Pour le porte-parole du PAM, Alexis Masciarelli, "c'est une opération assez exceptionnelle, la plus importante de nos opérations aériennes d'urgence depuis longtemps, plus importante que pour la Syrie ou les Philippines."
Il reconnaît que la mesure ne suffit pas à contourner la crise alimentaire qui sévit en Centrafrique : "Ça va nous faire un ballon d'oxygène, mais ça ne règlera pas le problème à terme."
Selon l'ONU, 1,3 million de personnes, soit plus d'un quart de la population de Centrafrique, a besoin d'une assistance alimentaire immédiate, en particulier dans les camps de déplacés où s'entassent plus de 800.000 personnes, dont plus de la moitié à Bangui.
L'arrivée du premier avion-cargo du PAM, chargé de 80 tonnes de riz, est prévue à Bangui dans la matinée.
Il sera suivi de 24 rotations quotidiennes d'une capacité équivalente, soit 1.800 tonnes au total, selon le PAM, une quantité suffisante pour nourrir 150.000 personnes pendant un mois.
La situation humanitaire s'est fortement dégradée en Centrafrique, pays considéré comme l'un des plus pauvres de la planète malgré son potentiel minier et agricole, après le coup d'Etat de mars 2013 qui a porté au pouvoir la rébellion à dominante musulmane Séléka.
Les rebelles ont multiplié les exactions à l'encontre des populations majoritairement chrétiennes du pays, pillant et incendiant des villages entiers, en particulier dans le nord-ouest.
Après la chute de l'ex-chef rebelle devenu président, Michel Djotodia, contraint à la démission le 10 janvier, les musulmans sont à leur tour devenus la cible de milices d'autodéfense anti-balaka, majoritairement composées de chrétiens.
Ces dernières semaines, faute de stocks suffisants, le PAM avait concentré ses efforts sur le principal site de déplacés de Bangui, près de l'aéroport, où vivent environ 100.000 personnes dans des conditions très précaires.
La mise en place du pont aérien coûtera plus de 3 millions de dollars.
"Pour l'instant, nous ne pouvons pas faire plus", regrette M. Masciarelli qui rappelle qu'à ce jour, le programme d'urgence du PAM en Centrafrique, prévu jusqu'en août, a reçu moins d'un quart des 107 millions de dollars demandés.
"Nos stocks sont quasiment vides à Bangui, nous sommes descendus à 85 tonnes de riz", explique-t-il.
"Vu l'ampleur des besoins, cette opération va nous permettre de mieux répondre à l'urgence mais pas de refaire nos stocks.
Il faudrait pour cela que la route (entre la frontière camerounaise et Bangui) soit rouverte de
manière régulière", dit-il.
La force africaine en Centrafrique (Misca) a assuré qu'elle allait désormais escorter des convois trois fois par semaine pour rétablir le "corridor de commerce" permettant d'approvisionner la capitale centrafricaine.
"Mais est-ce que les transporteurs vont revenir ?", s'interroge M. Masciarelli.
Ce week-end, 23 camions du PAM, chargés de 27 tonnes de vivres chacun, ont pu arriver à Bangui sous escorte.
Certains d'entre eux étaient bloqués à la frontière depuis le 6 janvier.
Grâce au pont aérien, le PAM devrait élargir sa distribution à d'autres déplacés de Bangui et commencer à faire des stocks dans l'intérieur du pays en prévision de la saison des pluies prévue en mars-avril.
Néanmoins, estime M. Masciarelli, "la crise alimentaire risque de durer: les commerçants sont partis, les pillages se poursuivent, les gens n'ont pas d'argent et les paysans ne produisent plus, faute de semences".
Dans le principal camp de déplacé de Bangui, les experts en nutrition du PAM ont déjà recensés plusieurs centaines de cas de malnutrition sévère parmi les enfants.
D'autres cas ont été signalés notamment parmi les populations musulmanes déplacées à la sortie nord de la capitale.
Source : BBC Afrique