L’austérité et la sobriété selon Macky Quatre, il faudrait les enseigner dans les grandes écoles de diplomatie : vous savez bien, dans ces cercles cossus, les mots n’expriment jamais exactement ce qu’on croit… Premier impair : dès son élection, le tout nouvel élu déserte son domicile et prend ses quartiers au très bling-bling Radisson Blu. Cette petite gâterie ne suffit manifestement à son bonheur. Pour sa prestation de serment, il frappe encore plus fort dans le porte-monnaie du contribuable : c’est le Méridien Président qu’il envahit. Quant à ces pauvres Sénégalais qui le portent au pouvoir en avalant de la poussière dans les bleds les plus reculés, ils peuvent s’estimer heureux de suivre la cérémonie à la télé. Macky Quatre choisit de s’enfermer avec des jet-setteurs venus des quatre coins de la planète pour jurer servir les veuves et orphelins, dont lui-même en premier, à n’en pas douter.
Outre quelques officiels des pays voisins et le regroupement de ses alliés de la dernière ligne droite, ça remarque dans la foule le chanteur Akon, le footeux El Hadj Diouf, les journalistes-vedettes Souleymane Jules Diop, Cheikh Yérim Seck et El Malick Seck, l’épouse de Samuel Eto’o… Les costumes sont neufs, les cravates nouées, les godasses lustrées et les parfums chers. Macky Sall, manifestement, a besoin que ça scintille autour de lui. Compense-t-il quelque complexe d’infériorité que lui collent ses origines modestes ? Il nous annonce d’entrée son goût prononcé pour le luxe clinquant.
Lui, c’est le fils du gardien et de la vendeuse de cacahuètes, on le lui rabâche tout ce temps.
Dans le monde où ça grandit, ce genre d’enfant est à peine toléré… Pour rester exceptionnellement regarder la télé chez les riches le soir, c’est par terre qu’il doit s’accroupir. A l’occasion, on lui distribuera par charité une tranche d’orange, quand les moutards de la maîtresse de maison commencent à en jeter par terre, histoire de leur apprendre jusqu’à quel point ils peuvent remercier le bon Dieu… Lui, doit être reconnaissant au sort quand, parfois, pioché dans un tas de chiffons chez le fripier, ça dégote un tee-shirt passablement élimé qui peut quand même aller à l’école. Les bonnes manières ne sont pas vraiment les priorités à lui inculquer, il n’en aura pas besoin : rien n’indique qu’il aura à s’en servir dans le grand monde. Il devra surtout s’habituer à courber la tête et obéir en silence. Au besoin, des coups de pieds dans l’arrière train le lui rappelleront.
La route doit être bien longue, et l’escalade pénible pour arriver au sommet. Il y est, là. Il se surprend même à marmonner un serment devant la crème du pays, lui et son embonpoint, coincé dans un costume trop étroit. Pour affronter le grand monde, il lui faut se dégrossir, s’ennoblir, fréquenter de la dentelle, histoire d’oublier les angoisses congénitales.
Est-ce donc pour cela qu’il va nous chercher comme Premier ministre Abdoul Mbaye ? Le profil s’y prête : le panache de sa saga, le port altier, le timbre cristallin de la diction impeccable, le trait racé… Un authentique doom’ou madame, fils de famille que la jeunesse dorée dakaroise reconnait de longue date comme un de ses piliers. C'est là le cercle de ces privilégiés que le p’tit Macky Machin observe de loin dans sa rude enfance. De quoi rêve-t-il lorsqu’il croise tous ces enfants gâtés par le sort, qui ont de l’argent de poche à ne savoir qu’en faire, passent leurs vacances à Paris ou Las Palmas, sont fringués chic et cher, roulent à tombeau ouvert en bécane, une midinette enlacée à leur cou ? Abdoul Mbaye, l’aîné des garçons du Père Kéba, est un chef né. Il mène à la baguette ses frères et sœurs chez lui, est sans doute le chef de la bande des copains de leur folle adolescence et, très tôt, devient le boss au boulot. Commander, il ne fait que ça toute sa vie. Raison pour laquelle il rend le tablier d’Attajira Wafa Bank dès qu’on veut le ramener à un rôle de subalterne.
Fallait bien que le code électoral du Père Kéba Mbaye profite un jour aux siens. C’est finalement son fils aîné, l’altier Abdoul Mbaye, qui décroche le jackpot. C’est sur lui que Macky Sall jette son dévolu pour le poste de Premier ministre qui tient en haleine quatorze millions de présidents sénégalais. Personne ne le voit venir et c’est dans le style du bonhomme. Non pas qu’il rase les murs, mais ce n’est pas chez lui qu’il faut se rendre pour découvrir le dernier bolide qui fait rêver dans le gotha mondial. S’il fait la une des journaux de temps à autre, depuis tout le temps qu’il redresse des banques en perdition, c’est bien à son corps défendant. Quelques clients furax le pendraient sans doute haut et court, parce qu’ils n’ont plus que leurs yeux pour pleurer… Tueur sadique ou chirurgien consciencieux ?
Macky Sall, à n’en pas douter, a bien besoin de lui pour se décharger de la pression ambiante ; là, un peu à la manière d’Idrissa Seck qui nous appâte avec Léna Sène, il nous le jette en pâture, histoire de transférer une part des responsabilités manifestement trop angoissantes pour sa p’tite personne. Plus à l’aise pour obéir que commander, Macky Quatre va bientôt se laisser fasciner par la classe et la compétence de son Premier ministre au point de s’en remettre à son avis même pour aller au petit coin…
Et puis viendra le temps des frustrations, lorsque dans l’opinion, les flagorneurs préfèreront faire l’éloge d’Abdoul Mbaye plutôt que de Macky Sall, alors que dans les milieux diplomatiques, le petit monde des snobinards préfèrera dîner en compagnie du Premier ministre qui ne se trompe pas de couverts, se tient droit, cause arts, spiritualités ou finances avec une égale assurance. C'est connu, Bour da fa fiir… Les meilleures choses ont une fin. Macky va commencer par lui rappeler publiquement que c’est lui le Président que les Sénégalais plébiscitent le 25 mars 2012. Ensuite, il remettra en cause une ou deux décisions de ce vaniteux d’Abdoul Mbaye avec tout le manque de délicatesse que l’école du Père Wade enseigne à ses potaches. Et, pour sûr, Abdoul Mbaye lui balancera sa démission sur le pif, non sans panache. C’est de famille…
Avant que l’on en arrive là, faudra sans doute saluer l’arrivée dans l’exécutif d’Aly Haïdar. Ça fait cinquante deux ans que nous attendons l’entrée au gouvernement d’un Sénégalais d’ethnie …libanaise. Je le prends comme une victoire personnelle, parce que dans une autre vie, la question de l’intégration des Libanais, pardon, des Sénégalais d’origine libanaise, m’a valu quelque tollé dans l’opinion…
Ceci dit, l’autre trophée bling-bling de ce premier gouvernement de Macky Quatre, à n’en pas douter, est la nomination de Youssou Ndour à la Culture et au Tourisme. Sa frénésie à faire réélire Macky au deuxième tour récompensée ? Alors que Macky Sall commence sa ronde des alliés au lendemain du premier tour de la présidentielle, Youssou Ndour préfère se déplacer pour lui apporter son soutien zélé. «Weur ndombo» et «war-mbiidj» ne seront pas de trop pour faire plébisciter ce bon monsieur Macky Quatre. Et puis une fois que c’est fait, il offre un concert à ses électeurs. Résultat des courses : sa nomination a quelque chose de l’éjaculation précoce. On est toujours un peu déçu et penaud après….
Ibou FALL (Sud quotidien)
Outre quelques officiels des pays voisins et le regroupement de ses alliés de la dernière ligne droite, ça remarque dans la foule le chanteur Akon, le footeux El Hadj Diouf, les journalistes-vedettes Souleymane Jules Diop, Cheikh Yérim Seck et El Malick Seck, l’épouse de Samuel Eto’o… Les costumes sont neufs, les cravates nouées, les godasses lustrées et les parfums chers. Macky Sall, manifestement, a besoin que ça scintille autour de lui. Compense-t-il quelque complexe d’infériorité que lui collent ses origines modestes ? Il nous annonce d’entrée son goût prononcé pour le luxe clinquant.
Lui, c’est le fils du gardien et de la vendeuse de cacahuètes, on le lui rabâche tout ce temps.
Dans le monde où ça grandit, ce genre d’enfant est à peine toléré… Pour rester exceptionnellement regarder la télé chez les riches le soir, c’est par terre qu’il doit s’accroupir. A l’occasion, on lui distribuera par charité une tranche d’orange, quand les moutards de la maîtresse de maison commencent à en jeter par terre, histoire de leur apprendre jusqu’à quel point ils peuvent remercier le bon Dieu… Lui, doit être reconnaissant au sort quand, parfois, pioché dans un tas de chiffons chez le fripier, ça dégote un tee-shirt passablement élimé qui peut quand même aller à l’école. Les bonnes manières ne sont pas vraiment les priorités à lui inculquer, il n’en aura pas besoin : rien n’indique qu’il aura à s’en servir dans le grand monde. Il devra surtout s’habituer à courber la tête et obéir en silence. Au besoin, des coups de pieds dans l’arrière train le lui rappelleront.
La route doit être bien longue, et l’escalade pénible pour arriver au sommet. Il y est, là. Il se surprend même à marmonner un serment devant la crème du pays, lui et son embonpoint, coincé dans un costume trop étroit. Pour affronter le grand monde, il lui faut se dégrossir, s’ennoblir, fréquenter de la dentelle, histoire d’oublier les angoisses congénitales.
Est-ce donc pour cela qu’il va nous chercher comme Premier ministre Abdoul Mbaye ? Le profil s’y prête : le panache de sa saga, le port altier, le timbre cristallin de la diction impeccable, le trait racé… Un authentique doom’ou madame, fils de famille que la jeunesse dorée dakaroise reconnait de longue date comme un de ses piliers. C'est là le cercle de ces privilégiés que le p’tit Macky Machin observe de loin dans sa rude enfance. De quoi rêve-t-il lorsqu’il croise tous ces enfants gâtés par le sort, qui ont de l’argent de poche à ne savoir qu’en faire, passent leurs vacances à Paris ou Las Palmas, sont fringués chic et cher, roulent à tombeau ouvert en bécane, une midinette enlacée à leur cou ? Abdoul Mbaye, l’aîné des garçons du Père Kéba, est un chef né. Il mène à la baguette ses frères et sœurs chez lui, est sans doute le chef de la bande des copains de leur folle adolescence et, très tôt, devient le boss au boulot. Commander, il ne fait que ça toute sa vie. Raison pour laquelle il rend le tablier d’Attajira Wafa Bank dès qu’on veut le ramener à un rôle de subalterne.
Fallait bien que le code électoral du Père Kéba Mbaye profite un jour aux siens. C’est finalement son fils aîné, l’altier Abdoul Mbaye, qui décroche le jackpot. C’est sur lui que Macky Sall jette son dévolu pour le poste de Premier ministre qui tient en haleine quatorze millions de présidents sénégalais. Personne ne le voit venir et c’est dans le style du bonhomme. Non pas qu’il rase les murs, mais ce n’est pas chez lui qu’il faut se rendre pour découvrir le dernier bolide qui fait rêver dans le gotha mondial. S’il fait la une des journaux de temps à autre, depuis tout le temps qu’il redresse des banques en perdition, c’est bien à son corps défendant. Quelques clients furax le pendraient sans doute haut et court, parce qu’ils n’ont plus que leurs yeux pour pleurer… Tueur sadique ou chirurgien consciencieux ?
Macky Sall, à n’en pas douter, a bien besoin de lui pour se décharger de la pression ambiante ; là, un peu à la manière d’Idrissa Seck qui nous appâte avec Léna Sène, il nous le jette en pâture, histoire de transférer une part des responsabilités manifestement trop angoissantes pour sa p’tite personne. Plus à l’aise pour obéir que commander, Macky Quatre va bientôt se laisser fasciner par la classe et la compétence de son Premier ministre au point de s’en remettre à son avis même pour aller au petit coin…
Et puis viendra le temps des frustrations, lorsque dans l’opinion, les flagorneurs préfèreront faire l’éloge d’Abdoul Mbaye plutôt que de Macky Sall, alors que dans les milieux diplomatiques, le petit monde des snobinards préfèrera dîner en compagnie du Premier ministre qui ne se trompe pas de couverts, se tient droit, cause arts, spiritualités ou finances avec une égale assurance. C'est connu, Bour da fa fiir… Les meilleures choses ont une fin. Macky va commencer par lui rappeler publiquement que c’est lui le Président que les Sénégalais plébiscitent le 25 mars 2012. Ensuite, il remettra en cause une ou deux décisions de ce vaniteux d’Abdoul Mbaye avec tout le manque de délicatesse que l’école du Père Wade enseigne à ses potaches. Et, pour sûr, Abdoul Mbaye lui balancera sa démission sur le pif, non sans panache. C’est de famille…
Avant que l’on en arrive là, faudra sans doute saluer l’arrivée dans l’exécutif d’Aly Haïdar. Ça fait cinquante deux ans que nous attendons l’entrée au gouvernement d’un Sénégalais d’ethnie …libanaise. Je le prends comme une victoire personnelle, parce que dans une autre vie, la question de l’intégration des Libanais, pardon, des Sénégalais d’origine libanaise, m’a valu quelque tollé dans l’opinion…
Ceci dit, l’autre trophée bling-bling de ce premier gouvernement de Macky Quatre, à n’en pas douter, est la nomination de Youssou Ndour à la Culture et au Tourisme. Sa frénésie à faire réélire Macky au deuxième tour récompensée ? Alors que Macky Sall commence sa ronde des alliés au lendemain du premier tour de la présidentielle, Youssou Ndour préfère se déplacer pour lui apporter son soutien zélé. «Weur ndombo» et «war-mbiidj» ne seront pas de trop pour faire plébisciter ce bon monsieur Macky Quatre. Et puis une fois que c’est fait, il offre un concert à ses électeurs. Résultat des courses : sa nomination a quelque chose de l’éjaculation précoce. On est toujours un peu déçu et penaud après….
Ibou FALL (Sud quotidien)