Les faits se déroulent le 21 août 2013, dans la plaine agricole de la Ghoutta, non loin de Damas. En pleine nuit, des habitants sont pris de convulsions et de suffocation, 1 500 d’entre eux décèdent, selon une estimation. Très vite, les vidéos tournées sur le terrain montrent des victimes dont les symptômes sont compatibles avec ceux provoqués par une attaque chimique.
Dans les jours qui suivent, le régime de Bachar el-Assad est accusé, notamment sur la base de deux rapports des renseignements américains et français, selon lesquels cette attaque « massive et coordonnée » a forcément été lancée par le régime. On parle alors d’une opération militaire pour « punir » le régime el-Assad, selon le terme employé par le président français François Hollande. La suite sera toute autre : pas d’opération militaire, mais un accord américano-russe sur le démantèlement de l’arsenal chimique syrien.
Une portée maximale de 2 km
Six mois plus tard, deux experts américains jettent une lumière nouvelle sur ces évènements. Richard Lloyd est un ancien inspecteur de l’ONU spécialiste en armement, et Théodore Postol est professeur de Sciences et de Sécurité internationale au MIT, le Massachusetts Institute of Technology. Les deux spécialistes n’ont pas pu se rendre en Syrie pour des raisons évidentes mais ils ont étudié des photos et des vidéos de l’attaque et ils estiment que le gaz employé pour cette attaque n’a pu être tiré d’une zone contrôlée par le régime.
« Nous avons de nombreuses photos de ces munitions qui ressemblent à des boites de conserve auxquelles aurait été attaché un propulseur de roquette, explique Théodore Postol, joint par RFI et avec un calcul très simple nous pouvons déterminer que cette roquette ne peut pas voler plus de 2 kilomètres. Le tir n’a pas pu venir du centre d’une zone contrôlée par le gouvernement syrien, ni d’aucune zone contrôlée par le gouvernement. Pour cela, il aurait fallu un engin capable de voler au moins 10 kilomètres. »
Cela ne disculpe pas Bachar el-Assad
Cela disculpe-t-il le régime de Bachar el-Assad ? Personne ne peut raisonnablement l’affirmer, d’ailleurs les auteurs de la recherche s’en gardent bien. Ils se contentent de souligner une faille dans les analyses qui ont été brandies à l’époque pour justifier une intervention militaire, même si celle-ci n’a finalement pas eu lieu.
Chercheur associé à la Fondation pour la Recherche Stratégique et spécialiste des armes chimiques, Olivier Lepick estime que les arguments des deux experts américains « ne peuvent être balayés d’un revers de main ». Néanmoins, ils ne font pas changer d’avis ce chercheur français, selon lequel, « la simultanéité des attaques et la quantité de Sarin utilisé rend très peu plausible le fait que la rébellion ait pu mener ces attaques. Je ne crois pas que la rébellion dispose du savoir-faire tactique nécessaire ».
D’autres spécialistes penchent pour une autre lecture. C’est le cas de Fabrice Balanche, maître de conférences à l’Université de Lyon 2, pour qui « ces armes chimiques sont assez facilement utilisables par l’opposition ». Pour ce spécialiste de la Syrie, le scénario d’une attaque menée par des rebelles « a du sens » même si le travail des deux experts « nedisculpe pas pour autant le régime de Bachar el-Assad ». « Il y a un doute… contrairement à ce qu’on avait pu nous dire pour justifier des frappes françaises et américaines sur la Syrie », conclut Fabrice Balanche.
Rappelons enfin que ce sont d’autres armes que les armes chimiques qui tuent tous les jours en Syrie, à commencer par ces barils remplis d’explosifs que l’armée de Bachar el-Assad largue sur les villes qui échappent à son contrôle, notamment Alep, dans le nord. Le conflit en Syrie a fait 140 000 morts en moins de 3 ans, selon le décompte de l’Observatoire syrien des droits de l’homme.
Source : Rfi.fr
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