Franck Ribéry abandonne l’équipe de France au même âge que Michel Platini. Mais Platini, lui, avait tout arrêté, à 31 ans sonnés. Ribéry aurait eu 33 ans à l’Euro 2016. Un an de moins que Zinédine Zindane quand il vit débarquer un certain Ribéry Franck chez les Bleus, avec une finale de Coupe du monde au bout de l’aventure. Trois de moins que le champion du monde allemand Miroslav Klose. Ribéry ne lâche pas les Bleus parce qu’il est trop vieux.
Franck Ribéry abandonne l’équipe de France sans que le sélectionneur l’ait décidé à sa place, ce qui fait une différence notoire avec le cas de Samir Nasri, l’autre auto-retraité du moment. Ribéry figurait évidemment dans la première liste des vingt-trois pour la Coupe du monde au Brésil. Il avait su se rendre indispensable sous le mandat de Deschamps après un Euro 2012 individuellement sans tâche sous l’ère Laurent Blanc. Il ne lâche pas les Bleus parce qu’on ne voulait plus de lui.
Il avait sa place, il pouvait appréhender la concurrence...
Franck Ribéry abandonne l’équipe de France alors qu’il en était un titulaire non contesté, sur ce côté gauche qu’il avait enfin conquis après être allé jusqu’à saboter quelques prestations pour l’obtenir, dans un 4-3-3 où ses qualités premières avaient tout pour s’exprimer. Contre l’Ukraine, match fondateur de l’équipe façonnée par Deschamps, il avait été énorme, comme les autres. Ribéry ne quitte pas les Bleus parce qu’il n’a pas sa place dans l’équipe.
Franck Ribéry abandonne l’équipe de France au sortir d’un Mondial où celle-ci a réalisé un beau quart de finale sans lui, où son souffle restauré a séduit, où la fraîcheur d’Antoine Griezmann à son poste de milieu offensif gauche fut un spectacle agréable. Mais si un finaliste du dernier Ballon d’Or se met à lâcher face à la concurrence d’un garçon qui possède une seule campagne de Ligue des champions derrière lui, on peut s’inquiéter pour sa faculté à se mesurer à Robben, Götze (voire Müller) dans la concurrence interne au Bayern Munich. Ribéry ne quitte pas les Bleus parce qu’il n’était plus assez fort pour rester titulaire.
Il n'aura pas ses cent sélections en dix ans
Franck Ribéry abandonne l’équipe de France avant deux saisons quasi complètes de matches sans enjeu. Mais un joueur comme lui aurait su présenter des certificats médicaux en toc pour souffler comme il se doit au moment des rencontres les plus exotiques. D’autres joueurs de son statut l’ont fait. Et il serait rendu disponible pour affronter l’Espagne ou le Portugal, entre autres, des matches à sa dimension. Empiler les rencontres sans enjeu avec la sélection, sinon celui d'affiner les réglages et susciter l'élan populaire, Zidane l’a fait, Blanc l’a fait, Deschamps l’a fait. Tous l’ont fait avant la Coupe du monde 1998. On voudrait nous faire croire que ces matches amicaux ne sont pas assez bien pour Franck Ribéry? Ribéry, 81 sélections, ne quitte pas les Bleus parce qu’il n’y avait pas matière à exaucer son rêve d’une carrière internationale à cent sélections sur dix ans ; le genre de "doublé" qui laisse une vraie trace dans l'histoire.
Franck Ribéry abandonne l’équipe de France avec le genou qui couine mais avec le dos visiblement impeccable. Ce dos que le staff des Bleus n’a pas su soigner avant d’embarquer pour le Brésil, ses piqûres de cortisone étant manifestement moins prometteuses que celles du docteur Müller-Wohlfahrt. Ce fut la mini-polémique du Mondial côté tricolore. Mais quand on s’est remis de Knysna, on peut sans problème enterrer le souvenir d’une guéguerre de mots autour d’une lombalgie. Il suffit d’une conférence de presse de rentrée patronnée par Philippe Tournon et le tour est joué. Franck Ribéry ne quitte pas les Bleus parce qu’il est incapable de soutenir le regard de Franck Le Gall, le médecin qui s’occupe de l’équipe à Clairefontaine.
A trente-cinq ans, Ribéry pourra passer sept jours sur sept avec sa famille
Franck Ribéry abandonne l’équipe de France en nous affirmant qu’il souhaite passer plus de temps avec sa famille, ce qui le rapproche probablement de chacun d’entre nous et chacun d’entre vous. Or, comme le rapportait l’ex-sélectionneur Michel Hidalgo à la radio mercredi soir, a priori, quand on choisit une carrière de sport de haut niveau, c’est qu’on se rend disponible pour participer aux matches organisés pour son équipe. Comme chaque footballeur, Ribéry n’est mobilisé que quelques heures par jour par son métier, parfois une petite demi-journée. Il aura la chance d’être disponible pour sa famille sept jours sur sept dès ses crampons raccrochés, dans deux ou trois ans, ce qui fait déjà de lui un privilégié. Ribéry ne quitte pas les Bleus avec une excuse valable.
Franck Ribéry abandonne les Bleus et le réel moteur de cette décision semble, à chaud, quelque peu confus. "Il faut savoir quand il faut s'arrêter. On a vu qu'il n'y avait pas de souci à se faire pour l'avenir de l'équipe de France lors de la Coupe du monde." Voilà pour la version officielle, délivrée dans les colonnes de Kicker, certifiée "le bon sens près de chez vous". Même si cette nouvelle n’est pas exactement un tremblement de terre, même si Didier Deschamps avait déjà eu à répondre à des questions sur l’avenir de Ribéry avec les Bleus, il nous manque quelque chose pour comprendre. On a raté un épisode. On ne relève pas le vrai élément déclencheur. On ne sent pas la cassure. On ne voit pas l’absence de perspective. D’ailleurs il faut bien la chercher, celle-là, quand on est Français et que l’Euro à domicile se prépare.
Voilà le goût qu’a eu le maillot de l’équipe de France pour Ribéry dès ses premières foulées : celui d’un rêve éveillé
Le chaînon manquant est à trouver me semble-t-il dans l’itinéraire de Ribéry chez les Bleus, un itinéraire marqué au fer rouge par son entrée fracassante dans les rangs de la sélection, au printemps 2006. Quand Ribéry entrait en jeu, à quelques jours du départ vers la Coupe du monde en Allemagne, c’était comme si les autres joueurs sur la pelouse avaient une caravane dans le dos, comme quand Astérix s’enfile une gorgée de potion magique, comme si un vrai joueur de football nourri au dribble et à l’attaque à tout-va des années 50 se retrouvait téléporté dans une partie d’échecs. C’était un peu de Technicolor dans un monde de brutes. Des séquences où l’expression-bateau "apporter quelque chose à l'équipe" prenait sens aux yeux de tous. Le public adorait. Les médias suivaient. Les partenaires adoubaient. Ribéry planait.
Quand Ribéry s’est fait une place en équipe de France - il fait partie des rares à avoir récolté une première titularisation en phase finale de Coupe du monde - c’est Zidane qui lui donnait les ballons, c’est sur Henry qu’il fallait centrer, c’est Makelele et Vieira qui couvraient les percées bille en tête, c’est avec Sagnol qu’il fallait dédoubler. Tout semblait possible. Ribéry se moquait bien d’officier côté droit : il effectuait tous les efforts, et même plus, pour mériter sa place au milieu d’idoles qui étaient aussi les siennes et qui faillirent faire de lui un vainqueur de Coupe du monde à vingt-trois ans et dix sélections. Voilà le goût qu’a eu le maillot de l’équipe de France pour Ribéry dès ses premières foulées. Celui d’un rêve éveillé.
Revivre ça, son obsession avouée
Le temps que Ribéry a passé ensuite sous le maillot bleu, il ne l’a passé que pour revivre cette intensité-là. Il n’y est jamais parvenu. Il s’esquive au moment où il réalise qu’il n’y arrivera jamais.
Il est impossible de comprendre les grands moments de flottement de Ribéry sous le maillot des Bleus - et ils furent nombreux - sans mesurer la responsabilité du souvenir chéri de 2006 dans toutes ses aspirations. L’idée de revivre ça l’obsédait, elle revenait dans de nombreuses interview, quel que soit le contexte, toujours extrêmement mouvant entre lui et le Coq. La volonté d’être le leader technique d’une équipe orpheline de Zidane - avec qui il aura joué seulement six semaines - l’aveuglait. On le vit se déclarer candidat au brassard de capitaine dès 2009 alors que rien ne l’y prédisposait dans son CV.
En 2006, Ribéry s’était senti fort, il avait été bouleversé par l’amour des gens, le respect des partenaires, la confiance du sélectionneur. Il voulait la même chose en mieux, la même chose avec lui au centre de la scène et, un jour c’est sûr, le trophée au bout des doigts. Il l’a voulu si fort qu’il en est venu à se perdre dans des considérations strictement individuelles, des batailles d’ego, des luttes pour se fixer au poste qui, pensait-il, était le seul capable de laisser jaillir son talent. Les regrets larmoyants sur le plateau de Téléfoot en tongs, c’est la douleur de sentir que le feeling de 2006 est à des années-lumières du bunker sud-africain. Les longs mois à errer avec les Bleus comme si le maillot pesait trois tonnes, c’est la responsabilité auto-proclamée d’être le joueur qui fera basculer le match. Mieux : d’être un exemple aux yeux des autres comme Zidane l’avait été aux siens à son arrivée chez les Bleus. Et mieux encore : de communier avec la foule à ce titre-là.
Le Bayern est ce qui lui est arrivé de mieux, il va tout lui donner
Sur les ruines de l’affaire Zahia et de l’épisode Knysna, qui forment un bloc dans sa carrière en 2010, Ribéry s’est relancé avec deux espoirs suprêmes en ligne de mire : remporter le Ballon d’Or et la Coupe du monde. Sa troisième place derrière Ronaldo et Messi, il y a huit mois, aura été une petite mort après une saison parfaite avec le Bayern, qu’il lui sera probablement impossible de reproduire. Restait la Coupe du monde. Elle s’est refusée à lui dans des circonstances forcément douloureuses (une blessure), dans un contexte de polémique médicale (une polémique de plus…) et qui vit sa deuxième famille, l’Allemagne, et son noyau dur, le Bayern, imposer sa supériorité aux Bleus puis au monde.
Au moment de commencer sa huitième saison à Munich, Ribéry réalise qu’il ne revivra jamais un été aussi intense en sélection que cet été 2006 presque parfait. Il sera trop âgé pour la Coupe du monde 2018, qui n’aura pas le charme d’une Coupe du monde au Brésil. Il n’a pas assez de bons souvenirs à l’Euro, ni en France, pour faire de l’échéance 2016 un but à la hauteur de sa sensibilité d’écorché vif. Sa famille dans le foot, c’est désormais le Bayern. C’est d’Allemagne que Ribéry a dit adieu au maillot national. "L’équipe de France est la plus belle chose qui me soit arrivé dans ma carrière", disent souvent les ex de la génération 1998 et 2000, Deschamps et Zidane en tête. Ribéry avait le désir brûlant de pouvoir affirmer la même chose. Il a frôlé ce sentiment de plénitude, mais frôlé seulement. La meilleure chose qui sera arrivé à la carrière de Ribéry, c’est le Bayern. Il en a pris acte. Bille en tête, comme à chaque temps fort de sa carrière.
Franck Ribéry abandonne l’équipe de France sans que le sélectionneur l’ait décidé à sa place, ce qui fait une différence notoire avec le cas de Samir Nasri, l’autre auto-retraité du moment. Ribéry figurait évidemment dans la première liste des vingt-trois pour la Coupe du monde au Brésil. Il avait su se rendre indispensable sous le mandat de Deschamps après un Euro 2012 individuellement sans tâche sous l’ère Laurent Blanc. Il ne lâche pas les Bleus parce qu’on ne voulait plus de lui.
Il avait sa place, il pouvait appréhender la concurrence...
Franck Ribéry abandonne l’équipe de France alors qu’il en était un titulaire non contesté, sur ce côté gauche qu’il avait enfin conquis après être allé jusqu’à saboter quelques prestations pour l’obtenir, dans un 4-3-3 où ses qualités premières avaient tout pour s’exprimer. Contre l’Ukraine, match fondateur de l’équipe façonnée par Deschamps, il avait été énorme, comme les autres. Ribéry ne quitte pas les Bleus parce qu’il n’a pas sa place dans l’équipe.
Franck Ribéry abandonne l’équipe de France au sortir d’un Mondial où celle-ci a réalisé un beau quart de finale sans lui, où son souffle restauré a séduit, où la fraîcheur d’Antoine Griezmann à son poste de milieu offensif gauche fut un spectacle agréable. Mais si un finaliste du dernier Ballon d’Or se met à lâcher face à la concurrence d’un garçon qui possède une seule campagne de Ligue des champions derrière lui, on peut s’inquiéter pour sa faculté à se mesurer à Robben, Götze (voire Müller) dans la concurrence interne au Bayern Munich. Ribéry ne quitte pas les Bleus parce qu’il n’était plus assez fort pour rester titulaire.
Il n'aura pas ses cent sélections en dix ans
Franck Ribéry abandonne l’équipe de France avant deux saisons quasi complètes de matches sans enjeu. Mais un joueur comme lui aurait su présenter des certificats médicaux en toc pour souffler comme il se doit au moment des rencontres les plus exotiques. D’autres joueurs de son statut l’ont fait. Et il serait rendu disponible pour affronter l’Espagne ou le Portugal, entre autres, des matches à sa dimension. Empiler les rencontres sans enjeu avec la sélection, sinon celui d'affiner les réglages et susciter l'élan populaire, Zidane l’a fait, Blanc l’a fait, Deschamps l’a fait. Tous l’ont fait avant la Coupe du monde 1998. On voudrait nous faire croire que ces matches amicaux ne sont pas assez bien pour Franck Ribéry? Ribéry, 81 sélections, ne quitte pas les Bleus parce qu’il n’y avait pas matière à exaucer son rêve d’une carrière internationale à cent sélections sur dix ans ; le genre de "doublé" qui laisse une vraie trace dans l'histoire.
Franck Ribéry abandonne l’équipe de France avec le genou qui couine mais avec le dos visiblement impeccable. Ce dos que le staff des Bleus n’a pas su soigner avant d’embarquer pour le Brésil, ses piqûres de cortisone étant manifestement moins prometteuses que celles du docteur Müller-Wohlfahrt. Ce fut la mini-polémique du Mondial côté tricolore. Mais quand on s’est remis de Knysna, on peut sans problème enterrer le souvenir d’une guéguerre de mots autour d’une lombalgie. Il suffit d’une conférence de presse de rentrée patronnée par Philippe Tournon et le tour est joué. Franck Ribéry ne quitte pas les Bleus parce qu’il est incapable de soutenir le regard de Franck Le Gall, le médecin qui s’occupe de l’équipe à Clairefontaine.
A trente-cinq ans, Ribéry pourra passer sept jours sur sept avec sa famille
Franck Ribéry abandonne l’équipe de France en nous affirmant qu’il souhaite passer plus de temps avec sa famille, ce qui le rapproche probablement de chacun d’entre nous et chacun d’entre vous. Or, comme le rapportait l’ex-sélectionneur Michel Hidalgo à la radio mercredi soir, a priori, quand on choisit une carrière de sport de haut niveau, c’est qu’on se rend disponible pour participer aux matches organisés pour son équipe. Comme chaque footballeur, Ribéry n’est mobilisé que quelques heures par jour par son métier, parfois une petite demi-journée. Il aura la chance d’être disponible pour sa famille sept jours sur sept dès ses crampons raccrochés, dans deux ou trois ans, ce qui fait déjà de lui un privilégié. Ribéry ne quitte pas les Bleus avec une excuse valable.
Franck Ribéry abandonne les Bleus et le réel moteur de cette décision semble, à chaud, quelque peu confus. "Il faut savoir quand il faut s'arrêter. On a vu qu'il n'y avait pas de souci à se faire pour l'avenir de l'équipe de France lors de la Coupe du monde." Voilà pour la version officielle, délivrée dans les colonnes de Kicker, certifiée "le bon sens près de chez vous". Même si cette nouvelle n’est pas exactement un tremblement de terre, même si Didier Deschamps avait déjà eu à répondre à des questions sur l’avenir de Ribéry avec les Bleus, il nous manque quelque chose pour comprendre. On a raté un épisode. On ne relève pas le vrai élément déclencheur. On ne sent pas la cassure. On ne voit pas l’absence de perspective. D’ailleurs il faut bien la chercher, celle-là, quand on est Français et que l’Euro à domicile se prépare.
Voilà le goût qu’a eu le maillot de l’équipe de France pour Ribéry dès ses premières foulées : celui d’un rêve éveillé
Le chaînon manquant est à trouver me semble-t-il dans l’itinéraire de Ribéry chez les Bleus, un itinéraire marqué au fer rouge par son entrée fracassante dans les rangs de la sélection, au printemps 2006. Quand Ribéry entrait en jeu, à quelques jours du départ vers la Coupe du monde en Allemagne, c’était comme si les autres joueurs sur la pelouse avaient une caravane dans le dos, comme quand Astérix s’enfile une gorgée de potion magique, comme si un vrai joueur de football nourri au dribble et à l’attaque à tout-va des années 50 se retrouvait téléporté dans une partie d’échecs. C’était un peu de Technicolor dans un monde de brutes. Des séquences où l’expression-bateau "apporter quelque chose à l'équipe" prenait sens aux yeux de tous. Le public adorait. Les médias suivaient. Les partenaires adoubaient. Ribéry planait.
Quand Ribéry s’est fait une place en équipe de France - il fait partie des rares à avoir récolté une première titularisation en phase finale de Coupe du monde - c’est Zidane qui lui donnait les ballons, c’est sur Henry qu’il fallait centrer, c’est Makelele et Vieira qui couvraient les percées bille en tête, c’est avec Sagnol qu’il fallait dédoubler. Tout semblait possible. Ribéry se moquait bien d’officier côté droit : il effectuait tous les efforts, et même plus, pour mériter sa place au milieu d’idoles qui étaient aussi les siennes et qui faillirent faire de lui un vainqueur de Coupe du monde à vingt-trois ans et dix sélections. Voilà le goût qu’a eu le maillot de l’équipe de France pour Ribéry dès ses premières foulées. Celui d’un rêve éveillé.
Revivre ça, son obsession avouée
Le temps que Ribéry a passé ensuite sous le maillot bleu, il ne l’a passé que pour revivre cette intensité-là. Il n’y est jamais parvenu. Il s’esquive au moment où il réalise qu’il n’y arrivera jamais.
Il est impossible de comprendre les grands moments de flottement de Ribéry sous le maillot des Bleus - et ils furent nombreux - sans mesurer la responsabilité du souvenir chéri de 2006 dans toutes ses aspirations. L’idée de revivre ça l’obsédait, elle revenait dans de nombreuses interview, quel que soit le contexte, toujours extrêmement mouvant entre lui et le Coq. La volonté d’être le leader technique d’une équipe orpheline de Zidane - avec qui il aura joué seulement six semaines - l’aveuglait. On le vit se déclarer candidat au brassard de capitaine dès 2009 alors que rien ne l’y prédisposait dans son CV.
En 2006, Ribéry s’était senti fort, il avait été bouleversé par l’amour des gens, le respect des partenaires, la confiance du sélectionneur. Il voulait la même chose en mieux, la même chose avec lui au centre de la scène et, un jour c’est sûr, le trophée au bout des doigts. Il l’a voulu si fort qu’il en est venu à se perdre dans des considérations strictement individuelles, des batailles d’ego, des luttes pour se fixer au poste qui, pensait-il, était le seul capable de laisser jaillir son talent. Les regrets larmoyants sur le plateau de Téléfoot en tongs, c’est la douleur de sentir que le feeling de 2006 est à des années-lumières du bunker sud-africain. Les longs mois à errer avec les Bleus comme si le maillot pesait trois tonnes, c’est la responsabilité auto-proclamée d’être le joueur qui fera basculer le match. Mieux : d’être un exemple aux yeux des autres comme Zidane l’avait été aux siens à son arrivée chez les Bleus. Et mieux encore : de communier avec la foule à ce titre-là.
Le Bayern est ce qui lui est arrivé de mieux, il va tout lui donner
Sur les ruines de l’affaire Zahia et de l’épisode Knysna, qui forment un bloc dans sa carrière en 2010, Ribéry s’est relancé avec deux espoirs suprêmes en ligne de mire : remporter le Ballon d’Or et la Coupe du monde. Sa troisième place derrière Ronaldo et Messi, il y a huit mois, aura été une petite mort après une saison parfaite avec le Bayern, qu’il lui sera probablement impossible de reproduire. Restait la Coupe du monde. Elle s’est refusée à lui dans des circonstances forcément douloureuses (une blessure), dans un contexte de polémique médicale (une polémique de plus…) et qui vit sa deuxième famille, l’Allemagne, et son noyau dur, le Bayern, imposer sa supériorité aux Bleus puis au monde.
Au moment de commencer sa huitième saison à Munich, Ribéry réalise qu’il ne revivra jamais un été aussi intense en sélection que cet été 2006 presque parfait. Il sera trop âgé pour la Coupe du monde 2018, qui n’aura pas le charme d’une Coupe du monde au Brésil. Il n’a pas assez de bons souvenirs à l’Euro, ni en France, pour faire de l’échéance 2016 un but à la hauteur de sa sensibilité d’écorché vif. Sa famille dans le foot, c’est désormais le Bayern. C’est d’Allemagne que Ribéry a dit adieu au maillot national. "L’équipe de France est la plus belle chose qui me soit arrivé dans ma carrière", disent souvent les ex de la génération 1998 et 2000, Deschamps et Zidane en tête. Ribéry avait le désir brûlant de pouvoir affirmer la même chose. Il a frôlé ce sentiment de plénitude, mais frôlé seulement. La meilleure chose qui sera arrivé à la carrière de Ribéry, c’est le Bayern. Il en a pris acte. Bille en tête, comme à chaque temps fort de sa carrière.
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