Un groupe de jeune gens est assis devant une boutique de Keur Massar. Aucun d’entre eux ne porte un masque. Habillé d’une short et d’un maillot aux couleurs d’un club de football parisien, la chevelure à la mode «Afro », un des jeunes tire négligemment sur sa cigarette, savourant un instant qui doit être magique. « C’est ma première clope de la journée et ça n’a pas été facile de l’avoir », nous dit-il avec un sourire se voulant charmeur et qui dévoile des dents certainement fâchées avec les dentifrices.
Le port du masque ? La question qui fâche et dérange ! « Baay, Sérigne Fallou mognouy aar. Masque bii day fate » (Père, c’est Serigne Fallou qui nous protège. Le masque nous empêche de respirer », sert comme argument le jeune garçon. Imparable ! Placer un autre mot, c’est s’exposer à un lynchage systématique.
C’est d’ailleurs l’argument qui revient souvent. On renvoie systématiquement l’interlocuteur au Marabout — différent, bien sûr, selon la confrérie — qui serait la parade absolue contre le virus. Tout au long du chemin qui mène vers la gare routière du nouveau département, les couloirs semblent avaler les nombreuses personnes qui empruntent la voie. Tout le monde semble pressé. Les gens se frottent, se bousculent.
Dans cette situation, c’est une gageure que de faire respecter les règles de la distanciation. « C’est impossible. Plutôt confiner la population », répond un des boutiquiers installés sur cette voie passante du nouveau département où la croissance de la population est importante. Rares sont ceux qui portent le masque. Ceux qui en ont, le tiennent à la main au lieu de le porter sur le nez et la bouche. Au bout de la rue, un vendeur s’époumone : « Deux masques à cent francs ! Portez vos masques, le corona virus tue ! ».
Les gens le dépassent sans même ralentir ni prêter attention à ses cris. C’est à croire qu’il était porteur du virus tellement les passants semblaient fuir. Avoir un bus pour gagner le centre-ville de Dakar, voilà tout ce qui les intéressait !
De Keur Massar à Grand Yoff, le règne du « boul faalé »
Il est 11 H 45mn à la gare routière de Keur Massar. La forte canicule et les gaz d’échappement des véhicules font toussoter les moins fragiles. Une demoiselle a le visage trempé de sueur. Ce, malgré son petit ventilo au visage qui brasse l’air. Ses lunettes de soleil lui couvrent une bonne partie du visage. Elle porte aussi un masque. « Cet accessoire m’étouffe. Je ne le porte qu’en pareille situation. A la maison, je ne porte pas le masque. Les autorités ne se rendent pas compte que ça fait deux ans que nous portons le masque. Les gens se sont essoufflés », confie Nathalie Djiba. Et elle n’est pas la seule à trouver des inconvénients au port du masque.
A l’intérieur du bus, qui tarde à démarrer, tout le monde transpire. Une bonne affaire pour un jeune vendeur d’eau. Lui-même ne porte pas de masque, se faufilant à l’intérieur du véhicule pour écouler sa marchandise. A la station Shell de Grand Yoff, l’ambiance est bouillonnante. Un vendeur ambulant de café Touba traine son fourneau chaud au-dessus duquel est posée une cafetière.
Le poids du fourneau dévoile les muscles du vendeur. Sans masque, Modou Diop fait le tour du marché. « Je ne peux pas porter le masque avec la chaleur du fourneau. Sans oublier la forte canicule. Ensuite, mon métier ne me permet pas de rester sur place. « Lépeu dina bakheu barki Serigne bii » dit-il, laissant tout entre les mains de son marabout garant de sa vie sur terre. Interpelé sur le chemin qui mène au rond-point Liberté VI, un vieil homme pense que si l’Etat avait distribué seize millions de masques, on pourrait dire qu’il se préoccupe de la santé publique.
Il s’offusque de l’obligation faite de porter cet accessoire alors que les gens ont des questions de survie au quotidien. On prend un car rapide. Destination Liberté VI. L’apprenti toque fortement la porte, criant à tue-tête : « 6, 6 » pour sa destination. Les usagers sont entassés dans le véhicule. La plupart ne portent pas le masque. Le jeune apprenti encaisse avec désinvolture le prix du transport. A la question pourquoi il ne porte-t-il pas le masque, il répond : « Fall (Ndlr, pour Baye-Fall ) je ne crois pas au virus ! Et puis, nous ne pouvons pas porter tout le temps le masque. Toi, tu as une fois vu quelqu’un malade de Covid ? ». Une manière de mettre fin à la discussion sur un ton ferme.
Au rond-point Liberté VI, les vendeurs ambulants qui occupent les terres-pleins séparant les deux voies menant vers le lieudit Front de terre ne se préoccupent pas le moins du monde du port du masque. « Nous ne pouvons pas porter le masque car nous sommes tout le temps sollicités par les clients. Il n’est pas aisé de porter le masque et discuter avec les clients », se justifie Youba Sambou, vendeur de chaussures debout sur son 1,90m. Et tout le long du chemin qui mène à Liberté VI Extension, tout le monde semble fâché avec le port du masque. Le virus a de beaux jours au Sénégal. Hélas !
Le Témoin
Le port du masque ? La question qui fâche et dérange ! « Baay, Sérigne Fallou mognouy aar. Masque bii day fate » (Père, c’est Serigne Fallou qui nous protège. Le masque nous empêche de respirer », sert comme argument le jeune garçon. Imparable ! Placer un autre mot, c’est s’exposer à un lynchage systématique.
C’est d’ailleurs l’argument qui revient souvent. On renvoie systématiquement l’interlocuteur au Marabout — différent, bien sûr, selon la confrérie — qui serait la parade absolue contre le virus. Tout au long du chemin qui mène vers la gare routière du nouveau département, les couloirs semblent avaler les nombreuses personnes qui empruntent la voie. Tout le monde semble pressé. Les gens se frottent, se bousculent.
Dans cette situation, c’est une gageure que de faire respecter les règles de la distanciation. « C’est impossible. Plutôt confiner la population », répond un des boutiquiers installés sur cette voie passante du nouveau département où la croissance de la population est importante. Rares sont ceux qui portent le masque. Ceux qui en ont, le tiennent à la main au lieu de le porter sur le nez et la bouche. Au bout de la rue, un vendeur s’époumone : « Deux masques à cent francs ! Portez vos masques, le corona virus tue ! ».
Les gens le dépassent sans même ralentir ni prêter attention à ses cris. C’est à croire qu’il était porteur du virus tellement les passants semblaient fuir. Avoir un bus pour gagner le centre-ville de Dakar, voilà tout ce qui les intéressait !
De Keur Massar à Grand Yoff, le règne du « boul faalé »
Il est 11 H 45mn à la gare routière de Keur Massar. La forte canicule et les gaz d’échappement des véhicules font toussoter les moins fragiles. Une demoiselle a le visage trempé de sueur. Ce, malgré son petit ventilo au visage qui brasse l’air. Ses lunettes de soleil lui couvrent une bonne partie du visage. Elle porte aussi un masque. « Cet accessoire m’étouffe. Je ne le porte qu’en pareille situation. A la maison, je ne porte pas le masque. Les autorités ne se rendent pas compte que ça fait deux ans que nous portons le masque. Les gens se sont essoufflés », confie Nathalie Djiba. Et elle n’est pas la seule à trouver des inconvénients au port du masque.
A l’intérieur du bus, qui tarde à démarrer, tout le monde transpire. Une bonne affaire pour un jeune vendeur d’eau. Lui-même ne porte pas de masque, se faufilant à l’intérieur du véhicule pour écouler sa marchandise. A la station Shell de Grand Yoff, l’ambiance est bouillonnante. Un vendeur ambulant de café Touba traine son fourneau chaud au-dessus duquel est posée une cafetière.
Le poids du fourneau dévoile les muscles du vendeur. Sans masque, Modou Diop fait le tour du marché. « Je ne peux pas porter le masque avec la chaleur du fourneau. Sans oublier la forte canicule. Ensuite, mon métier ne me permet pas de rester sur place. « Lépeu dina bakheu barki Serigne bii » dit-il, laissant tout entre les mains de son marabout garant de sa vie sur terre. Interpelé sur le chemin qui mène au rond-point Liberté VI, un vieil homme pense que si l’Etat avait distribué seize millions de masques, on pourrait dire qu’il se préoccupe de la santé publique.
Il s’offusque de l’obligation faite de porter cet accessoire alors que les gens ont des questions de survie au quotidien. On prend un car rapide. Destination Liberté VI. L’apprenti toque fortement la porte, criant à tue-tête : « 6, 6 » pour sa destination. Les usagers sont entassés dans le véhicule. La plupart ne portent pas le masque. Le jeune apprenti encaisse avec désinvolture le prix du transport. A la question pourquoi il ne porte-t-il pas le masque, il répond : « Fall (Ndlr, pour Baye-Fall ) je ne crois pas au virus ! Et puis, nous ne pouvons pas porter tout le temps le masque. Toi, tu as une fois vu quelqu’un malade de Covid ? ». Une manière de mettre fin à la discussion sur un ton ferme.
Au rond-point Liberté VI, les vendeurs ambulants qui occupent les terres-pleins séparant les deux voies menant vers le lieudit Front de terre ne se préoccupent pas le moins du monde du port du masque. « Nous ne pouvons pas porter le masque car nous sommes tout le temps sollicités par les clients. Il n’est pas aisé de porter le masque et discuter avec les clients », se justifie Youba Sambou, vendeur de chaussures debout sur son 1,90m. Et tout le long du chemin qui mène à Liberté VI Extension, tout le monde semble fâché avec le port du masque. Le virus a de beaux jours au Sénégal. Hélas !
Le Témoin
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