En une matinée, ils sont une vingtaine à passer timidement la porte de la chambre des blessées. La plupart sont des hommes, la mine inquiète. L'un d'eux présente même une lettre signée par un responsable militaire de la zone pour attester qu'il ne fait pas partie de Boko Haram. Il ne retrouvera pas son épouse.
Zacaria, lui, reconnaît sa soeur, kidnappée lors de l'attaque de leur village de Kwomda il y a plus d'un an : « Quand on a vu les combattants débarquer avec leurs pistolets, on s'est enfui, parce qu'on savait qu'ils nous tireraient dessus. Ils ont tout brûlé, pillé nos maisons, pris nos voitures. C'est à ce moment-là que j'ai perdu ma sœur ».
Des retrouvailles difficiles
Zacaria a beau avoir le sourire, il est ébranlé : sa soeur ne l'a pas reconnu. Un phénomène déjà remarqué par les psychologues qui parlent de lavage de cerveau, chez ces femmes qui pour certaines réclament aujourd'hui de retourner dans la forêt, trop perturbées par ce retour agité avec tant d'attention.
La soeur de Zacaria a été enlevée alors qu'elle venait d'accoucher. Il comprend le traumatisme qu’elle a subi : « Je pense que c'est parce qu'elle n'est pas en bonne santé. A partir du moment où je la vois vivante, je suis heureux et je remercie Dieu de la retrouver avec son jeune enfant. J'ai lu dans les journaux ce qui leur était arrivé, mais je ne lui ai posé aucune question à ce sujet ».
Toutes suivent des consultations psychologiques, beaucoup font une dépression ou souffrent d'un syndrome de stress post-traumatique. A l'hôpital ou au camp, les conditions ne sont pas idéales pour se rétablir. Certaines devraient bientôt être transférées sur des sites plus grands aux dispositifs sanitaires plus développés.