Boko Haram, depuis des mois, grignote du terrain et mène des attaques sur des villages aux abords de la forêt de Sambisa où elle est retranchée, en particulier dans le secteur de Gwoza, dans le sud de l’Etat de Borno, un secteur administratif qui recouvre la ville de Chibok. Des milliers de villageois de ce secteur ont trouvé refuge au Cameroun et dans l’Etat de l’Adamawa. Par l’intermédiaire de leur église, une dizaine d’agriculteurs chrétiens de Gwoza et leurs familles viennent de s’installer à des centaines de kilomètres plus au sud, dans les environs de la capitale Abuja.
Il faut s’enfoncer deux heures dans la brousse pour gagner le village de Kopa au bord de la rivière Gurara, les déplacés chrétiens y dorment en famille dans une salle de classe, l’église évangélique leur a donné des terres pour cultiver. Ils racontent, à l’ombre d’un arbre, que les insurgés islamistes mènent souvent une première attaque sur un village avant de revenir quelques semaines, quelques mois plus tard, à moto et en pick-up pour l’assaut final.
L’armée nigériane, souvent alertée, ne se serait jamais interposée...
Ils sont arrivés à Ngoshé Sama le 5 mai à quatre heures de l’après-midi, se souvient Ezekiel, ils ont tiré sur des villageois, puis ont tout pillé, avant de brûler les maisons et les huit églises. Ils ont épargné les maisons des musulmans, assure l’agriculteur au crâne rasé. Amos, 32 ans, six enfants, raconte que Boko Haram a pris une femme et ses deux filles en otage à l’issue de l’attaque de Limankara il y a deux semaines. Amos et les autres assurent que l’armée nigériane, souvent alertée, ne s’est jamais interposée.
Les déplacés chrétiens décrivent aussi le climat de suspicion dans le secteur de Gwoza. Ayuba, explique que le fils d’une connaissance de sa mère, qui a été recruté par Boko Haram, a tué trois de ses amis devant sa maison de Gwoza, alors qu’il lui a servi des rafraîchissements tout au long de sa jeunesse. « Depuis qu’un proche a rejoint le groupe, je ne fais confiance à aucun de mes amis musulman dans le Nord », ajoute Ayuba. Le prêcheur évangéliste reconnaît tout de même, mais en grimaçant, que la majorité des victimes de Boko Haram sont des adeptes de l’islam.
Source : Rfi.fr