Selon plusieurs témoignages, ils étaient près d’un millier de manifestants et ils ont tenté de pénétrer au sein du siège de la Minusma, situé en plein centre-ville. Les casques bleus auraient essuyé des jets de pierre et des cocktails molotov avant de répondre par des tirs de grenades lacrymogènes pour disperser la foule.
Pas de tirs à balles réelles sur les manifestants, assure Olivier Salgado, porte-parole de la Mission onusienne, mais des tirs de sommation :
« Ce que je peux vous dire, c’est qu’une manifestation s’est déroulée ce mardi matin à Gao, place de l’Indépendance, et alors que nous recevions, à leur demande, les délégués de la manifestation dans le camp de la Minusma, une foule s’est amassée autour du camp, aux environs de 10h.
Après avoir jeté pierres et coktails molotov, des manifestants ont alors tenté de pénétrer dans le camp et c’est à ce moment que la police des Nations unies a utilisé des gaz lacrimogènes et effectué des tirs de sommation pour disperser la foule et l’empêcher de pénétrer dans le camp. »
Pourtant, la direction de l’hôpital de Gao confirme que les personnes tuées ont bien été tuées par balles. Un médecin décrit un service des urgences saturé par l’afflux massif de blessés, victimes des gaz lacrymogènes. Dans la rue, des pneus brûlent, de nombreux commerces sont restés fermés et les écoles ont suspendu leurs cours. Le directeur d’un lycée explique avoir attendu la mi-journée avant de renvoyer les élèves chez eux, quand la situation s’est peu à peu calmée, à l’appel des notables de la ville.
Les manifestants sont farouchement opposés à un projet d’accord en cours de discussion sous l’égide de la Minusma et qui prévoit la création d’un secteur démilitarisé au nord de Gao. Dans cette zone, des affrontements ont impliqué, la semaine dernière, des groupes armés rebelles, des groupes armés favorables à l’Etat malien ainsi que la force onusienne.
Pourquoi la tension est-elle montée d'un coup à Gao ?
C'est un document titré « accord pour l'établissement d'une zone temporaire de sécurité » qui a mis le feu aux poudres. Cette simple feuille A4 prévoit la sécurisation par la Minusma d'une zone de dix kilomètres autour de Tabankort, commune où la tension est vive depuis des semaines entre les groupes armés pro-Bamako et les groupes armés rebelles du nord du Mali. La semaine dernière la Minusma a tiré sur un pick-up du Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA). Sept combattants ont été tués. Depuis, la force onusienne cherche donc à apaiser la situation.
Selon nos informations, ce sont les groupes pro-bamako qui ont proposé la création de la zone tampon. La Minusma a donc fait remonter la proposition à Kidal et la coordination des groupes armés a accepté les propositions, vendredi dernier.
Ce document de travail devait normalement repartir à Bamako pour être validé et signé par les autorités mais, ce week-end, il a été modifié. En effet, le drapeau de l'Azawad - certains disent du MNLA - et le logo de la Minusma ont été ajoutés, puis diffusés dans cette nouvelle version. La force onusienne a dénoncé cette récupération politique et la diffusion du document, à Gao - ville qui soutient dans sa majorité les autorités maliennes - a provoqué la colère de la population.