Difficile de dire combien Oussama Ben Laden a pu mobiliser d'argent tout au long de sa carrière de terroriste islamiste. Seule certitude, l'empire financier ayant servi à la structuration d'al-Qaida provient en partie de l'entreprise familiale. À la naissance d'Oussama, en 1957, son père, Mohammed Ben Laden, est un magnat influent du bâtiment en Arabie saoudite. Ce cheikh religieux proche de la famille royale nourrit sa fortune par de juteux contrats passés par les princes, comme ceux de la rénovation de La Mecque ou de Médine. C'est d'ailleurs pour travailler à ses côtés que le jeune Oussama, 17e enfant de cette grande famille qui en compte 55, entame des études de génie civil et de commerce à la prestigieuse université King Abdulaziz de Djeddah. Mais très vite, il cède à l'appel du djihad après l'invasion de l'Afghanistan par les troupes de Moscou, en 1979.
Liens familiaux troubles
Ce qui ne l'empêche pas de toucher une part confortable des dividendes de l'empire familial. Selon les dires d'un de ses demi-frères, Yeslam, Oussama aurait touché 12 à 15 millions de dollars entre 1973 et 1994, date à laquelle il perd sa nationalité saoudienne et le contrôle de ses avoirs dans ce pays. Il faut dire que le Saudi Binladin Group, devenu un véritable conglomérat, génère beaucoup, beaucoup d'argent. Il investit dans les télécommunications, l'édition (par la commercialisation sous licence des films de Walt Disney !), le textile, l'électronique, les machines industrielles, raconte Alain Rodier, ancien officier supérieur des services de renseignements français, aujourd'hui directeur du centre français de recherche sur le renseignement. Au début des années 1990, le Binladin Group s'est même vu attribuer le marché de la construction de... bases militaires américaines en Arabie saoudite !
Le soutien de l'empire financier des Ben Laden à al-Qaida n'a toutefois jamais pu être démontré. Une enquête menée pendant cinq ans, de décembre 2001 à décembre 2006, par le juge français Renaud Van Ruymbeke s'est terminée par une ordonnance de non-lieu le 27 décembre 2006, faute de preuve. Mais de forts soupçons planent selon les informations de Van Ruymbeke, qui écrit dans son ordonnance : "Il existait des liens entre Yeslam Binladin, la SICO (société suisse Saudi Investments and Co), le Saudi Binladin Group ainsi que des liens entre ce groupe saoudien et des financiers soutenant les opérations terroristes menées par Oussama Ben Laden." Mais Van Ruymbeke n'a jamais pu aller au bout de ses investigations, par manque de collaboration des paradis fiscaux par lesquels transitait l'argent, une incongruité alors qu'il n'existe pas d'impôt sur les sociétés en Arabie saoudite...
La Zakat, une manne financière
Un pays qui, au début des années 1980, demande discrètement à Oussama, via le chef des services secrets, le prince saoudien Turki al-Faisal, d'apporter un soutien logistique aux moudjahidine afghans contre les soviétiques. Les 17 enfants de la famille Ben Laden profitent de la bienveillance de la CIA : Riyad et Washington recrutent, arment et entraînent des hommes venus de tout le monde arabo-musulman. Oussama, lui, sillonne la péninsule arabique pour y lever des fonds des riches saoudiens qui lui versent la zakat, une taxe caritative que doivent acquitter les musulmans, un des cinq piliers de l'islam. Plus tard, des associations caritatives, dont certaines installées en France, seront également chargées de récolter des fonds. En attendant, Oussama s'installe à Peshawar, base arrière au Pakistan de la guérilla antisoviétique. C'est au cours de cette période que Ben Laden rassemble les contacts nécessaires à la création d'al-Qaida ("la base", en arabe), à la fin des années 1980. Au départ, un simple listing informatique de ceux que l'on appelle les "Arabes afghans".
Après la fin de la guerre en Afghanistan, Ben Laden rompt avec l'Arabie saoudite, où des bases militaires américaines ont été installées. Oussama se radicalise encore et décide de mener une guerre sainte contre les États-Unis et son pays d'origine. Depuis son exil soudanais, de 1991 à 1996, il crée plusieurs sociétés destinées à financer ses activités de soutien aux fondamentalistes dans le monde arabe. L'argent tiré de ces activités variées et souvent légales circule en toute opacité. Avec à la clé un soutien pécuniaire et logistique à des attentats en Arabie saoudite. Prié de quitter le Soudan par le régime en place, Ben Laden retourne en Afghanistan, où il s'allie aux talibans à qui il paie un tribut, explique Alain Rodier. En échange de 10 à 20 millions de dollars par an versés au régime, ses djihadistes bénéficient d'une totale liberté.
Une fortune tarie
Mais, selon le chercheur, le 11 septembre 2001 a mis un terme à la puissance financière de Ben Laden. Après les attentats de New York, "il ne pouvait plus gérer ses affaires, ses comptes personnels, c'était fini". Sa famille a rompu tout lien. Traqué par les Américains, coupé de ses vivres par l'Arabie saoudite, Ben Laden aurait même été "ruiné". Pas de quoi tarir pour autant les financements d'al-Qaida, devenue, depuis ses débuts, une nébuleuse dont les différentes cellules s'autofinancent grâce au "trafic d'armes, d'êtres humains et de drogue", selon Alain Rodier. Au Maghreb, l'Aqmi protège de multiples trafiquants, assure le spécialiste des renseignements. Dans son ouvrage Al-Qaida, les nouveaux réseaux de la terreur* (2004), Michel Nesterenko décrit "une structure en réseau, avec externalisation de certaines tâches, sur le modèle des entreprises de la nouvelle économie, comme Cisco par exemple". Si Oussama Ben Laden est bien mort, les réseaux financiers d'Al-Qaida demeurent.
Liens familiaux troubles
Ce qui ne l'empêche pas de toucher une part confortable des dividendes de l'empire familial. Selon les dires d'un de ses demi-frères, Yeslam, Oussama aurait touché 12 à 15 millions de dollars entre 1973 et 1994, date à laquelle il perd sa nationalité saoudienne et le contrôle de ses avoirs dans ce pays. Il faut dire que le Saudi Binladin Group, devenu un véritable conglomérat, génère beaucoup, beaucoup d'argent. Il investit dans les télécommunications, l'édition (par la commercialisation sous licence des films de Walt Disney !), le textile, l'électronique, les machines industrielles, raconte Alain Rodier, ancien officier supérieur des services de renseignements français, aujourd'hui directeur du centre français de recherche sur le renseignement. Au début des années 1990, le Binladin Group s'est même vu attribuer le marché de la construction de... bases militaires américaines en Arabie saoudite !
Le soutien de l'empire financier des Ben Laden à al-Qaida n'a toutefois jamais pu être démontré. Une enquête menée pendant cinq ans, de décembre 2001 à décembre 2006, par le juge français Renaud Van Ruymbeke s'est terminée par une ordonnance de non-lieu le 27 décembre 2006, faute de preuve. Mais de forts soupçons planent selon les informations de Van Ruymbeke, qui écrit dans son ordonnance : "Il existait des liens entre Yeslam Binladin, la SICO (société suisse Saudi Investments and Co), le Saudi Binladin Group ainsi que des liens entre ce groupe saoudien et des financiers soutenant les opérations terroristes menées par Oussama Ben Laden." Mais Van Ruymbeke n'a jamais pu aller au bout de ses investigations, par manque de collaboration des paradis fiscaux par lesquels transitait l'argent, une incongruité alors qu'il n'existe pas d'impôt sur les sociétés en Arabie saoudite...
La Zakat, une manne financière
Un pays qui, au début des années 1980, demande discrètement à Oussama, via le chef des services secrets, le prince saoudien Turki al-Faisal, d'apporter un soutien logistique aux moudjahidine afghans contre les soviétiques. Les 17 enfants de la famille Ben Laden profitent de la bienveillance de la CIA : Riyad et Washington recrutent, arment et entraînent des hommes venus de tout le monde arabo-musulman. Oussama, lui, sillonne la péninsule arabique pour y lever des fonds des riches saoudiens qui lui versent la zakat, une taxe caritative que doivent acquitter les musulmans, un des cinq piliers de l'islam. Plus tard, des associations caritatives, dont certaines installées en France, seront également chargées de récolter des fonds. En attendant, Oussama s'installe à Peshawar, base arrière au Pakistan de la guérilla antisoviétique. C'est au cours de cette période que Ben Laden rassemble les contacts nécessaires à la création d'al-Qaida ("la base", en arabe), à la fin des années 1980. Au départ, un simple listing informatique de ceux que l'on appelle les "Arabes afghans".
Après la fin de la guerre en Afghanistan, Ben Laden rompt avec l'Arabie saoudite, où des bases militaires américaines ont été installées. Oussama se radicalise encore et décide de mener une guerre sainte contre les États-Unis et son pays d'origine. Depuis son exil soudanais, de 1991 à 1996, il crée plusieurs sociétés destinées à financer ses activités de soutien aux fondamentalistes dans le monde arabe. L'argent tiré de ces activités variées et souvent légales circule en toute opacité. Avec à la clé un soutien pécuniaire et logistique à des attentats en Arabie saoudite. Prié de quitter le Soudan par le régime en place, Ben Laden retourne en Afghanistan, où il s'allie aux talibans à qui il paie un tribut, explique Alain Rodier. En échange de 10 à 20 millions de dollars par an versés au régime, ses djihadistes bénéficient d'une totale liberté.
Une fortune tarie
Mais, selon le chercheur, le 11 septembre 2001 a mis un terme à la puissance financière de Ben Laden. Après les attentats de New York, "il ne pouvait plus gérer ses affaires, ses comptes personnels, c'était fini". Sa famille a rompu tout lien. Traqué par les Américains, coupé de ses vivres par l'Arabie saoudite, Ben Laden aurait même été "ruiné". Pas de quoi tarir pour autant les financements d'al-Qaida, devenue, depuis ses débuts, une nébuleuse dont les différentes cellules s'autofinancent grâce au "trafic d'armes, d'êtres humains et de drogue", selon Alain Rodier. Au Maghreb, l'Aqmi protège de multiples trafiquants, assure le spécialiste des renseignements. Dans son ouvrage Al-Qaida, les nouveaux réseaux de la terreur* (2004), Michel Nesterenko décrit "une structure en réseau, avec externalisation de certaines tâches, sur le modèle des entreprises de la nouvelle économie, comme Cisco par exemple". Si Oussama Ben Laden est bien mort, les réseaux financiers d'Al-Qaida demeurent.