Michel Goya : Pas précisément. Il y a très certainement, comme lors de l’opération « Plomb durci », trois à quatre brigades qui sont installées autour de la bande de Gaza qui est relativement réduite comme espace, dont des brigades des unités blindées qui pénètreront profondément – si tant est qu’on veuille pénétrer profondément – dans la bande de Gaza, parce que ce sont les plus protégées, qui sont accompagnées d’infanterie légère, et le tout en liaison étroite avec l’aviation.
Gaza est une petite enclave extrêmement peuplée, beaucoup d’habitations, de ruelles enchevêtrées… Comment l’armée opère-t-elle dans ces conditions ?
Pour situer une comparaison, la dernière grande bataille urbaine qu’a livrée l’armée israélienne, c’était en 2002. C’était dans la ville de Jénine. Ça avait duré deux semaines et vingt-trois soldats israéliens étaient tombés. Mais Gaza et la simple ville de Gaza-ville et sa périphérie c’est douze fois Jénine. Pour se donner un autre élément de comparaison, c’est quatre fois la ville de Falluljah. Donc c’est un objectif militairement extrêmement difficile à prendre.
C’est la raison pour laquelle d’ailleurs en 2008, lors de la dernière opération, les Israéliens ne s’y étaient pas risqués. Cette opération terrestre était plus une opération symbolique. Il fallait montrer sa présence, il fallait détruire éventuellement les tunnels, quelques sites de lancement. Mais c’était une opération de raid. Et il est probable qu’il en sera de même ici, sans s’engager dans des combats de rue qui s’avèreraient extrêmement difficiles pour l’armée israélienne. Et c’est ce qu’attend le Hamas.
De ce que vous en savez, on n’est donc pas dans un objectif d’installation ?
Si Israël voulait vraiment contrôler l’ensemble du territoire de Gaza, l’armée israélienne réoccuperait le territoire comme elle l’a fait jusqu’en 2005. Mais visiblement ce n’est pas dans les intentions donc on se contente d’opérations punitives, comme en 2008 ou en 2012. On frappe. On frappe très fort, selon le principe de la riposte disproportionnée. On frappe très fort jusqu’à ce que les tirs s’arrêtent et on aura une paix, une paix provisoire pendant encore quelque temps.
Justement, frapper fort, est-ce que cela a un sens, face à des combattants du Hamas difficilement identifiables, retranchés et qui ont toujours réussi quoiqu’il arrive à se réarmer ?
Mais bien sûr, ça n’a pas de sens véritable. Israël pratique ce principe de la riposte disproportionnée. C’est quelque chose qui est héritée des guerres contre les Etats arabes voisins. L’idée c’était de frapper très fort contre les armées arabes, de les détruire autant que possible. Maintenant, face à des organisations comme le Hamas ou comme le Hezbollah au Sud-Liban, appliquer ce principe ça équivaut à frapper en réalité la population. Qu’on le veuille ou non, quels que soient les artifices rhétoriques et quelles que soient les précautions que l’on prend, cela aboutit toujours à tuer des centaines de civils, qu’on le veille ou non.
Donc on se contente de frapper très fort, d’obtenir une sécurité pendant quelque temps. Mais les Israéliens préfèrent la sécurité provisoire à une paix véritable en réalité. Et le Hamas en profite également, bien sûr. Deux adversaires profitent de cette situation. Le Hamas tire sa légitimité de sa lutte, de sa résistance contre Israël, mais le gouvernement israélien également.
Tout le monde sait que la paix véritable ne pourra être obtenue que si un Etat palestinien existe dans la région. Or, pour l’instant, personne en Israël n’est capable, n’a la volonté politique de parvenir à cette situation. Donc on se contente de solutions à court terme, qui sont des solutions de sécurité et des solutions militaires avec relativement peu de risques. C’est-à-dire qu’on frappe à distance plutôt que de s’engager dans de véritables combats.
Le risque de pertes est quand même réel pour l’armée israélienne, avec cette opération terrestre. Jusque-là il n’y a qu’un mort côté israélien.
Oui, mais on se retrouve dans cette situation paradoxale qu’on avait trouvé aussi un peu au début de la guerre de 2006, où finalement les adversaires ne s’affrontent pas militairement, les miliciens du Hamas ne vont pas affronter les colonnes blindées de Tsahal parce que ce serait suicidaire. L’armée israélienne évite de rentrer dans les rues de Gaza-ville parce que ce serait extrêmement difficile. Donc on se retrouve avec des combattants qui ne s’affrontent pas véritablement, qui s’affrontent de façon indirecte et en réalité frappent surtout les civils. Donc ce sont les civils qui paient cette guerre, plutôt que les militaires.
Une force de frappe aussi sur les tunnels. C’est ce que veut Benyamin Netanyahu. Côté Palestiniens, comment on s’organise si ces tunnels sont détruits, notamment pour se réarmer ?
Ça avait été déjà le cas en 2008. Il y avait déjà eu une campagne contre ces tunnels, dont une grande partie a été détruite, et qui ont été pour la plupart reconstruits dans la foulée. Il n’y a rien de plus facile que de construire un tunnel. Donc là aussi, c’est une guerre de Sisyphe, c’est quelque chose qui est sans fin.
Source : Rfi.fr
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