Terminés les coups de fils, le stress et les conciliabules, écrit notre journaliste Anissa El Jabri. Après l’élection à la présidence de la Commission sur le fil (par neuf voix d’avance, la majorité la plus étroite de l’histoire pour Ursula von der Leyen), après le rejet de trois commissaires, un record, et la colère du président français pour la claque Sylvie Goulard… L’heure est à l’apaisement. L’eurodéputé CDU Andreas Schwab souligne ainsi que le portefeuille du français Thierry Breton sera très large et qu'« au niveau européen les Français et les Allemands vont continuer à travailler fortement ensemble, car l’axe franco- allemand est quand même à la base de beaucoup de choses en europe ». Des mots d’apaisement dans une période de tension entre Paris et Berlin.
Sérénité
Andreas Schwab, comme la Commission, est serein, parce que, contrairement à l’élection d’Ursula von der Leyen en juillet dernier, le vote n’est pas à bulletin secret, mais nominatif : les surprises sont donc peu probables. Les votes contre sont déjà connus : l’extrême droite et la gauche radicale pour l’essentiel. « Ni carton rouge ni chèque en blanc » disent-ils ; les écologistes, eux, prévoient de s’abstenir. Ursula von der Leyen s’est fortement engagée pour « un green deal », mais c’est insuffisant.
« On ne peut pas affirmer la volonté d’une transition écologique et en même temps considérer que la politique agricole commune (PAC) et la politique commerciale de l’Union européenne doivent rester inchangées, estime l’eurodéputé écologiste belge Philippe Lamberts. L’une comme l’autre sont toxiques pour le climat et l’environnement, et dire qu’on veut faire la transition en gardant le cap de ces politiques, c’est un contre-sens total. C’est là qu’on va mesurer la sincérité de la majorité et d’Ursula von der Leyen : veulent-ils simplement verdir le système en apparence ou au contraire réorienter notre système économique ? Et là, mon petit doigt me dit que beaucoup de conservateurs, qu’ils soient de droite, du centre, ou de la gauche refuseront de soutenir réellement la transformation et qu’à ce moment-là, les voix des Verts seront indispensables. » Un soutien qui va coûter cher à la présidente de la Commission : « Nous serons extrêmement exigeants sur la biodiversité et la politique commerciale. »
Une Commission « géopolitique »
Autre ambition compliquée pour Ursula von der Leyen : elle veut une commission « géopolitique ». Pour Sébastien Maillard, directeur de l’institut Jacques-Delors, « c’est un changement d’approche, de ton, et de vocabulaire important. Elle a raison car le monde a changé : aujourd’hui, l’Union européenne doit s’affirmer face au reste du monde, la Chine, les États-Unis, la Russie, la Turquie, des pays qui ne nous veulent pas forcément du bien, qui veulent même plutôt nous diviser, qui cherchent à nous désunir. Aujourd’hui, lorsqu’on parle de marché intérieur, de politique de concurrence, ce ne sont pas que des dossiers internes à l’Europe : ils ont vraiment une dimension externe, géopolitique. Sur le marché du numérique par exemple, il y a des menaces ; je pense à la cybersécurité. Tout ça demande une vraie lecture géopolitique et pas uniquement juridique des dossiers. »
Une ambition qui va se heurter aux intérêts nationaux des États, ça c’est un classique, mais aussi aux difficultés face à un Parlement européen fragmenté, sans accord de législature. Ursula von der Leyen va devoir passer du temps à arracher une majorité texte par texte. La présidente de la Commission a donc bien besoin d’un vote large aujourd’hui, de soutien et de légitimité.
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