Voici encore une manifestation de protestation de populations suivie de morts.
C’est inadmissible. C’est inacceptable.
Je m’incline pieusement devant la dépouille des deux personnes mortes à Khossanto et je présente mes sincères condoléances à leurs familles.
J’exprime ma compassion aux personnes blessées et aux personnes dont les biens ont subi des dommages.
Le maintien de l’ordre depuis quelques années pose un grave problème dans notre pays.
En effet les opérations de maintien de l’ordre sont régulièrement accompagnées de pertes en vies humaines.
J’ai posé une question qui est toujours restée sans réponse. Je la réitère :
Qui tue les manifestants?
Les personnes qui tuent les manifestants doivent être identifiées, démasquées, traduites devant la justice et condamnées à des peines exemplaires pour que cela ne se reproduise plus.
Tant que cela ne sera pas fait, tant que ces meurtriers ne seront pas mis hors d’état de nuire, nous aurons une suspicion légitime sur la culpabilité ou la complicité d’éléments des forces de maintien de l’ordre.
Les forces en charge du maintien de l’ordre doivent pour leur honneur, leur dignité et leur crédibilité extirper ces éléments de leurs rangs si tel était le cas.
Nous n’avons pas sur cette terre quelque chose de plus précieuse que la vie humaine.
Les pouvoirs publics doivent être les premiers à préserver la vie humaine et à la sécuriser.
Il est évident que la formation de nos forces de maintien de l’ordre doit être revue de fond en comble.
Cette formation des forces de maintien de l’ordre doit accorder plus de respect au citoyen dans l’exercice de son droit constitutionnel à manifester, à sa protection et dans tous les cas à la préservation de sa dignité humaine et de son intégrité physique.
D’un autre côté les pouvoirs publics doivent faciliter la tenue de manifestations pacifiques.
Les interdictions répétitives de manifestations ne sont pas de nature à instaurer un climat de confiance entre les citoyens et les autorités administratives.
Le Préfet qui a pris l’arrêté qui a conduit aux événements d’aujourd’hui doit être démis de ses fonctions. L’État doit dédommager les populations ayant subi des préjudices.
Une enquête doit être urgemment diligentée pour établir les fautes commises et toutes les responsabilités. Le rapport de l’enquête devra être publié et le gouvernement devra en tirer toutes les conséquences.
Ces événements dramatiques de Khossanto nous rappellent encore l’impérieuse nécessité d’assurer la souveraineté de notre pays sur nos ressources extractives notamment aurifères.
Il est inadmissible que les populations qui vivent dans les terroirs dans lesquels ces ressources sont extraites soient parmi les populations les plus pauvres et les plus dépourvues d’infrastructures sociales au Sénégal.
De plus nous notons, de plus en plus, une absence de considération affirmée pour les populations des régions périphériques du nord, de l’est et du sud de notre pays.
La région de Kédougou est une région sensible car étant frontalière avec le Mali qui se bat courageusement contre le terrorisme.
J’invite le Gouvernement à prendre toutes les dispositions pour le retour au calme et à la sérénité dans cette région.
La région de Kédougou et celle de Tambacounda constituent les barrières naturelles de notre pays contre l’infiltration terroriste. Toute instabilité dans ces régions fait courir à notre pays de graves risques de contamination terroriste que nous ne souhaitons pas.
La souveraineté sur nos ressources extractives, la répartition équitable des revenues qu’elles génèrent et un aménagement équitable du territoire national sont des garants de stabilité et de paix social.
Par Mary Teuw Niane