«Journalisme couché» contre «vindicte»: depuis 24 heures, une passe d'armes oppose Mediapart à Vanity Fair autour de révélations sur l'enquête sur un éventuel financement libyen de la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy en 2007.
Interrogé par la justice française début août, Moussa Koussa aurait déclaré, selon Vanity Fair, que ce document aurait été «falsifié» et que sa signature était «fausse», et a accusé l'ancien premier ministre de Kadhafi, Baghdadi al Mahmoudi, actuellement emprisonné à Tripoli, d'être l'auteur du faux. Le site pointe néanmoins une déclaration «équivoque» de Koussa au cours de la même audition:
Le même jour, Mediapart publie à l’inverse un article (en accès payant) affirmant que les juges «ont justement accumulé ces derniers mois de nombreux éléments qui confortent [l']authenticité» du document en question, que le site avait publié entre les deux tours de la présidentielle 2012. À l’appui de ses dires, il cite un rapport de synthèse de gendarmerie affirmant que le document «présente toutes les caractéristiques de forme des pièces produites par le gouvernement libyen de l’époque» et que «le fonctionnement institutionnel libyen que suggère le document n’est pas manifestement irréaliste».
Selon Mediapart, l’audition de Moussa Koussa aurait donné lieu à l’échange suivant (qui ressemble à la déclaration «équivoque» que rapporte Vanity Fair):
Il affirme notamment que le rapport de gendarmerie cité par ses confrères n’analyse que «les caractéristiques de forme» du document mais pas le fond, et ajoute que le fait qu’un document falsifié ressemble à un document officiel, «on en conviendra, est la base de toute falsification». Il cite notamment dans ce sens un ancien ambassadeur de France en Libye, Jean-Luc Sibiude, qui, devant les juges, a estimé que le document pouvait être «un vrai faux».
L'ancien chef de l'État avait déposé plainte en 2012 contre Mediapart pour «faux, usage de faux et publication de fausse nouvelle».
Episode 1: le «soupçon d'une falsification»
Tout a commencé vendredi 26 septembre au matin, avec la publication par Vanity Fair d’un article expliquant que les derniers éléments recueillis par les juges d'instruction René Cros et Emmanuelle Legrand «renforcent le soupçon d'une falsification» du document accusant Nicolas Sarkozy d’avoir reçu de Mouammar Kadhafi un financement de 52 millions d’euros pour sa campagne, un compte-rendu d'une réunion qui aurait eu lieu le 6 octobre 2006 en présence notamment de l'ancien chef des services de renseignements libyens, Moussa Koussa, du principal collaborateur de Kadhafi, Bechir Saleh, de Brice Hortefeux et de l'intermédiaire libanais Ziad Takieddine.Interrogé par la justice française début août, Moussa Koussa aurait déclaré, selon Vanity Fair, que ce document aurait été «falsifié» et que sa signature était «fausse», et a accusé l'ancien premier ministre de Kadhafi, Baghdadi al Mahmoudi, actuellement emprisonné à Tripoli, d'être l'auteur du faux. Le site pointe néanmoins une déclaration «équivoque» de Koussa au cours de la même audition:
«Je ne vous ai pas dit que c'était faux ou pas faux. Il y a ce qui est mentionné sur ce document et quelqu'un qui a mis une fausse signature en dessous, à vous d'enquêter.»
Episode 2: l'authenticité du document «confortée»
Selon Mediapart, l’audition de Moussa Koussa aurait donné lieu à l’échange suivant (qui ressemble à la déclaration «équivoque» que rapporte Vanity Fair):
«Le contenu n’est pas faux, mais la signature est fausse. Ce n’est pas moi qui ai signé.
–Qu’est-ce qui n’est pas faux dans ce document?
– Son origine, son contenu, c’est ça. Le contenu de ce document, c’est ça qui est dangereux. C’est à vous de savoir si c’est un faux ou un vrai. Je ne vous ai pas dit que c’était faux ou pas. Il y a ce qui est mentionné dans ce document et quelqu’un qui a mis une fausse signature en dessous, à vous d’enquêter.»
Épisode 3: «sérénité» contre «vindicte»
Hervé Gattegno, l'auteur de l'article de Vanity Fair, a ensuite réagi à cet article dans un nouveau papier où il estime qu’entre son média et Mediapart, l’un «présente les faits d’une manière sereine et équilibrée» et l’autre «poursuit une vindicte au service de laquelle tous les coups sont permis».Il affirme notamment que le rapport de gendarmerie cité par ses confrères n’analyse que «les caractéristiques de forme» du document mais pas le fond, et ajoute que le fait qu’un document falsifié ressemble à un document officiel, «on en conviendra, est la base de toute falsification». Il cite notamment dans ce sens un ancien ambassadeur de France en Libye, Jean-Luc Sibiude, qui, devant les juges, a estimé que le document pouvait être «un vrai faux».
Épisode 4: «le pot de colle et les ciseaux»
Dernier épisode en date (pour l'instant...): Karl Laske, un des enquêteurs de Mediapart, a publié un billet de blog accusant son confrère de pratiquer «le journalisme couché» et d’avoir pris «son pot de colle et ses ciseaux» pour faire le point sur l’enquête des juges. Il l’accuse notamment implicitement d’avoir été manipulé par l’entourage de Nicolas Sarkozy, l'ancien président ayant récemment affirmé dans le Journal du dimanche, à l'occasion de son retour officiel en politique, que «sur la Libye, les juges savent que les documents sont faux».L'ancien chef de l'État avait déposé plainte en 2012 contre Mediapart pour «faux, usage de faux et publication de fausse nouvelle».
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