Le marché mondial du cannabis est estimé à 150 milliards de dollars aujourd’hui. En 2028, ce chiffre aura presque doublé. Si le cannabis est considéré comme un produit d’avenir, le Lesotho en est l’eldorado sur le continent. Depuis la légalisation de la culture de la matekoane (cannabis en langue sotho) il y a deux ans, les montagnes du royaume ont vu débarquer de nombreuses entreprises. Quelques compagnies locales, mais surtout des multinationales américaines, canadiennes et britanniques.
Verve, le dernier groupe à avoir construit un site de production au Lesotho, vient du Royaume-Uni. Au moment de l’inauguration de son usine de production au mois d’août, même le roi Letsie III du Lesotho a fait le déplacement. C’est pour dire l’importance de cette industrie, vue par les autorités comme la principale solution pour moderniser l’une des économies les plus pauvres du monde, classée 159e à l’indice de développement humain.
La vice-ministre de la Santé Manthabiseng Phohleli l’assure : « C’est une énorme opportunité pour un petit pays comme le nôtre. Cela attire les investisseurs, nous avons pour l’instant une dizaine d’entreprises opérationnelles sur le territoire, qui emploient 3 000 personnes. » En faisant payer les licences d’exploitation environ 30 000 euros par an, le gouvernement s’assure une rentrée de liquidités régulière. Il a même été question pendant un temps de multiplier par dix le prix de ces licences, pour profiter pleinement de l’engouement international.
Il faut dire que le royaume de deux millions d’habitants, enclavé au sein du géant sud-africain, présente les conditions idéales pour cultiver du cannabis médicinal. Le pays ne connaît pas d’instabilité politique, la main-d’œuvre y est à bas prix, la licence d’exploitation y est bon marché et les conditions climatiques sont idéales. C’est le seul pays au monde dont toutes les terres sont situées à plus de 1 400 m d’altitude, d’où son surnom de « Royaume dans le Ciel ».
La « Silicon Valley » du cannabis
Pour se rendre sur l’une des plantations de cannabis, il faut plusieurs heures de route à travers les montagnes depuis la capitale Maseru. À Marakabeis, modeste village du centre du pays, l’entreprise Medigrow a posé ses serres agricoles. Dix-huit pour l’instant. « Bientôt plus de deux cents », confie Relebohile Liphoto, chef des opérations. Ici, 3 600 plants de cannabis rectilignement alignés sont entretenus par 300 employés. « Ce que j’ai devant moi, c’est tout simplement l’or vert du Lesotho, continue-t-il. C’est ce qui va permettre le développement du pays. »
Medigrow, c’est une sorte de Silicon Valley du cannabis posée en pleine zone rurale. Il y a une impression d’anachronisme. L’ultra modernité côtoie le Lesotho profond. Relebohile montre du doigt une colline au loin. « C’est là-bas que sera construit l’héliport, pour pouvoir acheminer plus rapidement le cannabis jusqu’à Maseru. » Pour mettre sur pied toutes ces infrastructures, Medigrow a dépensé 17 millions d’euros, un investissement colossal dans un pays qui n’en a pas l’habitude. Et ce n’est pas fini selon le chef des opérations de l’entreprise. « On couvre pour l’instant une surface de 5 000m2. Dans quelques années nous couvrirons environ 90 000m2. »
Des projets à foison
Est-ce alors un investissement immodéré ? Non si l’on en croit les prévisions du marché et surtout le prix du cannabis médicinal. L’huile de CBD, dans le jargon de l’industrie, est un des liquides les plus chers au monde à l’heure actuelle. « Selon les prix, on peut vendre un litre d’huile de cannabis entre 6 000 et 21 000 dollars, assure Relebohile Liphoto ». Environ un millier de litres d’huile de cannabis sortira tous les ans des serres de Medigrow.
Le royaume voit bourgeonner les projets liés à « l’or vert ». Un laboratoire pharmaceutique dernier cri a ouvert ses portes cette année dans la capitale Maseru. Le seul en Afrique à faire de la recherche et développement sur ce cannabis médicinal (ou CBD), une marijuana légale et dépourvue de tout agent psychotrope.
À quelques pas du laboratoire, Matiti Trish Kabi a ouvert son magasin. Son entreprise, AloCann, cultive et transforme le cannabis. « On a toute une gamme de produits, précise-t-elle. Nous avons huit différentes huiles de cannabis, des thés au cannabis, du baume à lèvre au cannabis, des crèmes pour la peau, ou encore un savon. Le produit le plus cher que nous avons c’est l’huile, qui coûte 210 euros pour 10 millilitres. Le moins cher c’est le savon, c’est un peu plus de 10 euros. »
Une petite clientèle s’est déjà formée. Patronella, la quarantaine, souffre de dépression et d’insomnie depuis des années. « J’ai commencé à utiliser les produits il y a quatre mois. À la maison, je bois un thé le soir qui me permet de ne plus avoir d’insomnie, me permet de me relaxer et me fait maigrir. Et le matin j’en prends un qui aide à contrôler ma pression sanguine. » Des produits qui lui coûtent 110 euros par mois, « une économie par rapport à ses frais de médecins et de pharmacie d’avant ». Néanmoins, la somme représente quasiment la moitié du salaire moyen des Basotho.
Un marché qui ne profite pas à tous
Le cannabis est une success story au Lesotho, un nouveau paradis pour industriels. La légalisation profite aussi aux caisses de l’État. Qu’en est-il néanmoins du reste de la population, dont les trois quarts habite dans le Lesotho rural et qui, pour la plupart, font pousser de la marijuana illégalement depuis des décennies ?
Mothiba Thamae et plusieurs petits agriculteurs s’indignent. La licence d’exploitation est tout simplement trop chère pour eux, qui aimeraient bien faire partie de ce marché. « Oui, c’est frustrant, car on espérait que les autorités nous donneraient des licences moins chères pour avoir une opportunité de cultiver. Mais ça a l’air trop compliqué pour eux, lâche-t-il. »
Si Mothiba continue de produire ses fruits et légumes, d’autres ont pris l’option de braver les interdits. Ils cultivent de la marijuana, non médicinale, destinée à être exportée de l’autre côté de la frontière. Cette activité, tolérée pendant longtemps, est désormais contrôlée de plus près par la police. Toute la marchandise s’écoule en Afrique du Sud, seul pays frontalier. L'Office des Nations unies contre la drogue et le crime indique que 70% du cannabis en Afrique du Sud provient des montagnes du Lesotho, où « la marijuana illégale est la troisième source de revenus du royaume ».
Verve, le dernier groupe à avoir construit un site de production au Lesotho, vient du Royaume-Uni. Au moment de l’inauguration de son usine de production au mois d’août, même le roi Letsie III du Lesotho a fait le déplacement. C’est pour dire l’importance de cette industrie, vue par les autorités comme la principale solution pour moderniser l’une des économies les plus pauvres du monde, classée 159e à l’indice de développement humain.
La vice-ministre de la Santé Manthabiseng Phohleli l’assure : « C’est une énorme opportunité pour un petit pays comme le nôtre. Cela attire les investisseurs, nous avons pour l’instant une dizaine d’entreprises opérationnelles sur le territoire, qui emploient 3 000 personnes. » En faisant payer les licences d’exploitation environ 30 000 euros par an, le gouvernement s’assure une rentrée de liquidités régulière. Il a même été question pendant un temps de multiplier par dix le prix de ces licences, pour profiter pleinement de l’engouement international.
Il faut dire que le royaume de deux millions d’habitants, enclavé au sein du géant sud-africain, présente les conditions idéales pour cultiver du cannabis médicinal. Le pays ne connaît pas d’instabilité politique, la main-d’œuvre y est à bas prix, la licence d’exploitation y est bon marché et les conditions climatiques sont idéales. C’est le seul pays au monde dont toutes les terres sont situées à plus de 1 400 m d’altitude, d’où son surnom de « Royaume dans le Ciel ».
La « Silicon Valley » du cannabis
Pour se rendre sur l’une des plantations de cannabis, il faut plusieurs heures de route à travers les montagnes depuis la capitale Maseru. À Marakabeis, modeste village du centre du pays, l’entreprise Medigrow a posé ses serres agricoles. Dix-huit pour l’instant. « Bientôt plus de deux cents », confie Relebohile Liphoto, chef des opérations. Ici, 3 600 plants de cannabis rectilignement alignés sont entretenus par 300 employés. « Ce que j’ai devant moi, c’est tout simplement l’or vert du Lesotho, continue-t-il. C’est ce qui va permettre le développement du pays. »
Medigrow, c’est une sorte de Silicon Valley du cannabis posée en pleine zone rurale. Il y a une impression d’anachronisme. L’ultra modernité côtoie le Lesotho profond. Relebohile montre du doigt une colline au loin. « C’est là-bas que sera construit l’héliport, pour pouvoir acheminer plus rapidement le cannabis jusqu’à Maseru. » Pour mettre sur pied toutes ces infrastructures, Medigrow a dépensé 17 millions d’euros, un investissement colossal dans un pays qui n’en a pas l’habitude. Et ce n’est pas fini selon le chef des opérations de l’entreprise. « On couvre pour l’instant une surface de 5 000m2. Dans quelques années nous couvrirons environ 90 000m2. »
Des projets à foison
Est-ce alors un investissement immodéré ? Non si l’on en croit les prévisions du marché et surtout le prix du cannabis médicinal. L’huile de CBD, dans le jargon de l’industrie, est un des liquides les plus chers au monde à l’heure actuelle. « Selon les prix, on peut vendre un litre d’huile de cannabis entre 6 000 et 21 000 dollars, assure Relebohile Liphoto ». Environ un millier de litres d’huile de cannabis sortira tous les ans des serres de Medigrow.
Le royaume voit bourgeonner les projets liés à « l’or vert ». Un laboratoire pharmaceutique dernier cri a ouvert ses portes cette année dans la capitale Maseru. Le seul en Afrique à faire de la recherche et développement sur ce cannabis médicinal (ou CBD), une marijuana légale et dépourvue de tout agent psychotrope.
À quelques pas du laboratoire, Matiti Trish Kabi a ouvert son magasin. Son entreprise, AloCann, cultive et transforme le cannabis. « On a toute une gamme de produits, précise-t-elle. Nous avons huit différentes huiles de cannabis, des thés au cannabis, du baume à lèvre au cannabis, des crèmes pour la peau, ou encore un savon. Le produit le plus cher que nous avons c’est l’huile, qui coûte 210 euros pour 10 millilitres. Le moins cher c’est le savon, c’est un peu plus de 10 euros. »
Une petite clientèle s’est déjà formée. Patronella, la quarantaine, souffre de dépression et d’insomnie depuis des années. « J’ai commencé à utiliser les produits il y a quatre mois. À la maison, je bois un thé le soir qui me permet de ne plus avoir d’insomnie, me permet de me relaxer et me fait maigrir. Et le matin j’en prends un qui aide à contrôler ma pression sanguine. » Des produits qui lui coûtent 110 euros par mois, « une économie par rapport à ses frais de médecins et de pharmacie d’avant ». Néanmoins, la somme représente quasiment la moitié du salaire moyen des Basotho.
Un marché qui ne profite pas à tous
Le cannabis est une success story au Lesotho, un nouveau paradis pour industriels. La légalisation profite aussi aux caisses de l’État. Qu’en est-il néanmoins du reste de la population, dont les trois quarts habite dans le Lesotho rural et qui, pour la plupart, font pousser de la marijuana illégalement depuis des décennies ?
Mothiba Thamae et plusieurs petits agriculteurs s’indignent. La licence d’exploitation est tout simplement trop chère pour eux, qui aimeraient bien faire partie de ce marché. « Oui, c’est frustrant, car on espérait que les autorités nous donneraient des licences moins chères pour avoir une opportunité de cultiver. Mais ça a l’air trop compliqué pour eux, lâche-t-il. »
Si Mothiba continue de produire ses fruits et légumes, d’autres ont pris l’option de braver les interdits. Ils cultivent de la marijuana, non médicinale, destinée à être exportée de l’autre côté de la frontière. Cette activité, tolérée pendant longtemps, est désormais contrôlée de plus près par la police. Toute la marchandise s’écoule en Afrique du Sud, seul pays frontalier. L'Office des Nations unies contre la drogue et le crime indique que 70% du cannabis en Afrique du Sud provient des montagnes du Lesotho, où « la marijuana illégale est la troisième source de revenus du royaume ».
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