La première réunion du Conseil Supérieur de la Magistrature (CSM) du 9 août dernier, présidée par Bassirou Diomaye Faye, s'apparente à une réforme en profondeur de l'institution judiciaire suite aux conclusions des Assises de la Justice qui ont mis en exergue, avec une clarté indéniable, les nombreuses insuffisances et les défis auxquels notre système judiciaire est confronté. Il était impératif de répondre à ces aspirations de renouveau. En préservant l'esprit des décisions prises lors de cette auguste réunion du CSM, il est possible d'initier une " réforme magistrale " qui s'inscrit dans le cadre d'une refonte globale de l'architecture judiciaire. Une architecture judiciaire solide repose sur l'indépendance des juges ( indépendamment du retrait ou non du Président de la République du CSM), la transparence des procédures et l'accès équitable à la justice pour tous les citoyens. Cette indépendance protège les droits individuels, la stabilité et la confiance dans les institutions publiques.
Au vu des fâcheux incidents qui ont marqué le paysage politique ces dernières années et qui ont fragilisé notre système judiciaire, le remaniement opéré hier au sein des différentes juridictions — notamment les tribunaux de grande instance, les cours d'appel et les parquets généraux — était indispensable. En dépit des critiques déjà émises par certains sceptiques quant à certaines nominations considérées comme des sanctions à l'encontre de magistrats (peu) populaires pour leurs accointances décriées avec l'ancien régime et leurs actions controversées, qui renvoyaient l'image d'un pouvoir judiciaire sous la coupe de l'exécutif, cette nouvelle réorganisation permettra d'insuffler un nouveau dynamisme pour assurer une justice véritablement équitable et performante.
Un aspect crucial de ces décisions qui retient particulièrement mon attention est la réorganisation du Parquet financier, pivot essentiel de la promotion de la transparence et de la lutte contre la délinquance économique et financière, devenue pandémique. L'annulation des nominations effectuées dans les derniers jours du mandat de Macky Sall, perçue comme un premier signal de rupture, et l'introduction de nouvelles affectations stratégiques, témoignent d'un engagement résolu en faveur d'une justice qui renouvelle sa lutte sans merci contre la mal-gouvernance. Logiquement, on peut imaginer que cela se traduira par des convocations, voire des arrestations, à la suite des audits et des rapports des organes de contrôle. La raison en est simple : rendre justice à ceux qui sont devenus intransigeants en matière de responsabilité et rompre avec la jurisprudence taillée sur mesure pour les coupables impunis.
D'aucuns seraient tentés de conclure que toute convocation dans cette atmosphère de bouleversement judiciaire cache une volonté inavouée de solder les comptes avec les dignitaires de l'ancien régime, notamment ceux cités dans les grands scandales financiers. Cette perception, bien que compréhensible, ne doit pas oblitérer l'inévitable nécessité d'un débat sincère (loin des théories du complot permanent) sur le rôle que la justice doit désormais jouer dans l'édification d'une société sénégalaise où la reddition des comptes est une réalité palpable. C'est pourquoi le parquet financier doit envoyer un signal fort en faveur d'une rupture avec le passé. Une politique de tolérance zéro en matière de malversations financières et de corruption est une condition sine qua non.
Évidemment, le défi majeur est de rompre le cycle de la chasse aux sorcières et de rétablir la primauté du droit. Pourquoi ? Parce que lorsque la justice est instrumentalisée à des fins politiques, elle perd son impartialité essentielle et devient un outil de division, sapant la confiance du public et érodant les fondements mêmes de l'État de droit. Il est plus que jamais urgent de restaurer la gloire et la dignité de notre système judiciaire. Le pouvoir judiciaire et les magistrats doivent participer à l'effort collectif pour transformer le scepticisme des citoyens en espoir et en confiance dans l'équité et la justice, piliers de la cohésion sociale et de la stabilité nationale.
Dr Mamadou Bodian
Chercheur à l’Institut fondamental d’Afrique noire (IFAN)
Université Cheikh Anta Diop de Dakar
E-Mail : akilabodian@gmail.com
Au vu des fâcheux incidents qui ont marqué le paysage politique ces dernières années et qui ont fragilisé notre système judiciaire, le remaniement opéré hier au sein des différentes juridictions — notamment les tribunaux de grande instance, les cours d'appel et les parquets généraux — était indispensable. En dépit des critiques déjà émises par certains sceptiques quant à certaines nominations considérées comme des sanctions à l'encontre de magistrats (peu) populaires pour leurs accointances décriées avec l'ancien régime et leurs actions controversées, qui renvoyaient l'image d'un pouvoir judiciaire sous la coupe de l'exécutif, cette nouvelle réorganisation permettra d'insuffler un nouveau dynamisme pour assurer une justice véritablement équitable et performante.
Un aspect crucial de ces décisions qui retient particulièrement mon attention est la réorganisation du Parquet financier, pivot essentiel de la promotion de la transparence et de la lutte contre la délinquance économique et financière, devenue pandémique. L'annulation des nominations effectuées dans les derniers jours du mandat de Macky Sall, perçue comme un premier signal de rupture, et l'introduction de nouvelles affectations stratégiques, témoignent d'un engagement résolu en faveur d'une justice qui renouvelle sa lutte sans merci contre la mal-gouvernance. Logiquement, on peut imaginer que cela se traduira par des convocations, voire des arrestations, à la suite des audits et des rapports des organes de contrôle. La raison en est simple : rendre justice à ceux qui sont devenus intransigeants en matière de responsabilité et rompre avec la jurisprudence taillée sur mesure pour les coupables impunis.
D'aucuns seraient tentés de conclure que toute convocation dans cette atmosphère de bouleversement judiciaire cache une volonté inavouée de solder les comptes avec les dignitaires de l'ancien régime, notamment ceux cités dans les grands scandales financiers. Cette perception, bien que compréhensible, ne doit pas oblitérer l'inévitable nécessité d'un débat sincère (loin des théories du complot permanent) sur le rôle que la justice doit désormais jouer dans l'édification d'une société sénégalaise où la reddition des comptes est une réalité palpable. C'est pourquoi le parquet financier doit envoyer un signal fort en faveur d'une rupture avec le passé. Une politique de tolérance zéro en matière de malversations financières et de corruption est une condition sine qua non.
Évidemment, le défi majeur est de rompre le cycle de la chasse aux sorcières et de rétablir la primauté du droit. Pourquoi ? Parce que lorsque la justice est instrumentalisée à des fins politiques, elle perd son impartialité essentielle et devient un outil de division, sapant la confiance du public et érodant les fondements mêmes de l'État de droit. Il est plus que jamais urgent de restaurer la gloire et la dignité de notre système judiciaire. Le pouvoir judiciaire et les magistrats doivent participer à l'effort collectif pour transformer le scepticisme des citoyens en espoir et en confiance dans l'équité et la justice, piliers de la cohésion sociale et de la stabilité nationale.
Dr Mamadou Bodian
Chercheur à l’Institut fondamental d’Afrique noire (IFAN)
Université Cheikh Anta Diop de Dakar
E-Mail : akilabodian@gmail.com