Le pouvoir politique (capacité à commander et à se faire obéir dans une communauté humaine) est nanti de plusieurs ressorts pours s’exercer. Les institutions politiques, les lois, la violence (Forces de l’ordre, forces armées, prison, etc.) servent à asseoir la prépondérance du pouvoir. Mais quelle que soit sa force, le pouvoir politique, comme la liberté des citoyens, a besoin d’être contrebalancé par la responsabilité. La responsabilité des gouvernants est double : la redevabilité et le rendement. Quand une société donne des moyens à un homme et, de surcroit, l’exonère de certaines obligations, il doit faire preuve d’une éthique de responsabilité. Les citoyens jouissent de la liberté garantie à eux par la loi et les autres institutions, mais en en retour ils doivent faire preuve de responsabilité envers la société. Responsabilité au sens où ils feront un usage sain de leur liberté, c’est-à-dire le souci constant de la rendre compatible avec la liberté collective, avec la vie en communauté. On dit à ce propos que la liberté sans la responsabilité se pervertit en licence. Mais responsabilité également au sens où chaque citoyen jouissant des libertés politiques et économiques doit se sentir co-responsable de l’état de sa société : nous devons contribuer à l’épanouissement de la société tout entière. Dans ce sens précis, la responsabilité est la contrepartie de la liberté. Au de regard de toutes ces considérations, on peut affirmer que la responsabilité seule est le gage d’un exercice vertueux du pouvoir, mais aussi de la liberté.
Un homme qui voudrait jouir de la liberté sans payer la dot de la responsabilité serait un danger pour la société, de même que quiconque veut jouir du pouvoir au lieu d’en être le serviteur (car même si c’est illusoire, il est nécessaire de croire que le pouvoir appartient au peuple) est un traitre à la démocratie et à la nation. Exercer le pouvoir sans responsabilité est un viol de la confiance placée en soi par le peuple : la continence est partout utile, mais surtout en politique. Décider pour des millions d’âme est incompatible avec l’irresponsabilité, le manque de retenue, la permissivité. La question est dès lors quel est le pouvoir de l’irresponsabilité ? Cette question peut s’entendre dans deux sens : d’abord quelle est la capacité de l’irresponsabilité ? et ensuite que peut le pouvoir quand il est entre les mains d’hommes irresponsables ?
Au regard de ce qui a été dit précédemment, exercer un pouvoir politique sans faire preuve de responsabilité peut peu de choses utiles à la communauté, mais beaucoup de choses qui lui sont nuisibles, voire fatales. Même dans la vie courante quand on abuse du langage on nuit à sa famille, à ses amis et bientôt à la communauté tout entière. Savoir parler est le premier palier à gravir pour prétendre gouverner les hommes. Il en faut davantage pour faire un usage raisonnable des autres moyens du pouvoir. Si au prophète (SAWS) il a été prescrit ceci « Par la sagesse et la bonne exhortation appelle (les gens) au sentier de ton Seigneur. Et discute avec eux de la meilleure façon » (Coran 16/125), au nom de quoi un homme politique, simple mortel, devrait-il s’arroger le droit de parler à ses concitoyens dans l’invective et la menace ? Qui est donc son modèle ?
Créer la surenchère haineuse pour espérer en tirer des dividendes politiques est la pire irresponsabilité. Le marché de la haine est juteux, mais très vite il crée une surproduction et donc une faillite, car la haine ne nourrit personne. Un pouvoir responsable n’a pas pour vocation de créer des foyers de tension par une surenchère verbale : même les animaux savent utiliser leur langage de façon menaçante comme nous le prouvent les chiens. L’irresponsabilité détruit toutes les soupapes de protection, elle coupe les diverses ceintures de sécurité que la morale et la convivialité ont créées pour éviter la dislocation de la société. La guerre civile en Côte-d’Ivoire est encore fraiche dans les mémoires. La pire irresponsabilité consiste à s’amuser avec le pouvoir : d’aucuns disent que c’est un attribut divin et c’est pourquoi il rend très souvent fou.
Bricoler des crimes, inventer, comme Heinrich Kramer et Jacques Sprenger, des crimes imaginaires et un code pénal extravagant (Le Marteau des sorcières) taillé sur mesure pour condamner des « condamnés » d’office ne demande aucun talent. Il suffit juste d’être mesquin et perfide pour y arriver. On ne peut pas créer ou réformer des institutions pour assouvir la soif de vengeance d’une engeance sans finesse. La grande irresponsabilité est de chercher si malaisément à responsabiliser l’irresponsabilité pénale d’un citoyen que les lois ont exonéré. C’est de la gesticulation stupide, dégénérée et dépourvue de toute forme de noblesse. Sous ce rapport, le pouvoir de l’irresponsabilité, c’est le charlatanisme, la fanfaronnade.
Ce que la clairvoyance et la compétence ne peuvent pas donner, c’est une illusion que de chercher à le trouver dans des intrigues sectaires pantouflées en institutions. L’irresponsabilité, en tant que façon de gouverner, est capable d’occulter l’impuissance derrière l’inculpation de toute l’humanité. Les autres sont responsables du mal dans le monde : je ne peux rien réussir à cause de leur malfaisance. C’est une disposition mentale qui est paradoxalement le fruit d’une culture chez nous : l’échec dans un concours, dans un mariage, en politique, etc. est imputé aux autres coupables d’avoir jeté un mauvais sort ou un mauvais regard. Dans la famille polygame on se protège contre les intrigues maléfiques des demi-frères et de leur maman ; dans le sport toute défaite est imputée aux xons (pratiques occultes auxquelles recourt pourtant, et paradoxalement, l’accusateur lui-même).
Quand l’irresponsabilité (pas au sens juridique évidemment) devient elle-même le pouvoir, inutile de disserter longuement sur les conséquences qui en découlent : elles sont aussi nécessaires que les lois de la nature. Un homme politique irresponsable travaille pour le diable en prétendant servir le peuple. Sa fixation ou obsession l’amène à constamment chauffer le thermomètre social pour être dans son élément naturel : la tempête. Aussi longtemps qu’on remonte dans l’histoire, les pouvoirs populistes sont irresponsables : ils n’endossent rien, ils diabolisent tout le monde, y compris les saints, ils agissent et parlent sans retenue et, pour cacher leur impotence ontologique, ils subliment la lâcheté et la médiocrité en héroïsme. Un pouvoir irresponsable est comme une pénombre qui prétend éclairer (lëndëm guy diggée léeral). C’est ce qui fait que son cheval de bataille est l’anti-intellectualisme, la mort des élites responsables de la misère qui écrase les pauvres et les ratés qui refusent d’assumer leurs responsabilités dans leur échec. L’irresponsabilité du pouvoir est le serpent qui se mord la queue : il navigue dans un cercle vicieux en y déployant tellement d’efforts qu’il ne se rend pas compte que l’effort devient la fin alors qu’il devrait être un moyen.
Ce que ce parti populiste prépare n’est rien d’autre qu’une mise en veille des libertés politiques. Ils vont créer des institutions à leur image, en modifier et même provoquer des crimes pour se débarrasser de leurs adversaires futurs en créant une justice personnalisée. Ça rappelle l’intrigue du film « Sam le croque-mort ». Sam tenant une entreprise de pompes funèbres a vu son affaire péricliter au point de le réduire presque au chômage. Par un concours de circonstances heureuses, la mort était devenue rare. Mais Sam savait qu’il n’y avait aucune raison de chômer, en tant que croque-mort, si on peut provoquer la mort. Aussi commença-t-il à se déguiser la nuit et à commettre des meurtres sommaires pour faire revivre son entreprise funèbre. Nos populistes n’ont pas le choix, ils vont chaque jour inventer des scandales imaginaires quand les vrais délits seront épuisés. Cette initiative à mettre en accusation le président Macky est juste un délire destiné à occulter leur propre culpabilité. Ils veulent réécrire l’histoire à défaut de la refaire.
On voit donc que cette surenchère législative et procédurière de Pastef n’est rien d’autre qu’une façon de divertir le peuple, de lui donner sa ration hebdomadaire, voire quotidienne de consommation de haine parce qu’on n’a rien, strictement rien à lui proposer. Il est dès lors urgent que les forces vives encore lucides se serrent les coudes et travaillent non à donner à Pastef l’inimitié gratuite qu’il cherche pour ne pas travailler, mais à éclairer davantage la lanterne des Sénégalais embarqués dans ce navire de la haine et du mensonge systématique et quasi systémique. Ce travail ne peut pas être celui des seuls politiques, il doit être abattu de préférence par les vrais patriotes. Quand un PM descend de son piédestal pour rejoindre le jeune Abdou Ngéer sur le terrain de la communication, c’est qu’il y a un malaise.
Alassane KITANE professeur de philosophie à Thiès
Un homme qui voudrait jouir de la liberté sans payer la dot de la responsabilité serait un danger pour la société, de même que quiconque veut jouir du pouvoir au lieu d’en être le serviteur (car même si c’est illusoire, il est nécessaire de croire que le pouvoir appartient au peuple) est un traitre à la démocratie et à la nation. Exercer le pouvoir sans responsabilité est un viol de la confiance placée en soi par le peuple : la continence est partout utile, mais surtout en politique. Décider pour des millions d’âme est incompatible avec l’irresponsabilité, le manque de retenue, la permissivité. La question est dès lors quel est le pouvoir de l’irresponsabilité ? Cette question peut s’entendre dans deux sens : d’abord quelle est la capacité de l’irresponsabilité ? et ensuite que peut le pouvoir quand il est entre les mains d’hommes irresponsables ?
Au regard de ce qui a été dit précédemment, exercer un pouvoir politique sans faire preuve de responsabilité peut peu de choses utiles à la communauté, mais beaucoup de choses qui lui sont nuisibles, voire fatales. Même dans la vie courante quand on abuse du langage on nuit à sa famille, à ses amis et bientôt à la communauté tout entière. Savoir parler est le premier palier à gravir pour prétendre gouverner les hommes. Il en faut davantage pour faire un usage raisonnable des autres moyens du pouvoir. Si au prophète (SAWS) il a été prescrit ceci « Par la sagesse et la bonne exhortation appelle (les gens) au sentier de ton Seigneur. Et discute avec eux de la meilleure façon » (Coran 16/125), au nom de quoi un homme politique, simple mortel, devrait-il s’arroger le droit de parler à ses concitoyens dans l’invective et la menace ? Qui est donc son modèle ?
Créer la surenchère haineuse pour espérer en tirer des dividendes politiques est la pire irresponsabilité. Le marché de la haine est juteux, mais très vite il crée une surproduction et donc une faillite, car la haine ne nourrit personne. Un pouvoir responsable n’a pas pour vocation de créer des foyers de tension par une surenchère verbale : même les animaux savent utiliser leur langage de façon menaçante comme nous le prouvent les chiens. L’irresponsabilité détruit toutes les soupapes de protection, elle coupe les diverses ceintures de sécurité que la morale et la convivialité ont créées pour éviter la dislocation de la société. La guerre civile en Côte-d’Ivoire est encore fraiche dans les mémoires. La pire irresponsabilité consiste à s’amuser avec le pouvoir : d’aucuns disent que c’est un attribut divin et c’est pourquoi il rend très souvent fou.
Bricoler des crimes, inventer, comme Heinrich Kramer et Jacques Sprenger, des crimes imaginaires et un code pénal extravagant (Le Marteau des sorcières) taillé sur mesure pour condamner des « condamnés » d’office ne demande aucun talent. Il suffit juste d’être mesquin et perfide pour y arriver. On ne peut pas créer ou réformer des institutions pour assouvir la soif de vengeance d’une engeance sans finesse. La grande irresponsabilité est de chercher si malaisément à responsabiliser l’irresponsabilité pénale d’un citoyen que les lois ont exonéré. C’est de la gesticulation stupide, dégénérée et dépourvue de toute forme de noblesse. Sous ce rapport, le pouvoir de l’irresponsabilité, c’est le charlatanisme, la fanfaronnade.
Ce que la clairvoyance et la compétence ne peuvent pas donner, c’est une illusion que de chercher à le trouver dans des intrigues sectaires pantouflées en institutions. L’irresponsabilité, en tant que façon de gouverner, est capable d’occulter l’impuissance derrière l’inculpation de toute l’humanité. Les autres sont responsables du mal dans le monde : je ne peux rien réussir à cause de leur malfaisance. C’est une disposition mentale qui est paradoxalement le fruit d’une culture chez nous : l’échec dans un concours, dans un mariage, en politique, etc. est imputé aux autres coupables d’avoir jeté un mauvais sort ou un mauvais regard. Dans la famille polygame on se protège contre les intrigues maléfiques des demi-frères et de leur maman ; dans le sport toute défaite est imputée aux xons (pratiques occultes auxquelles recourt pourtant, et paradoxalement, l’accusateur lui-même).
Quand l’irresponsabilité (pas au sens juridique évidemment) devient elle-même le pouvoir, inutile de disserter longuement sur les conséquences qui en découlent : elles sont aussi nécessaires que les lois de la nature. Un homme politique irresponsable travaille pour le diable en prétendant servir le peuple. Sa fixation ou obsession l’amène à constamment chauffer le thermomètre social pour être dans son élément naturel : la tempête. Aussi longtemps qu’on remonte dans l’histoire, les pouvoirs populistes sont irresponsables : ils n’endossent rien, ils diabolisent tout le monde, y compris les saints, ils agissent et parlent sans retenue et, pour cacher leur impotence ontologique, ils subliment la lâcheté et la médiocrité en héroïsme. Un pouvoir irresponsable est comme une pénombre qui prétend éclairer (lëndëm guy diggée léeral). C’est ce qui fait que son cheval de bataille est l’anti-intellectualisme, la mort des élites responsables de la misère qui écrase les pauvres et les ratés qui refusent d’assumer leurs responsabilités dans leur échec. L’irresponsabilité du pouvoir est le serpent qui se mord la queue : il navigue dans un cercle vicieux en y déployant tellement d’efforts qu’il ne se rend pas compte que l’effort devient la fin alors qu’il devrait être un moyen.
Ce que ce parti populiste prépare n’est rien d’autre qu’une mise en veille des libertés politiques. Ils vont créer des institutions à leur image, en modifier et même provoquer des crimes pour se débarrasser de leurs adversaires futurs en créant une justice personnalisée. Ça rappelle l’intrigue du film « Sam le croque-mort ». Sam tenant une entreprise de pompes funèbres a vu son affaire péricliter au point de le réduire presque au chômage. Par un concours de circonstances heureuses, la mort était devenue rare. Mais Sam savait qu’il n’y avait aucune raison de chômer, en tant que croque-mort, si on peut provoquer la mort. Aussi commença-t-il à se déguiser la nuit et à commettre des meurtres sommaires pour faire revivre son entreprise funèbre. Nos populistes n’ont pas le choix, ils vont chaque jour inventer des scandales imaginaires quand les vrais délits seront épuisés. Cette initiative à mettre en accusation le président Macky est juste un délire destiné à occulter leur propre culpabilité. Ils veulent réécrire l’histoire à défaut de la refaire.
On voit donc que cette surenchère législative et procédurière de Pastef n’est rien d’autre qu’une façon de divertir le peuple, de lui donner sa ration hebdomadaire, voire quotidienne de consommation de haine parce qu’on n’a rien, strictement rien à lui proposer. Il est dès lors urgent que les forces vives encore lucides se serrent les coudes et travaillent non à donner à Pastef l’inimitié gratuite qu’il cherche pour ne pas travailler, mais à éclairer davantage la lanterne des Sénégalais embarqués dans ce navire de la haine et du mensonge systématique et quasi systémique. Ce travail ne peut pas être celui des seuls politiques, il doit être abattu de préférence par les vrais patriotes. Quand un PM descend de son piédestal pour rejoindre le jeune Abdou Ngéer sur le terrain de la communication, c’est qu’il y a un malaise.
Alassane KITANE professeur de philosophie à Thiès
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