Après quinze ans de prison dont dix à l’isolement total, torturé lui et sa femme sous Ben Ali, Ali Larayadh fait partie de ces hauts cadres historiques d’Ennahda. Un pragmatique à la légitimité suffisante pour apaiser la crise interne et faire le pont entre les multiples courants du parti islamiste tunisien.
Un an après la révolution et la victoire de son parti aux élections d’octobre 2011, nommé ministre de l’Intérieur Ali Larayedh devient supérieur hiérarchique de ses anciens geôliers. Après quatorze mois en poste, l’opposition qui a demandé sa démission, à plusieurs reprises à l’Assemblée, juge son bilan sévèrement.
En septembre dernier, de nombreux députés pointent les négligences de ses services après l’attaque de l’ambassade américaine de Tunis. Même critique après l’assassinat de Chokri Belaïd, le 6 février dernier.
Mais c’est de la mouvance salafiste que le ressentiment est le plus grand. Sous Ali Larayedh, une dizaine de jeunes salafistes sont, en effet, décédés dans des affrontements avec la police.
Hier, dans les rues de Sidi-Bouzid, berceau de la révolution, un millier d’entre eux manifestaient justement contre Ali Larayedh après la mort de l’un des leurs le matin même dans des affrontements armés avec les forces de l’ordre tunisiennes.
La classe politique partagée sur le choix d'Ali Larayedh
Au sein de la troïka, la coalition qui dirigeait jusqu'ici la Tunisie, le parti Ettakatol avait soutenu ces dernières semaines le projet d'un gouvernement de techniciens avancé par Hamadi Jebali. Ettakatol se dit cependant satisfait de cette désignation d'Ali Larayedh comme chef du gouvernement. Mohamed Bennour, porte-parole du parti, déclare :
« La désignation d’Ali Larayedh pour former le prochain gouvernement est un bon choix. C’est un homme d’équilibre qui s’est habitué en tant que ministre de l’Intérieur aux rouages de l’Etat. Il est connu comme appartenant à l’aile modérée du parti Ennahda. C’est aussi un homme de compromis ».
Le principal parti d'opposition, Nida Tunes ne commente pas pour sa part le choix d’Ali Larayedh. Le parti craint simplement que l'échec du projet de gouvernement de techniciens ne conduise à la mise en place d'une équipe trop politicienne.
Taieb Baccouche, porte-parole de Nida Tunes : « On sait déjà dans quel esprit il va être former. C’est un gouvernement de parti dominé par certains partis qui veulent dominer l’administration, l’Etat, la police et tout dans le pays. Il ne va pas du tout résoudre les problèmes. Il va, au contraire, les accentuer ».
Ali Larayedh dispose de deux semaines, à compter de sa nomination officielle pour former son gouvernement. Il devra ensuite obtenir la confiance de l'Assemblée constituante, ce qui s'annonce sans grande difficulté. Ennahda détient 89 députés sur les 217 de l'Assemblée et peut compter sur les voix de ses alliés politiques.
Dépêche RFI
Autres articles
-
Tchad : le Président Mahamat Idriss Déby promu maréchal
-
Mali: 26 personnes tuées dans des attaques jihadistes près de Bandiagara
-
Le Burkina Faso adopte une loi d’amnistie pour les auteurs du putsch de 2015
-
Guerre au Soudan: plus de 780 civils tués par des paramilitaires à El-Fasher, selon l'ONU
-
Guinée: la recherche des disparus du stade de N'Zérékoré se poursuit