Après Senghor, Abdou diouf et Abdoulaye Wade, vous voilà au pied du mur, face à la redoutable responsabilité de devoir traduire en actes vos promesses. Vous voilà au pied du mur face au chômage des jeunes, face à un système éducatif en crise perpétuelle, face à un système de sante malade, face à un système de justice en doute, face à un environnement des affaires morose.
Monsieur le Président, alors que le budget de votre programme politique vient d’être voté par l’assemblée nationale, vous avez dans votre adresse du 31 janvier, posé les jalons que vous estimez être les mesures clés vers sa mise en œuvre. En ce qui nous concerne, notre devoir est de mettre en exergue ce qui nous semble être un chemin d’illusions pavé de bonnes intentions. En effet, Monsieur le Président, personne ne peut contester votre bonne foi ni même votre intérêt propre à réussir votre programme. Les sénégalais reconnaissent en vous un homme sobre mais sincère, distant mais juste. Et c’est pourquoi, nous savons que si vous vous inscrivez dans l’erreur, c’est bien en toute sincérité. Nous sommes tous gardiens les uns des autres, alors il nous semble naturel de vous rappeler à l’ordre lorsque cela relève de l’utilité et du bien-être commun. Président de la République ne fait pas de vous un homme savant de toutes choses, ni un visionnaire capable de voir plus loin que tous les citoyens, ni l’homme exceptionnel pour engager les ruptures nécessaires. Mais, pour réussir, vous devez devenir un peu de tout cela. Et c’est pourquoi nous vous disons bonne chance.
Monsieur le Président, les jeunes du Sénégal attendent beaucoup de vous. Ils sont 200 000 à arriver sur le marché de l’emploi chaque année. Pour toute mesure de réponse, vous avez maintenu les mêmes instruments inefficaces que constituent le FNPJ, l’ANEJ et l’OFEJBAN (que vous avez transformé en ANEJ pour étendre son action dans toutes les régions du Sénégal). Pendant 12 ans, ces instruments, n’ont pas su faire face au problème des jeunes. Dans votre budget de 2013, vous allouez seulement allouez 25 millions à l’ANEJ, 359 millions à l’AJEB soit 25 millions par région et rien de nouveau au FNPJ. Il faut penser que ces montants négligeables s’expliquent par le choix du FONGIP ou même du FONSIS comme source de financement des jeunes. Mais là aussi, c’est une surprise de constater que le FONGIP ne dispose que de 5 milliards destinés aux femmes, à l’équipement rural, aux PME et aux jeunes. Ce n’est donc pas un instrument dédié aux jeunes. Au demeurant, financer 30 000 projets de jeunes par an comme vous l’avez déclaré, soit plus de 100 projets par jour pendant 4 ans est tout simplement hors de votre portée. A cela s’ajoute le manque de stratégie tout court en matière d’emploi des jeunes.
Monsieur le Président, ce qui est aussi hors de votre portée de souverain, c’est l’ambition du FONSIS. Taxer le secteur privé pour l’alimenter n’est pas opportun au moment où ce même secteur privé a vu son taux d’imposition hausser et que vous attendez qu’il investisse encore plus pour la création d’emplois. Demander aux partenaires extérieurs de constituer ce fonds, c’est certainement lui enlever son caractère souverain, puisque ces financements seront naturellement conditionnés et porteurs d’intérêts qui vont alourdir nos charges publiques. Car, comme vous le savez Monsieur le Président, l’intérêt annuel sur la dette, rien que pour cette année c’est 175 milliards avec un service total de la dette de 440 milliards. Vous nous proposez de nous endetter encore plus pour une stratégie d’investissement qui n’est pas encore définie, puisque tel est l’objectif du FONSIS. A cet égard, il est aussi bon de rappeler que l’Etat du Sénégal a toujours été un mauvais investisseur des ressources publiques. C’est vrai pour le secteur de l’Education dont les chercheurs de ce pays ont déjà établi qu’’il n’est pas rentable malgré les milliards dépensés. C’est aussi vrai pour le système de santé.
Monsieur le Président, il vous échoit d’avoir une stratégie d’abord avant de préconiser la mise en place d’un tel fonds. Le financement de l’économie dans des pays comme les nôtres requiert des stratégies novatrices et non uniquement la main tendue à nos partenaires extérieurs, encore moins du mimétisme venant de pays à ressources excédentaires.
Monsieur le Président, c’est aussi la main tendue que vous proposez aux sénégalais les plus pauvres. Votre programme de bourses familiales de 100 000 Francs par an et famille, c’est 8000 francs parsemaine, ou tout simplement 300 francs par jour. C’est encore vers ces pauvres que va votre programme CAPSU dont l’appellation d’assurance universelle fait sourire plus d’un. Elle n’a rien d’universel. Elle n’est même pas générale. Elle est tout simplement un plan sésame ciblé sur les pauvres. Mais tous s’accordent que ce programme n’ira pas loin. Ses objectifs restent en tout cas loin de l’objectif d’une assurance universelle. Alors pourquoi ce terme qui ne porte qu’une illusion. L’Etat doit rester une chose sérieuse. Convaincus que l’emploi et la protection sociale sont des piliers essentiels à la cohésion sociale, nous refusons cependant que les citoyens soient leurrés dans la capacité du gouvernement de répondre à ces problèmes par des instruments sans fondement durable et efficace. Les promesses électorales, c’est une chose, la réalité c’est autre chose. Vous devez rectifier cette maladresse.
Monsieur le Président, Le réalisme est d’aller vers des choix durables et soutenables. Le réalisme c’est de relancer la croissance dans le cadre d’une stratégie innovante qui permet de faire face au problème fondamental du financement de l’Economie tout en intégrant l’emploi et la protection sociale au cœur de ce dispositif. Sur ce plan, il faut en revenir à la réalité historique : ce sont les jeunes qui forment le dispositif de relais pour la protection du ménage. Les préparer et les renforcer, c’est renforcer le ménage. Depuis l’aube des temps, c’est le fils qui devient le support de famille du père lorsque celui est en déficit de ressources. Aider les jeunes, c’est aider les ménages dans la dignité. Mais pour cela Monsieur le Président, il faut y croire et mettre les moyens conséquents avec beaucoup de créativité et de vision. Ce n’est pas encore le cas si on compare vos dotations personnelles à celles pour l’emploi des jeunes.
Monsieur le Président, vos huit milliards de fonds politiques par an dépassent de loin le budget de 400 millions que vous avez mis pour l’ANEJ et l’AJEB. Avant la fin de votre mandat, vous aurez consommé en argent de poche 40 milliards dépensés pour vos proches, vos alliés et vous-même. Les pères et mères de familles auront encore sur leurs bras des jeunes en mal d’opportunités lorsque vous leur ferez la promesse d’un deuxième mandat pour achever vos ambitions. Déjà vu et vécu, ils vous diront.
Monsieur le Président, il faut des chantiers productifs qui permettent de mettre en position de formation et d’activité les jeunes du Sénégal. IL ne suffit pas de former les jeunes. Les diplômés de l’université peuvent vous le certifier. Ils doivent se retrouver en position de travail dans des chantiers dont la production contribue directement à la croissance, chantier qui leur permettront de parfaire leur formation et bénéficier d’opportunités réelles au bout de cette expérience de transition. Dans ce sens, malgré votre décision hâtive de conférer au second opérateur une licence, nous maintenons l’opportunité de réserver la quatrième licence de téléphonie au financement de l’emploi des jeunes. Ce financement procurera un montant de 300 milliards sur 15 ans dont 150 à l’octroi et le reste relevant des redevances annuelles. Nous vous proposons aussi de procéder à la désintermédiation des banques du transfert d’argent rapide. L’économie de 5% qui en sera générée permettra de réduire les frais de transfert pour l’opérateur et les bénéficiaires. La moitié de cette économie, estimée à 300 milliards sur 15 ans permettra de renforcer le financement de l’emploi des jeunes. C’est donc 600 milliards qui peuvent être mobilisés pour mettre en place un vaste chantier de formation et de travail pour les jeunes, dans une zone d’éclosion économique et sociale qui sera accompagnée par un service national et la réservation de 30% des marchés publics aux jeunes, soit 40 milliards par an. Le Sénégal Oriental demande à être redynamisé par un tel grand projet qui permettra un investissement total de 3000 milliards sur 10 ans. Cette partie négligée du Sénégal qui représente 30% de la superficie nationale est pourtant si riche de ressources laissées aux mains des étrangers qui pillent ses ressources minières.
Monsieur le Président, les jeunes ne demandent pas à être des cultivateurs. Ce n’est pas seulement l’agriculture qui est source de travail, c’est tous les domaines d’opportunités. Mais pour cela, il faut un espace d’éclosion qui permet à un jeune de parfaire ses talents, d’expérimenter et de mettre en pratique ses ambitions. Cet eldorado doit et peut exister ici au Sénégal. Mais Monsieur le Président, cela ne se fera que lorsque le jeune y verra ses désirs d’avenir. Demander aux jeunes d’aller cultiver la terre ne relève pas du réalisme. Et c’est pour cela Monsieur le Président, que je vous invite à changer de discours ainsi que vos ministres dans la manière d’aborder la question de l’emploi et de l’opportunité des jeunes. La réponse est de fournir un dispositif pour éclore les talents et les ambitions des jeunes en les mettant en phase avec les besoins du pays. Faut-il le rappeler, ce sont les jeunes qui peuvent et doivent porter le projet de transformation économique et sociale de ce pays. Ils peuvent être mis de manière organisée au centre d’un dispositif d’appui au secteur de la production, de la santé, de l’éducation, de la protection sociale, du développement local, de l’énergie verte et des TIC. Cela requiert de la stratégie et un dispositif et non uniquement une démarche au hasard. Nous vous invitons, Monsieur le président de la République à initier cet ambitieux projet dès 2013 avec une affectation de 5 milliards issus de vos fonds politiques. Il vous en restera toujours 3 milliards.
Monsieur le Président, nous avons entendu votre désarroi face au problème de la dette dont vous-même devez assumer une partie. La responsabilité n’est pas de se limiter à une opération de reprofilage comme le préconise le Ministre de l’Economie. Deuk ak Deug, nous disons. Il est temps que les sénégalais sachent que l’Etat ne peut plus continuer à s’endetter pour financer le fonctionnement du système éducatif et du système de santé dans la mesure où ce même Etat est inefficace dans ces domaines.
Nous proposons la mise en concession progressive de ces deux systèmes aux mains de des professionnels de ces secteurs au sein de l’Etat, l’impératif étant tout simplement que les sénégalais continuent d’avoir accès à ces services essentiels. Le secteur de la santé et le secteur de l’Education connaissent déjà un important segment privé. Une forme mixte peut être offerte pour diminuer la place de l’Etat et ses charges qui s’élèvent à près de 400 milliards rien que pour le fonctionnement, compte non tenu des investissements. L’Etat doit se désengager progressivement tout en maintenant pendant 5 ans les investissements dans la construction de nouvelles infrastructures. Ce montant d’investissement tourne autour de 100 milliards par an. Ainsi, l’Etat du Sénégal pourra arrêter l’ascenseur de la dette en économisant près de 400 milliards par an qui pourront être partiellement consacrées aux investissements productifs.
Dans ce schéma, les syndicats de ces secteurs avec leurs membres deviendront les copropriétaires de réseaux de santé et d‘éducation organisés et adossés à des systèmes d’assurances. Seulement alors, nous pourrons aller vers l’assurance universelle. La charte de concession exigera de ces réseaux une présence sur l’ensemble du territoire avec des paquets de services définis sur la base d’un curriculum national unique pour l’éducation. Les concours extérieurs des partenaires (subventions et dons), actuellement d’un montant de 200 milliards chaque année, seront affectés à l’alimentation d’un fonds de financement à des taux concessionnels avec des facilités de remboursement sur 10 ans pour soutenir le développement de ces réseaux de santé et d’éducation.
Pour ceux qui ne peuvent assumer les coûts payants des services éducatifs, l’Etat payera. En contrepartie, ceux qui ne disposent pas de revenus pour payer ces services, pourront ou devront intégrer un programme d’emploi parce que l’Etat sera alors en mesure d’ouvrir des chantiers productifs massifs.
C’est certes un modèle différent de ce que nous faisons depuis 50 ans. Mais qui a dit que ce que nous faisons depuis 50 ans fonctionne ? Il vous appartient monsieur le Président d’oser avancer sur cette voie. Le financement de l’économie ne peut se baser uniquement sur l’endettement. Nous devons faire avec nos propres moyens et oser ce que les autres n’osent pas. Au-delà ce modèle pourra être élargi au secteur de l’assainissement, de l’aménagement d’infrastructures productives, notamment dans le domaine agricole.
Enfin Monsieur le Président, il n’est pas superflu de vous rappeler que la bonne gouvernance commande de fermer les sources d’enrichissement illicite. A ce titre, vos fonds politiques de 8 milliards doivent être encadrés. La cour des comptes doit pouvoir les auditer comme vous l’aviez promis. Etait-ce uniquement une promesse électorale ? Dans le même ordre, nous vous invitons à faire sortir de la Présidence de la République l’ARTP, l’APIX, la délégation à la protection sociale, qui font de cet espace un coffre-fort.
La bonne gouvernance doit commencer par vous-même.
Monsieur le Président, les sénégalais vous ont élu pour un mandat de changement. Osez. Dewenati et que le chemin vous soit éclairé pour un Sénégal de paix, prospère et porteur des désirs d’avenir de sa jeunesse.
Par Amadou Gueye/Nouvelle République
Monsieur le Président, alors que le budget de votre programme politique vient d’être voté par l’assemblée nationale, vous avez dans votre adresse du 31 janvier, posé les jalons que vous estimez être les mesures clés vers sa mise en œuvre. En ce qui nous concerne, notre devoir est de mettre en exergue ce qui nous semble être un chemin d’illusions pavé de bonnes intentions. En effet, Monsieur le Président, personne ne peut contester votre bonne foi ni même votre intérêt propre à réussir votre programme. Les sénégalais reconnaissent en vous un homme sobre mais sincère, distant mais juste. Et c’est pourquoi, nous savons que si vous vous inscrivez dans l’erreur, c’est bien en toute sincérité. Nous sommes tous gardiens les uns des autres, alors il nous semble naturel de vous rappeler à l’ordre lorsque cela relève de l’utilité et du bien-être commun. Président de la République ne fait pas de vous un homme savant de toutes choses, ni un visionnaire capable de voir plus loin que tous les citoyens, ni l’homme exceptionnel pour engager les ruptures nécessaires. Mais, pour réussir, vous devez devenir un peu de tout cela. Et c’est pourquoi nous vous disons bonne chance.
Monsieur le Président, les jeunes du Sénégal attendent beaucoup de vous. Ils sont 200 000 à arriver sur le marché de l’emploi chaque année. Pour toute mesure de réponse, vous avez maintenu les mêmes instruments inefficaces que constituent le FNPJ, l’ANEJ et l’OFEJBAN (que vous avez transformé en ANEJ pour étendre son action dans toutes les régions du Sénégal). Pendant 12 ans, ces instruments, n’ont pas su faire face au problème des jeunes. Dans votre budget de 2013, vous allouez seulement allouez 25 millions à l’ANEJ, 359 millions à l’AJEB soit 25 millions par région et rien de nouveau au FNPJ. Il faut penser que ces montants négligeables s’expliquent par le choix du FONGIP ou même du FONSIS comme source de financement des jeunes. Mais là aussi, c’est une surprise de constater que le FONGIP ne dispose que de 5 milliards destinés aux femmes, à l’équipement rural, aux PME et aux jeunes. Ce n’est donc pas un instrument dédié aux jeunes. Au demeurant, financer 30 000 projets de jeunes par an comme vous l’avez déclaré, soit plus de 100 projets par jour pendant 4 ans est tout simplement hors de votre portée. A cela s’ajoute le manque de stratégie tout court en matière d’emploi des jeunes.
Monsieur le Président, ce qui est aussi hors de votre portée de souverain, c’est l’ambition du FONSIS. Taxer le secteur privé pour l’alimenter n’est pas opportun au moment où ce même secteur privé a vu son taux d’imposition hausser et que vous attendez qu’il investisse encore plus pour la création d’emplois. Demander aux partenaires extérieurs de constituer ce fonds, c’est certainement lui enlever son caractère souverain, puisque ces financements seront naturellement conditionnés et porteurs d’intérêts qui vont alourdir nos charges publiques. Car, comme vous le savez Monsieur le Président, l’intérêt annuel sur la dette, rien que pour cette année c’est 175 milliards avec un service total de la dette de 440 milliards. Vous nous proposez de nous endetter encore plus pour une stratégie d’investissement qui n’est pas encore définie, puisque tel est l’objectif du FONSIS. A cet égard, il est aussi bon de rappeler que l’Etat du Sénégal a toujours été un mauvais investisseur des ressources publiques. C’est vrai pour le secteur de l’Education dont les chercheurs de ce pays ont déjà établi qu’’il n’est pas rentable malgré les milliards dépensés. C’est aussi vrai pour le système de santé.
Monsieur le Président, il vous échoit d’avoir une stratégie d’abord avant de préconiser la mise en place d’un tel fonds. Le financement de l’économie dans des pays comme les nôtres requiert des stratégies novatrices et non uniquement la main tendue à nos partenaires extérieurs, encore moins du mimétisme venant de pays à ressources excédentaires.
Monsieur le Président, c’est aussi la main tendue que vous proposez aux sénégalais les plus pauvres. Votre programme de bourses familiales de 100 000 Francs par an et famille, c’est 8000 francs parsemaine, ou tout simplement 300 francs par jour. C’est encore vers ces pauvres que va votre programme CAPSU dont l’appellation d’assurance universelle fait sourire plus d’un. Elle n’a rien d’universel. Elle n’est même pas générale. Elle est tout simplement un plan sésame ciblé sur les pauvres. Mais tous s’accordent que ce programme n’ira pas loin. Ses objectifs restent en tout cas loin de l’objectif d’une assurance universelle. Alors pourquoi ce terme qui ne porte qu’une illusion. L’Etat doit rester une chose sérieuse. Convaincus que l’emploi et la protection sociale sont des piliers essentiels à la cohésion sociale, nous refusons cependant que les citoyens soient leurrés dans la capacité du gouvernement de répondre à ces problèmes par des instruments sans fondement durable et efficace. Les promesses électorales, c’est une chose, la réalité c’est autre chose. Vous devez rectifier cette maladresse.
Monsieur le Président, Le réalisme est d’aller vers des choix durables et soutenables. Le réalisme c’est de relancer la croissance dans le cadre d’une stratégie innovante qui permet de faire face au problème fondamental du financement de l’Economie tout en intégrant l’emploi et la protection sociale au cœur de ce dispositif. Sur ce plan, il faut en revenir à la réalité historique : ce sont les jeunes qui forment le dispositif de relais pour la protection du ménage. Les préparer et les renforcer, c’est renforcer le ménage. Depuis l’aube des temps, c’est le fils qui devient le support de famille du père lorsque celui est en déficit de ressources. Aider les jeunes, c’est aider les ménages dans la dignité. Mais pour cela Monsieur le Président, il faut y croire et mettre les moyens conséquents avec beaucoup de créativité et de vision. Ce n’est pas encore le cas si on compare vos dotations personnelles à celles pour l’emploi des jeunes.
Monsieur le Président, vos huit milliards de fonds politiques par an dépassent de loin le budget de 400 millions que vous avez mis pour l’ANEJ et l’AJEB. Avant la fin de votre mandat, vous aurez consommé en argent de poche 40 milliards dépensés pour vos proches, vos alliés et vous-même. Les pères et mères de familles auront encore sur leurs bras des jeunes en mal d’opportunités lorsque vous leur ferez la promesse d’un deuxième mandat pour achever vos ambitions. Déjà vu et vécu, ils vous diront.
Monsieur le Président, il faut des chantiers productifs qui permettent de mettre en position de formation et d’activité les jeunes du Sénégal. IL ne suffit pas de former les jeunes. Les diplômés de l’université peuvent vous le certifier. Ils doivent se retrouver en position de travail dans des chantiers dont la production contribue directement à la croissance, chantier qui leur permettront de parfaire leur formation et bénéficier d’opportunités réelles au bout de cette expérience de transition. Dans ce sens, malgré votre décision hâtive de conférer au second opérateur une licence, nous maintenons l’opportunité de réserver la quatrième licence de téléphonie au financement de l’emploi des jeunes. Ce financement procurera un montant de 300 milliards sur 15 ans dont 150 à l’octroi et le reste relevant des redevances annuelles. Nous vous proposons aussi de procéder à la désintermédiation des banques du transfert d’argent rapide. L’économie de 5% qui en sera générée permettra de réduire les frais de transfert pour l’opérateur et les bénéficiaires. La moitié de cette économie, estimée à 300 milliards sur 15 ans permettra de renforcer le financement de l’emploi des jeunes. C’est donc 600 milliards qui peuvent être mobilisés pour mettre en place un vaste chantier de formation et de travail pour les jeunes, dans une zone d’éclosion économique et sociale qui sera accompagnée par un service national et la réservation de 30% des marchés publics aux jeunes, soit 40 milliards par an. Le Sénégal Oriental demande à être redynamisé par un tel grand projet qui permettra un investissement total de 3000 milliards sur 10 ans. Cette partie négligée du Sénégal qui représente 30% de la superficie nationale est pourtant si riche de ressources laissées aux mains des étrangers qui pillent ses ressources minières.
Monsieur le Président, les jeunes ne demandent pas à être des cultivateurs. Ce n’est pas seulement l’agriculture qui est source de travail, c’est tous les domaines d’opportunités. Mais pour cela, il faut un espace d’éclosion qui permet à un jeune de parfaire ses talents, d’expérimenter et de mettre en pratique ses ambitions. Cet eldorado doit et peut exister ici au Sénégal. Mais Monsieur le Président, cela ne se fera que lorsque le jeune y verra ses désirs d’avenir. Demander aux jeunes d’aller cultiver la terre ne relève pas du réalisme. Et c’est pour cela Monsieur le Président, que je vous invite à changer de discours ainsi que vos ministres dans la manière d’aborder la question de l’emploi et de l’opportunité des jeunes. La réponse est de fournir un dispositif pour éclore les talents et les ambitions des jeunes en les mettant en phase avec les besoins du pays. Faut-il le rappeler, ce sont les jeunes qui peuvent et doivent porter le projet de transformation économique et sociale de ce pays. Ils peuvent être mis de manière organisée au centre d’un dispositif d’appui au secteur de la production, de la santé, de l’éducation, de la protection sociale, du développement local, de l’énergie verte et des TIC. Cela requiert de la stratégie et un dispositif et non uniquement une démarche au hasard. Nous vous invitons, Monsieur le président de la République à initier cet ambitieux projet dès 2013 avec une affectation de 5 milliards issus de vos fonds politiques. Il vous en restera toujours 3 milliards.
Monsieur le Président, nous avons entendu votre désarroi face au problème de la dette dont vous-même devez assumer une partie. La responsabilité n’est pas de se limiter à une opération de reprofilage comme le préconise le Ministre de l’Economie. Deuk ak Deug, nous disons. Il est temps que les sénégalais sachent que l’Etat ne peut plus continuer à s’endetter pour financer le fonctionnement du système éducatif et du système de santé dans la mesure où ce même Etat est inefficace dans ces domaines.
Nous proposons la mise en concession progressive de ces deux systèmes aux mains de des professionnels de ces secteurs au sein de l’Etat, l’impératif étant tout simplement que les sénégalais continuent d’avoir accès à ces services essentiels. Le secteur de la santé et le secteur de l’Education connaissent déjà un important segment privé. Une forme mixte peut être offerte pour diminuer la place de l’Etat et ses charges qui s’élèvent à près de 400 milliards rien que pour le fonctionnement, compte non tenu des investissements. L’Etat doit se désengager progressivement tout en maintenant pendant 5 ans les investissements dans la construction de nouvelles infrastructures. Ce montant d’investissement tourne autour de 100 milliards par an. Ainsi, l’Etat du Sénégal pourra arrêter l’ascenseur de la dette en économisant près de 400 milliards par an qui pourront être partiellement consacrées aux investissements productifs.
Dans ce schéma, les syndicats de ces secteurs avec leurs membres deviendront les copropriétaires de réseaux de santé et d‘éducation organisés et adossés à des systèmes d’assurances. Seulement alors, nous pourrons aller vers l’assurance universelle. La charte de concession exigera de ces réseaux une présence sur l’ensemble du territoire avec des paquets de services définis sur la base d’un curriculum national unique pour l’éducation. Les concours extérieurs des partenaires (subventions et dons), actuellement d’un montant de 200 milliards chaque année, seront affectés à l’alimentation d’un fonds de financement à des taux concessionnels avec des facilités de remboursement sur 10 ans pour soutenir le développement de ces réseaux de santé et d’éducation.
Pour ceux qui ne peuvent assumer les coûts payants des services éducatifs, l’Etat payera. En contrepartie, ceux qui ne disposent pas de revenus pour payer ces services, pourront ou devront intégrer un programme d’emploi parce que l’Etat sera alors en mesure d’ouvrir des chantiers productifs massifs.
C’est certes un modèle différent de ce que nous faisons depuis 50 ans. Mais qui a dit que ce que nous faisons depuis 50 ans fonctionne ? Il vous appartient monsieur le Président d’oser avancer sur cette voie. Le financement de l’économie ne peut se baser uniquement sur l’endettement. Nous devons faire avec nos propres moyens et oser ce que les autres n’osent pas. Au-delà ce modèle pourra être élargi au secteur de l’assainissement, de l’aménagement d’infrastructures productives, notamment dans le domaine agricole.
Enfin Monsieur le Président, il n’est pas superflu de vous rappeler que la bonne gouvernance commande de fermer les sources d’enrichissement illicite. A ce titre, vos fonds politiques de 8 milliards doivent être encadrés. La cour des comptes doit pouvoir les auditer comme vous l’aviez promis. Etait-ce uniquement une promesse électorale ? Dans le même ordre, nous vous invitons à faire sortir de la Présidence de la République l’ARTP, l’APIX, la délégation à la protection sociale, qui font de cet espace un coffre-fort.
La bonne gouvernance doit commencer par vous-même.
Monsieur le Président, les sénégalais vous ont élu pour un mandat de changement. Osez. Dewenati et que le chemin vous soit éclairé pour un Sénégal de paix, prospère et porteur des désirs d’avenir de sa jeunesse.
Par Amadou Gueye/Nouvelle République