouveurs deGuinée (Anag), organisation qui réunit les producteurs de poussins du pays, est venu voir un confrère : « Aujourd’hui, je suis chez lui. Mais j’ai eu la chance de visiter d’autres exploitants aussi. Se retrouver dans cette situation, c’est dommage. »
 
Mamadou arpente les couloirs d’une usine flambant neuve, à l’arrêt depuis quatre mois faute de commande : « Ce que l’on demande aujourd’hui, c’est d'être protégés. Il faut qu'on soit protégés pour pouvoir développer cette filière, on ne demande pas la lune ! On ne pourra pas développer la filière sans interdiction. »
 
Délocaliser ?
Interdiction d’importation des poussins et des poulets. Ce n’est pas une solution pérenne, rétorque-t-on au ministère de l’Agriculture qui affirme accompagner la filière. Il fait notamment de la sensibilisation pour convaincre les aviculteurs guinéens d’aller vers les couvoirs locaux. Ce n’est pas suffisant pour Mamadou qui était pourtant revenu en Guinée plein d’espoir, après avoir travaillé pendant plusieurs années en Belgique. « Nous avons démarré en 2019 et l'année suivante le Covid-19 est arrivé. Le monde entier était fermé. Ce sont ces couvoirs locaux qui ont produit les poussins et qui ont fourni les fermiers guinéens. »
 
Depuis la fin du Covid, le secteur subit de plein fouet la concurrence étrangère. Mamadou Baïlo Baldé se sent abandonné par les autorités. Cette filière locale du poulet qui donnait à la Guinée davantage d’indépendance agricole risque de disparaître. « C'est dommage. Certains envisagent aujourd'hui de délocaliser, de partir ailleurs. Ils peuvent aller installer leurs machines au Mali, en Côte d’Ivoire ou au Sénégal. »
 
Poulets importés… risques sanitaires
Au laboratoire central vétérinaire de Conakry, Agnès Koidjovi prélève des échantillons sur une carcasse. Elle a consacré son mémoire de fin d’études à l’analyse des poulets importés. Ses conclusions sont sans appel : « Les poulets importés qui viennent d’Amérique du sud et d’Europe sont conservés longtemps. » Les produits sont acheminés par bateau. Des manquements sont souvent observés au niveau de la chaîne du froid. « Il faut promouvoir l’élevage guinéen. C'est mieux parce que quand c’est fait sur place, on peut se saisir des problèmes qui touchent la chaîne de production. »
 
Produire localement offre un double avantage : Cela permet de contrôler la qualité des poulets, mais également d’assurer l’approvisionnement du marché guinéen.

RFI

Mardi 26 Septembre 2023 11:17


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