La lutte contre le paludisme progresse en Afrique

Les bonnes nouvelles sont rares en matière de maladies parasitaires. Il faut donc savourer celle que nous ont apportée, lundi 19 avril, le Fonds des Nations unies pour l'enfance (Unicef) et le Partenariat RBM (Rock Back Malaria : Faire reculer le paludisme ).



Leur rapport, publié en amont de la Journée mondiale contre le paludisme, dimanche 25 avril, confirme que cette maladie transmise par les moustiques fait nettement moins de ravages qu'auparavant en Afrique. Même si l'Organisation mondiale de la santé (OMS) continue de déplorer chaque année 250 millions de cas de paludisme et 850 000 décès (chiffres 2008), dont près de 90 % sur ce seul continent.

"Ces dernières années, le financement mondial de la lutte contre le paludisme a considérablement augmenté", passant d'environ 220 millions d'euros en 2003 à 1,25 milliard en 2009, rappellent en préambule les auteurs de ce rapport. Un budget qui a permis de soutenir la production, l'achat et la distribution des principaux produits antipaludiques, et d'enregistrer ainsi des progrès notables dans plusieurs pays d'Afrique.
La production mondiale des moustiquaires imprégnées d'insecticide (MII) a été multipliée par cinq, passant de 30 millions en 2004 à 150 millions en 2009. Dans les vingt-six pays d'Afrique disposant à ce jour de données conjoncturelles, qui réunissent 71 % de la population africaine des moins de 5 ans, l'utilisation moyenne des MII chez les enfants est passée de 2 % en 2000 à 22 % en 2008.

La situation évoluant très vite, le rapport précise que, fin 2009, "de nombreux pays d'Afrique avaient reçu suffisamment de moustiquaires pour protéger plus de la moitiéde la population à risque", et que sept pays (Burundi, Liberia, Madagascar, Namibie, République centrafricaine, Sénégal et Soudan) en avaient reçu assez "pour protéger 80 % des ménages".

Même constat en ce qui concerne la pulvérisation sur les murs intérieurs des habitations d'insecticides à effet rémanent. Dans les zones où cette méthode préventive est appropriée, les efforts menés ont abouti en 2008 à la protection de près de 25 millions de personnes dans quatorze pays, contre 2,1 millions de personnes dans trois pays en 2006.

BEAUCOUP DE CHEMIN À PARCOURIR


Les progrès sont moins évidents en ce qui concerne la mise en oeuvre rapide, en cas d'infection, du traitement antipaludique le plus efficace : une combinaison thérapeutique dite ACT, à base d'artémisinine. D'abord, parce que bon nombre d'établissements de soins ne disposent pas encore de l'équipement et de l'expertise nécessaires pour pratiquer un examen de frottis sanguins en laboratoire, méthode considérée comme la plus efficace pour dépister le paludisme. Ensuite, parce que le traitement par les ACT est coûteux.

Si l'on observe depuis 2004 une augmentation rapide des achats d'ACT dans le monde (160 millions de doses en 2009, contre 5 millions en 2004), les enquêtes menées depuis 2007 montrent que seul un faible pourcentage d'enfants africains bénéficie de ce traitement, la grande majorité continuant de recevoir des médicaments moins adaptés (chloroquine sulfadoxine-pyriméthamine).

En termes de santé publique, les résultats de cette politique volontariste n'en sont pas moins déjà perceptibles. Se basant sur les estimations des moustiquaires MII disponibles dans trente-cinq pays africains (qui, à eux seuls, représentent plus de 95 % de la mortalité infantile due au paludisme), les auteurs de ce rapport estiment que, sans MII, le nombre de décès dus au paludisme entre 2000 et 2010 "se serait élevé à plus de 10 millions chez les moins de 5 ans".

Durant cette même période, la couverture en MII "a permis de sauver 908 000 vies dans ces pays, et donc d'éviter 8,8 % de décès dus au paludisme", détaillent-ils, en précisant que ce pourcentage devrait monter à 20 % pour la seule année 2010.

Des estimations que viennent étayer les données fournies début 2010 par neuf pays d'Afrique, qui ont enregistré au cours des dernières années une diminution significative (30 à 95 %) des indicateurs de morbidité et de mortalité dus à l'infection parasitaire.

Ces avancées ne doivent pas le cacher : il reste beaucoup de chemin à parcourir avant que le paludisme soit totalement vaincu en Afrique. Avant, notamment, que l'on dispose d'un vaccin accessible et réellement efficace - même si une première version est espérée dans les cinq ans à venir. Mais le mouvement est bel et bien enclenché. Y compris dans des pays où rien n'était acquis il y a seulement quelques années, comme le Nigeria, qui prévoit de distribuer environ 60 millions de moustiquaires d'ici à la fin 2010.

Dernière bonne nouvelle : les chefs d'Etat africains, affirment les rapporteurs, "s'engagent de plus en plus pour contribuer à la réalisation des objectifs préalablement définis" en matière de lutte contre le paludisme. Une course contre la montre qui permettra peut-être que soit atteint l'un des huit Objectifs du millénaire pour le développement (OMD), qui prévoit d'avoir maîtrisé le paludisme - parmi d'autres maladies graves - d'ici à 2015.

Lemonde.fr

Dimanche 25 Avril 2010 18:45


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