Sénégal: les victimes de Hissène Habré réclament l’avancement de leur dossier

Pour les victimes des crimes d'Hissène Habré, la création de ce groupe de travail ne fera pas avancer le dossier, comme l’exprime Clément Abaïfouta, président de l'Association des victimes d'Hissène Habré.

« Moi je me dis que même s’il y a la bonne volonté, je crois que c’est perdre encore du temps, même si nous disons que Macky Sall n’est pas Abdoulaye Wade. Mais combien de temps prendra ce travail de la commission ? Ça va nous prendre des mois, ça va nous prendre peut-être des années.

Ce qui est essentiel pour nous maintenant, c’est le facteur temps, parce que, en fin de compte, après deux temps et après douze ans de procédures contre Hissène Habré, le Sénégal en fin de compte nous a joué comme un ballon, et très longtemps. Qui dit que ça, ça ne va pas prendre du temps ? Qui va financer ce projet ? La logique aurait aimé que nous attendions tous la décision de la Cour internationale de justice, qui va certainement bientôt tomber, et qu’on envoie Hissène Habré en Belgique.

On me parle d’une fierté africaine, mais cette même fierté n’est-ce pas, cache les tortionnaires, les bourreaux, les auteurs de crimes odieux ! Pour nous, le droit n’a pas de couleur. Nous sommes en train d’être rongés par la douleur. Donc il faudrait que ce soit vite fait. Le Sénégal refuse d’extrader, et aujourd’hui, on me dit qu’il y a une commission. Mais enfin, ça endort un peu là, ça endort ».

« Une violation flagrante de la procédure pénale »

La défense d'Hisséne Habré, de son côté, considère que la création de ce groupe de travail viole la justice. Maître el-Hadj Diouf est l’un des avocats de l'ancien président tchadien.

« C’est une perte de temps de la part du gouvernement, qui sait parfaitement qu’il ne peut pas juger Habré, dès lors que la cour de la Cédéao a pris la décision qui consiste à dire au Sénégal : vous ne pouvez pas juger Hissène Habré. Donc, le gouvernement d’Abdoulaye Wade, comme le gouvernement de Macky Sall, ne peut revenir sur une décision revêtue de l’autorité de la chose jugée. Et le Sénégal est un membre de la Cédéao. Il est tenu de respecter les décisions de la cour de justice de la Cédéao ».

Une autre décision de la Cour internationale de justice (CIJ) de La Haye aux Pays-Bas est attendue suite à la plainte déposée par la Belgique. Ce pays réclame l’extradition de Hissène Habré pour le juger. Mais « la Belgique perd son temps, prévient Me el-Hadj Diouf. La chambre d’accusation de la Cour d’appel de Dakar, qui a compétence pour les demandes d’extradition avait dit niet. Comment la Belgique peut-elle revenir pour demander l’extradition qui avait été rejetée ? Je pense que c’est une violation flagrante de la procédure pénale, ou bien une méconnaissance des règles de procédure d’extradition », conclut-il.
Source: RFI