Ces spécialistes en économie familiale et sociale, options restauration, coupe-couture, teinture, broderie, dont le nombre n’excède pas 50, forment chaque année, plus de 1000 jeunes filles à travers les 17 centres socioculturels que compte la ville de Dakar. La situation de ces monitrices mérite qu’on s’y attarde. Voilà de braves femmes - certaines totalisent plus de vingt ans de bons et loyaux services - mais dont les salaires varient entre 25 et 40.000 FCFA. Elles ne disposent ni d’un contrat régulier, ni de prise en charge médicale. A ma connaissance, ce sont les seules enseignantes qui ne perçoivent pas de salaire pendant les trois mois de vacances scolaires. A la rentrée des classes, elles n’ont même pas de quoi payer le transport. Imaginez le calvaire qu’elles endurent puisqu’elles ne disposent pas de bulletin de salaire et ne sont pas affiliées à l’Ipres ni à la caisse de sécurité sociale. Elles n’auront même pas la satisfaction de pouvoir jouir d’une retraite décente.
Des promesses jamais tenues
Ces monitrices dépendent de la Ville de Dakar. Mais les autorités municipales, dont le budget est de 39 milliards, regardent faire, insensible à la détresse de ces 50 mères de famille très dignes dans l’épreuve. Elles auraient pu faire du tintamarre dans les radios et télévisions, mener des grèves ou des marches pour se faire entendre et changer leur situation précaire. Mais, en femmes sénégalaises dignes et respectueuses de l’autorité, elles préfèrent user des vertus du dialogue. Depuis des années elles courent derrière leur tutelle, la ville de Dakar pour régulariser leur situation. En vain. Tout ce qui leur est servi c’est : promesse sur promesse. Après avoir usé leurs hauts talons entre les couloirs du building communal et de l’Hôtel de ville, elles ne savent plus à quel saint se vouer. Ayant entamé les démarches avec l’ancien Maire Pape Diop, le dossier était sur le point d’aboutir. A l’avènement de Khalifa Sall, en 2009, elles ont remis cela avec beaucoup d’espoir. Mais aujourd’hui, c’est la désolation qui habite ces braves mères de familles.
L’indifférence des autorités municipales
Et pourtant, le travail qu’elles effectuent a une portée éminemment sociale. Elles encadrent des jeunes filles excluent du système formel d’enseignement, en leur faisant bénéficier d’une formation et d’une qualification professionnelles. Sans l’action de ces monitrices, les jeunes filles issues de familles démunies, n’auraient aucune chance de s’insérer dans la vie active. Cette assertion de Jules PETIT-SENN sied remarquablement à leur situation : « La vérité sur notre mérite se trouve entre ce qu’on nous en dit par politesse et ce que nous en disons par modestie ». J’espère que leur cri de cœur sera entendu.
Le plus aberrant c’est que la Mairie de Dakar affecte chaque année, dans ces centres socioculturels des agents de la Ville de Dakar qui n’ont aucune qualification et qui passent leur temps à papoter. Certaines vont pointer tous les matins avant d’aller vaquer à d’autres occupations. Mais, à la fin du mois, ces militantes parachutées vont percevoir leur salaire à la Mairie. Alors, je suis tenté de dire que le seul tort de ces monitrices, c’est qu’elles n’ont aucune coloration politique.
Pour leur participation efficiente à l’insertion socio-économique des jeunes filles défavorisées, les monitrices des centres socioculturels de Dakar contribuent à la lutte contre la pauvreté. D’où la nécessité d’élever leur statut à travers une promotion économique durable, le renforcement de leurs aptitudes et capacités, l'amélioration de leur état de santé et de leur productivité. Ces laissées pour compte, méritent l’attention des autorités municipales avec à leur tête, le Maire Khalifa Sall, qui doit s’impliquer personnellement pour faire aboutir les revendications de ces 50 monitrices qui ont du mal à comprendre son mutisme.
Alfred MENDY
niookobokk@yahoo.fr