Un journal de la place citant Apanews nous a révélé vendredi 23 avril 2010 que le président de la République a fait don de 75 millions de francs Cfa à la Côte d’Ivoire pour la construction d’une Case des tout-petits. Un journal de la place citant Apanews nous a révélé vendredi 23 avril 2010 que le président de la République a fait don de 75 millions de francs Cfa à la Côte d’Ivoire pour la construction d’une Case des tout-petits. Cette somme, nous apprend-on, doit servir à la construction d’un centre culturel pour enfants, dénommé La Case des tout-petits et qui a pour mission d’initier les enfants de 2 à 6 ans à la culture africaine.
Cela ne nous surprend pas de Wade qui vient ainsi s’illustrer à nouveau négativement dans ce qu’on pourrait appeler son «sport favori», à savoir faire des largesses injustifiées. Il y a quelques semaines, il avait voulu ponctionner les salaires des pauvres «goorgoorlu» sénégalais pour venir en aide aux Haïtiens victimes d’un séisme au moment où ses propres concitoyens habitant la banlieue dakaroise pataugeaient dans des maisons inondées par des eaux saumâtres qui n’ont pu être évacuées depuis la dernière saison des pluies. N’eussent été les vives protestations des travailleurs, nos députés allaient voter la loi autorisant cette ponction les yeux fermés. Nous reviendrons sur eux.
Les feux se sont enfin éteints sur le monument de la Renaissance qui a englouti des milliards malgré les contestations de toutes natures alors que des centaines de Sénégalais meurent chaque année du fait du piteux état de nos routes.
75 millions ! Ce sont des broutilles, me direz-vous, mais uniquement dans le domaine de la santé, cette somme aurait pu offrir à 1 000 malades souffrant d’insuffisance rénale au Sénégal 7 séances gratuites d’hémodialyse. Cette somme aurait pu réparer les appareils de fibroscopie immobilisés à l’hôpital Principal et à l’hôpital de Grand Yoff et en acheter d’autres, tellement la demande est forte dans cette spécialité.
Ce geste de Wade à l’endroit de la Côte d’Ivoire est à interpréter, selon les défenseurs de sa folie des grandeurs, comme une promotion de la coopération sud/sud et comme une forme de rupture de la main tendue. Nous serions moins choqués si cette largesse répondait à un besoin pressant de venir en aide à un moins nanti que nous victime d’un cataclysme, ce qui est loin d’être le cas. La Côte d’Ivoire n’était pas demandeuse du tout.
Notre système éducatif qui souffre de mille maux en avait beaucoup plus besoin, particulièrement dans le domaine de l’équipement. Dans nos écoles (élémentaires et collèges) les élèves s’assoient à 3 voire 4 par table-banc. Les nouveaux collèges de proximité, comme on les appelle, ne disposent d’aucun équipement. Ce sont souvent des abris provisoires. Du fait de leur statut de nouvelle création, ces établissements ne disposent pas de budget et fonctionnent seulement avec les moyens financiers générés par les inscriptions du mois d’octobre. 75 millions auraient permis à la quarantaine de ces nouveaux établissements d’enseignement moyen de se retrouver chacun avec près d’un million huit cent mille francs.
Il est fort à parier que Me Wade n’a pas fait ce don à Gbagbo pour ses «beaux yeux». Il a une idée derrière la tête que nous pouvons aisément deviner. En bon politicien, il se met déjà en perspective de l’inauguration de la toute première Case des tout-petits ivoirienne. Ce sera là une occasion pour lui de pavoiser en territoire étranger, d’en profiter pour vanter sa trouvaille qu’il proposera au monde entier. Le Sénégal ne doit pas se payer le luxe d’investir dans l’éducation d’un autre pays fût-il un voisin et un frère même crédité d’une longue tradition d’amitié et de coopération bilatérale. Nous ne devons pas nous placer dans la situation d’un éternel assisté, mais aussi notre pays a d’autres urgences qui ne sont pas faire du «passar passar» (distribuer à tour de bras) nos maigres ressources. Il est vrai que c’est le mode privilégié de gestion des Libéraux.
«Balayer devant sa porte» ou encore «charité bien ordonnée commence par soi même», voilà deux adages que Wade ignore royalement. Il y a deux ans quand le front social chauffait terriblement chez lui, il a pris son bâton de pèlerin pour aller calmer les émeutiers à Conakry. Au moment où le dialogue social souffre à démarrer chez nous, il est allé au Niger pour jouer au médiateur entre Tandian et les putschistes.
Il respecte beaucoup plus les journalistes étrangers que ceux du Sénégal. Ses déclarations les plus importantes, il les fait à l’extérieur.
Dans l’imagerie populaire de notre pays, un homme qui fait des largesses aux autres en oubliant les siens s’appelle Samba Allaar. Voilà en termes simples l’homme qui préside à nos destinées.
Les militants libéraux de la première heure connaissent bien le maître. Aujourd’hui ils ne valent pas un «kopeck» devant les transhumants. Combien de membres du gouvernement actuel (suivez notre regard) ont combattu Wade et tout fait pour que l’Alternance n’eût pas lieu ?
L’expertise nationale est mise au second plan par rapport à celle étrangère. Les exemples de Bara Tall et de Youssou Ndour sont là pour confirmer cette propension à privilégier l’autre au détriment du plus proche, à compétences égales Si le premierà l’écart de tous les marchés publics au Sénégal et essaie tant bien que mal de se redéployer à l’étranger, le second se voit refuser une télévision qu’on accorderait volontiers à un étranger ami du fils de Wade.
Les Industries chimiques du Sénégal (Ics) ont été bradées aux Indiens à une quarantaine de milliards, c’est-à-dire l’équivalent de «quatre bateaux» comme on le dit familièrement à Darou Khoudoss (lieu d’implantation de l’usine), faisant référence au coût d’un bateau d’acide exporté. Des sénégalais bon teint auraient pu recapitaliser ce fleuron de notre industrie du temps des Socialistes. Là encore on a préféré déshabillé Modou pour habiller Jean (ou… Sabrindranath).
Nos fameux députés, pour revenir à eux, vont probablement voter le 31 mai le projet de loi abrogeant et remplaçant les articles L42 à L47 du Code du travail. Si la disposition selon laquelle «une entreprise peut conclure avec le même travailleur plusieurs Contrats à durée déterminée ou renouveler plus d’une fois un Contrat à durée déterminée» est adoptée ainsi que celles qui la suivent, ce serait la précarisation de l’emploi au Sénégal. Ici encore l’investisseur étranger est privilégié au détriment du travailleur sénégalais.
C’est là, encore une fois la preuve que les députés libéraux font peu cas de l’intérêt national. Par devoir de reconnaissance vis-à-vis de celui qu’ils estiment être le garant de leur mandat, ils se croient obligés de toujours voler au secours du Président en votant les lois les plus impopulaires qui soient.
Ce n’est pas étonnant de leur part. Ils sont la voix de leur maître au propre comme au figuré. Le «samba alaarisme» a de beaux jours dans ce pays !
Amath DIALLO - Enseignant -amathd@yahoo.fr