L’État sénégalais cloué par la téléphonie mobile.



La sur-médiatisation de Karim Meïssa Wade aux relents monarchiques a renseigné sur les velléités réelles du pouvoir au Sénégal. D’où une réaction par une autre campagne dont le pouvoir se passerait bien, englué qu’il est dans les affaires.







A force de vouloir semer à tous vents par une campagne de promotion n’ayant aucune prise sur les populations et faute d’une bonne stratégie de communication, Karim Meïssa Wade et ses soutiens intérieurs et extérieurs ont fini de produire un phénomène de rejet inverse au but recherché.
Une mauvaise appréciation des causes profondes des résultats des élections locales du 22 mars a entraîné une publicité gratuite, au fond, enregistrée depuis lors avec les affaires remises à l’honneur (Millicom-Sentel, dans la délivrance de la 2ème licence de téléphonie mobile en 1998, licences de pêche dans le cadre de l’organisation de la Coupe d’Afrique des nations Sénégal-1992, grands travaux de la première version de l’Organisation de la Conférence islamique dont les restes ont été d’un secours certain à…Karim en 2008, Sudatel, du nom de la 3ème compagnie de téléphonie mobile notamment). Si, en plus, des histoires à dormir debout révèlent des embrouilles, arnaques au sommet de l’État et autres cupidités (1), bonjour les dégâts moraux !
Voulant procéder par ordre et méthode, un premier tri a été opéré qui a porté uniquement sur la téléphonie mobile…qu’on aurait voulu circonscrire à « Sentel » mais qui a débordé, avec des objectifs plus ou moins avoués de gêner le président Wade et son clan dans leurs visées monarchiques de dévolution du pouvoir, qui a débordé devant des pratiques mafieuses en cours dans le monde des affaires, sauf si des laissés pour compte crient leur dépit après le partage de commissions qui se vérifie en France avec l’histoire des frégates de Taiwan et au Sénégal avec les 7 milliards de Taiwan et les 20 de Sudatel (2).
Pourtant, à la suite de la bérézina du 22 mars 2009, le chef de l’État aurait laissé tomber la piste Karim Wade jugée peu crédible dans les faits. Sans succès apparemment. Alors la communauté internationale a sorti les grands moyens. Ce sont d’abord les Américains (bussinessinsider et le Sénat, via le Millenium Challenge), puis l’Élysée, en France, où les soutiens supposés de Karim Wade ont été voués aux gémonies à la suite des dernières élections régionales des 14 et 21 mars 2010,…avant qu’un ami du Sénégal mais pas Parant du tout mette les pieds dans le plat avec une déclaration qu’on lui a prêtée et que l’intéressé lui-même tarde à démentir selon laquelle Wade tient à son projet de dévolution monarchique du pouvoir à son fils.
Le démenti officiel de Wade lui-même n’a pas pu convaincre avec une stratégie d’assaut social entamée sur les cendres de la campagne électorale avec le plongeon légendaire du fils un vendredi 13 mars. Ainsi, l’intéressé lui-même et ses affidés ont élaboré dès juillet 2009 ce qui leur paraissait être la bonne démarche enclenchée avec le cirque gratuit de Walf des 18 et 19 juillet 2009 d’une extrême pauvreté propédeutique et heuristique : Karim Meïssa Wade maîtrise mal la réalité sociologique sénégalaise avec des parents qui lui ont rendu un mauvais service en n’en faisant pas un Sénégalais de souche.
L’échec de la communication directe, on a cherché à le compenser par une surmédiatisation de l’homme présenté comme le seul et unique fils, au demeurant le meilleur sur tous les plans, même si une certaine pratique jure avec la doxa républicaine. Ainsi, sur le plan de téléphonie mobile, l’État s’embrouille dans le dossier Sentel à force de chercher la paille dans l’œil de son vis-à-vis, alors qu’une poutre lui barre la vue avec les commissions de Sudatel ; il se retrouvera donc pris dans la nasse avec un effet boomerang sur une troisième licence dont les conditions de vente et d’encaissement de l’argent sont aussi scabreuses que le dossier « Millicom » contre lequel, au nom d’une défense des intérêts supérieurs de la nation, le fils du président a voulu se transformer en Don Quichotte des temps modernes…ou en guignol à la…com. Face à un État souverain qui a voulu diversifier ses sources afin de se passer de l’aide, les Américains ont violemment réagi avec l’affaire du Monument de la Renaissance africaine et celle de la compagnie de téléphonie mobile Sentel. Et quand le pouvoir s’englue de lui-même dans les affaires, comme avec cette sombre affaire de 20 milliards de pots de vin dans la vente de la troisième licence, le mobile scotche un pouvoir et son chef sensibles aux critiques.
Ainsi, l’administration Obama et le Sénat américain ont voulu jour avec la dignité d’un peuple souverain en le faisant chanter autour du Millénium Challenge Corporation (MCC), un programme d’aide de 540 millions de dollars, en invoquant certains critères comme la bonne gouvernance, la lutte contre la corruption, le respect des droits de l’homme, etc., pour un pouvoir devenu dangereux pour lui-même parce que affaibli par les scandales financiers. Arlen Specter et Ed Royce, le représentant républicain auprès de la secrétaire d’État Hillary Clinton, serviront de bras armé, des dehors d’agitateurs professionnels, au bon sens du terme. Et le site « interro_liens_callback” de publier un article intitulé « The joy of doing business in Africa : how corrupt Senegalese politicians tried to shake down Millicom for $ 200 millions ». En France, en dehors de Claude Guéant malmené, c’est Parant qui monte au créneau, etc…
En face, la stratégie pour un appel d’air n’est pas des plus heureuses lorsqu’on met à contribution l’hebdomadaire « Jeune Afrique » pour valoriser un témoignage sans valeur morale de la part de celui qui reçoit ses subsides de l’État : les réponses du 19 avril 2010 de Pape Abdoul Ba, président du conseil d’administration de Sentel, la filiale sénégalaise de… Millicom ne méritent pas une colonne du traditionnel hebdomadaire français, encore moins les éléments de preuve transmis, ce qui pourrait s’assimiler à un recel de documents administratifs ; au surplus, pour prospérer en Cour, le vrai doit être vraisemblable et les réponses complaisamment transmises à « Ja » qui s’empresse d’en publier des fac-similés ne remportent pas l’intime conviction du peuple sénégalais, bien au contraire. Surtout que la commission sénatoriale ad-hoc d’information sur les conditions d’octroi de la licence Sentel est un véritable vaudeville, lorsque, pressé par le temps, le pouvoir ne peut pas attendre la décision du Centre international de règlement des différends liés à l’investissement (Cirdi), qui ne devrait pas rendre de décision avant mi-2011…veille d’enjeux électoraux cruciaux.


Pathé MBODJ, Journaliste-Sociologue.

Dimanche 9 Mai 2010 13:47


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