14 août 2013, 6h30 du matin, place Rabaa Al-Adhawiya au Caire. Les premiers véhicules blindés de la police égyptienne s’approchent des barricades dressées par les partisans de Mohamed Morsi, le président destitué par l’armée quelques semaines auparavant. Durant plus de douze heures, l’évacuation du sit-in va donner lieu à des scènes d’une violence sans précédent depuis la chute de Hosni Moubarak en février 2011. « Il y avait des hélicoptères qui tiraient sur la foule avec des balles de 14 centimètres », se souvient Mohammad, un jeune manifestant qui se trouvait sur les lieux. « Il y avait des blindés qui étaient là pour nous attaquer et des tireurs embusqués sur tous les immeubles. Tous ceux qui passaient par là se faisaient tuer, même s’ils étaient désarmés, où s’ils essayaient de venir en aide à un blessé. Il suffisait de passer par là pour se faire tirer dessus. » Au moment où l’opération débute, Mohammad se trouve au milieu de la place, devant l’estrade où s’exprimaient les dirigeants de la confrérie. « J’essayais d’évacuer les blessés vers l’hôpital de campagne. Mais très vite, l’hôpital a été complètement saturé. On ne pouvait plus y amener qui que ce soit. Autour de moi, j’ai vu des dizaines de personnes se faire tuer. »
« Une tuerie planifiée »
Ce témoignage, recueilli quelques semaines après les évènements, va dans le sens de ceux rassemblés depuis un an par l’ONG Human Rigths Watch. Dans un rapport accablant rendu public cette semaine, l’ONG affirme que l’évacuation de la place Rabaa a donné lieu à une « tuerie de masse » qui s’apparente à un crime contre l’humanité.
De leur côté les autorités égyptiennes affirment que les premiers coups de feu ont été tirés par les manifestants et elles rappellent que huit policiers ont perdu la vie au cours des évènements. A leurs yeux, l’usage de la force était donc nécessaire face à la menace qu’auraient fait peser les partisans de Mohamed Morsi. « Selon les déclarations du ministère égyptien de l’Intérieur, quinze armes ont été retrouvées en tout et pour tout sur le sit-in, ce qui montre qu’un faible nombre de manifestants étaient armés », objecte Nadim Houri, directeur adjoint de la section Moyen-Orient de Human Rights Watch. « Quinze armes, est-ce que cela peut justifier la mort de plus de 700 personnes ? »
L’ONG en est convaincue : la tuerie de Rabaa a été planifiée et voulue par les autorités de l’époque - Human Rights Watch dénonce le rôle joué notamment par Mohamed Ibrahim, le ministre de l’Intérieur, toujours en poste aujourd’hui -, et par celui qui était alors ministre de la Défense : l’actuel président Abdel Fattah al-Sissi. Elle demande aux Nations unies l’ouverture d’une enquête internationale pour faire toute la lumière sur ces évènements.
Source : Rfi.fr
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