La pièce fait 60m2, à peine. C’est dans ce petit tribunal de village, juché sur une colline du Sud-Kivu, que comparaît celui qui fut de 2005 à 2007 l’un des hommes les plus redoutés de l’est du Congo: le colonel Bedu Mobuli Engangela, alias 106. Entouré de ses avocats, l'accusé se tient debout, droit dans ses bottes. Derrière lui, quatre bancs encombrés d’un public curieux.
Une à une, les victimes comparaissent, sans que jamais on ne les voit. Couvertes de la tête aux pieds d’une sorte de burqa, elles témoignent (sous nom de code) derrière une porte dérobée. Seule leur voix parvient à la cour.
D’une toute petite voix justement, l’une d’entre elles raconte : kidnappée à l’âge de neuf ans par le « colonel 106 », dit-elle, elle a été son esclave sexuelle pendant un mois, jusqu’à ce qu’elle prenne la fuite. En face, le colonel jamais ne se démonte, nie les accusations et questionne les victimes sans relâche. Décrivez-moi les relations que nous avions, dit-il plein d’assurance, avant que le juge ne rejette cette question.
Accusé de crime contre l’humanité pour viols, meurtres et pillage, crimes qu'il a perpétrés après avoir déserté l’armée en 2005, le « colonel 106 » risque la perpétuité dans un procès rare, qui se veut exemplaire. But recherché : montrer la capacité de la justice congolaise à juger aussi des hauts gradés. Le verdict est attendu dans une quinzaine de jours...
Source : Rfi.fr