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Polio: au Niger, les religieux au secours de la vaccination

Alors que le nombre de cas de polio chez les enfants africains augmente de façon dramatique, en raison essentiellement de l'appel au boycottage de la vaccination lancé par certains imams, un motif d'espoir se fait jour au Niger, où des représentants du clergé musulman rejoignent les rangs des défenseurs de cette prévention.



Dans les rues poussiéreuses de Kano, principale ville du nord du Niger, des crieurs publics munis de mégaphones traversent la foule invitant à la vaccination. A 43 ans, Yusuf Umar, à la fois victime et militant, se déplace sur des béquilles, la polio ayant entraîné l'atrophie de ses jambes. "Regardez-moi", dit-il aux parents de jeunes enfants attendant d'être immunisés dans une clinique délabrée, au cas où l'un d'eux aurait des doutes. "Voulez-vous que votre enfant me ressemble?"

Umar fait partie de l'association locale des victimes de la polio, une structure qui ne comptait que huit membres à ses débuts et qui, huit ans plus tard, en recense 2.350. Dans la cour, derrière le quartier central de l'association, des soudeurs se livrent à la fabrication d'engins destinés à aider les malades à conserver leur mobilité: des chaises de jardin en plastique fixées sur des vélos qui deviennent des fauteuils roulants, des tuyaux en métal à terminaison plate pour manoeuvrer les pédales des voitures à la main...

La campagne de proximité semble porter ses fruits. Alors que le nombre d'infections chez les enfants a atteint 788 l'an dernier, l'OMS rapporte que le nombre de personnes vaccinées dans l'Etat de Kano pendant la première moitié de 2008 a augmenté de 26%, comparé à la même période en 2007.

Pourtant, le pic de l'an dernier a fait grandir la crainte que la maladie puisse à nouveau franchir les frontières, atteindre des pays limitrophes indemnes de la polio et menacer un effort de plusieurs milliards de dollars destiné à nettoyer la planète de la maladie.

"On pensait avoir gagné", reconnaît le Dr Hamisu Walal, chargé de la surveillance nationale avec l'OMS. "Nous avons été choqués et déprimés d'en avoir fait autant et d'avoir cette poussée."

Le boycottage de 2003 lancé par les imams a duré un an, jusqu'à ce que la ligne la plus dure des sympathisants soit persuadée d'avoir fait reculer la vaccination. Résultat: en 2004, le nombre de nouveaux petits infirmes est passé de 355 à 792, selon l'OMS. Pourtant, le doute persiste quant à la vaccination et quelques dirigeants religieux continuent à affirmer que l'Islam l'interdit, selon les responsables sanitaires.

Un dirigeant musulman, au moins, a mené une action sans précédent contre les partisans de cette interdiction. En septembre dernier, le plus haut dignitaire islamique de Borno, mort en février, a retiré son titre à un chef religieux après qu'il a divorcé, sa femme ayant fait vacciner leurs enfants

"Son Excellence n'a aucune tolérance envers ceux qui représentent une entrave au combat contre la polio", a expliqué son porte-parole, Usman Chiroma.

Pour Muhammad Ali Pate, médecin du ministère de la Santé, l'augmentation des subventions publiques et un plus grand engagement de la communauté ont contribué à faire progresser les vaccinations. Il dit maintenant voir des imams, lors des prières du vendredi, inciter vivement les croyants à faire vacciner leurs enfants et des responsables traditionnels poursuivre les enfants non vaccinés.

"La vaccination ne doit pas seulement être quelque chose que nous leur faisons. Cela aggrave la suspicion. Nous voulons que la communauté comprenne ce qu'est la polio, notamment le lien qui existe entre la maladie et la paralysie", souligne-t-il. AP

AP

Lundi 23 Mars 2009 - 16:11


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