Les ministres tchadiens de la Justice et de la Communication sont venus à Dakar « pour appuyer les Chambres africaines extraordinaires », un tribunal que le Tchad finance avec d'autres pays à hauteur de 3 millions d'euros (2 milliards de francs CFA). Lors d’une conférence organisée dans la capitale sénégalaise ce mercredi, au lendemain del'ajournement du procès Habré, le ministre tchadien de la Justice, Mahamat Issa Halikimi, a rappelé que le procès n'aurait pas pu avoir lieu si son pays n'avait pas levé l'immunité de l'ancien président. Après avoir renversé Hissène Habré, Idriss Déby avait par ailleurs mis en place une commission d'enquête qui avait révélé l'ampleur des crimes du régime précédent.
« Dès la création de ces dernières, [le Tchad] a signé un accord de coopération avec la République du Sénégal pour faciliter les missions d’investigation des Chambres et aussi, leur a accordé toute l’assistance légale et judiciaire. S’il se reprochait quelque chose, s’il avait un doute sur l’issue du procès, il n’aurait pas fait tous ces investissements, pris tous ces engagements », écrit le gouvernement tchadien dans un communiqué rendu public à l’issue de la conférence de presse.
Complices condamnés au Tchad
Hassan Sylla, ministre de la Communication et porte-parole du gouvernement tchadien, a pour sa part rappelé que d'anciens cadres de la police politique d'Hissène Habré avaient été condamnés au Tchad. « Tous les anciens de la DDS qui ont été cités et accusés sont passés devant la cour criminelle », a insisté Hassan Sylla. « Les plus célèbres ont été condamnés à la perpétuité. D'autres ont écopé de 20 ans, d'autres de 15 ans », a détaillé le ministre tchadien pour qui « tous ceux qui ont été cités et qui sont au Tchad n'ont pas échappé aux mailles des filets de la justice. »
De fait, dans le procès de 28 responsables de la DDS, la police politique du régime de Hissène Habré, les condamnations prononcées le 25 mars dernier à Ndjamena ont été lourdes. Sept accusés ont écopé des travaux forcés à perpétuité, dont Saleh Younous, premier directeur de la DDS, et Mahamat Djibrine, dit « El Djonto », présenté comme un tortionnaire. Les autres ont été condamnés à des peines de prison, hormis quatre inculpés qui ont finalement été acquittés et cinq personnes, décédées avant la fin du procès, pour lesquelles l’action judiciaire s’était éteinte.
Volonté de contrôle
Néanmoins, tout au long de la procédure judiciaire, le Tchad - dont la constitution en tant que partie civile n'a pas été retenue dans le procès qui s'est ouvert lundi - a toujours voulu maintenir un certain contrôle sur le procès d’Hissène Habré. Les Chambres extraordinaires ont même critiqué le manque de coopération des institutions tchadiennes au cours de la procédure.
L’actuel président tchadien, Idriss Déby, était commandant en chef des forces armées du Nord (FAN), la rébellion qui a porté Hissène Habré au pouvoir. Et avant de s’opposer à l’ancien dictateur, Idriss Déby en a aussi été le conseiller à la sécurité. Les autorités tchadienne ont préféré faire juger d'anciens agents de la police politique au Tchad plutôt que de les livrer aux Chambres africaines extraordinaires qui avaient pourtant requis l'inculpation de certains d'entre eux, parmi lesquels Saleh Younous et Mahamat Djibrine. Raison pour laquelle Hissène Habré se retrouve aujourd'hui seul accusé à la barre de la Cour des Chambres extraordinaires, dont les audiences doivent théoriquement reprendre le 7 septembre prochain.
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