Le Conseil constitutionnel peut-il et/ou doit-il se déclarer incompétent concernant l’appréciation de la « loi constitutionnelle » portant, entre autres questions, la prolongation de la durée du mandat du Président de la République. Il y a de quoi se poser la question, mais point de s’alarmer. Il y a de quoi se poser la question car il semble m’être revenu que le Ministre actuel des affaires étrangères, ancien Garde des Sceaux, se fondant probablement sur une certaine jurisprudence du Conseil constitutionnel aurait « décrété » que la haute juridiction ne tient ni de la Constitution ni d’aucune disposition de la loi organique (celle relative à ses conditions d’organisation, de fonctionnement et qui délimite ses compétences) le pouvoir de statuer sur une loi constitutionnelle portant révision de la Loi fondamentale ; « Déclaration » hasardeuse pour ne point dire fantaisiste de mon point de vue et nous allons tenter de dire pourquoi.
Le Conseil constitutionnel avait en effet été saisi d’un recours en inconstitutionnalité par requête du 23 décembre 2005 contre la loi constitutionnelle n° 29/2005 prorogeant le mandat des députés élus à l’issue du scrutin du 29 avril 2001. Sous le magistère d’Abdoulaye WADE père de « Karim » Meissa Wade.
Cette loi constitutionnelle avait été votée le 16 décembre 2005
Le recours en question avait été introduit par un certain nombre de parlementaires parmi lesquels on peut citer feu Ousmane Tanor DIENG, Aminita MBENGUE NDIAYE, Abdoulaye BATHILY, feu Madieyna DIOUF, Madior DIOUF, Cheikh Hamidou KANE.
Les requérants demandaient au Conseil constitutionnel de se déclarer compétent et de décider que la loi déférée était contraire à la Constitution ; que c’était une fausse loi constitutionnelle et que la procédure prévue par l’article 103 de la Constitution avait été violée.
Par rapport à l’argument selon lequel la loi déférée devant la Haute juridiction était une fausse loi constitutionnelle, les demandeurs soutenaient qu’elle avait vocation à intervenir dans une matière législative régie par l’article 146 du code électoral, qu’elle ne substituait pas un ordre constitutionnel à un autre ordre constitutionnel, ni ne remplaçait une disposition constitutionnelle par une autre ; qu’au contraire, elle avait été adoptée pour régler une question ponctuelle, née d’une situation exceptionnelle. Aussi, estimaient-ils, en conséquence, que les Sages du Conseil constitutionnel devaient simplement requalifier la dite loi en loi ordinaire et la déclarer contraire aux dispositions de la Loi fondamentale.
La haute juridiction, avait alors décidé qu’elle n’avait pas compétence pour statuer sur la demande susmentionnée estimant que : la loi contestée prorogeant le mandat des députés à l’Assemblée nationale est une loi constitutionnelle aux motifs que , - la durée du mandat des députés était fixée par l’article 60 alinéa 1er de la Constitution (article59 alinéa 3 après la révision constitutionnelle 2016-10 du 05avril 2016) ; que la fixation et la prorogation de la durée du mandat des députés relèvent dès lors de la Constitution ; que l’article 146 du code électoral se borne à préciser la date d’expiration du mandat des députés ; - l’élection des députés, le 29 avril 2001, en application de l’article 60 précité, avait créé un ordonnancement constitutionnel ; que la loi prorogeant la durée du mandat des députés de cinq ans à cinq ans et huit mois modifiait dès lors cet ordonnancement constitutionnel ;
Et d’ajouter que le pouvoir constituant est souverain ; que sous réserve, d’une part, des limitations qui résultent des articles 39, 40 et 52 du texte constitutionnel touchant aux périodes au cours desquelles une révision de la Constitution ne peut être engagée ou poursuivie et, d’autre part, du respect des prescriptions de l’alinéa 7 de l’article 103 en vertu desquelles la forme républicaine de l’État ne peut faire l’objet d’une révision, il peut abroger, modifier ou compléter des dispositions de valeur constitutionnelle dans la forme qu’il estime appropriée et introduire explicitement ou implicitement dans le texte de la Constitution des dispositions nouvelles qui, dans le cas qu’elles visent, dérogent à des règles ou principes de valeur constitutionnelle, que cette dérogation soit transitoire ou définitive ;
Ce qu’il convient de retenir de cette jurisprudence du Conseil constitutionnel c’est la réserve bien énoncée selon laquelle sa déclaration d’incompétence dans le cas d’espèce, celui relatif à la loi n° 29/2005 prorogeant le mandat des députés élus à l’issue des élections du 29 avril 2001 votée par l’Assemblée nationale le 16 décembre 2005 était subordonnée au respect de l’alinéa 7 de l’article 103 de la constitution ; alinéa selon lequel, actuellement, la forme républicaine de l’Etat, le mode d’élection, la durée et le nombre de mandats consécutifs du Président de la République ne peuvent faire l’objet d’une révision.
L’on fera remarquer que la durée du mandat des députés ne bénéficie nullement de la clause d’éternité de l’article 103.
Au total l’on pourrait donc retenir que le Conseil constitutionnel devra logiquement se déclarer compétent pour connaître de la violation des dispositions de l’alinéa 7 de l’article 103 et, de ce fait, prévenir toute tentative de remise en cause de la clause d’éternité attachée aux mandats du Président de la République (nombre et durée).
Une clause d’éternité, salvatrice, fondamentale pour le renforcement de notre démocratie ; clause d’éternité sécurisante, sans laquelle des autorités déviantes d’une République, des délinquants politiques pourraient, à tout moment, selon leurs humeurs à géométrie variable, considérer que la forme républicaine de l’Etat n’est plus à leur convenance, et donc à la convenance du peuple ; qu’en conséquence, une incontournable révision constitutionnelle devrait instituer un royaume et pourquoi pas un Empire taillée à la mesure du guide éclairé ; ou alors qu’un mandat à durée limité serait trop bref et contraignant, indigne d’un guide visionnaire et irremplaçable ; qu’en conséquence, une révision de la Constitution pourrait lui permettre d’être Président à vie et d’être plus à l’aise pour mettre en œuvre ses mirobolantes ambitions pour le pays..
Cela ne s’est-il pas déjà produit quelque part en Afrique ?
Les malheurs ? Ils n’arrivent pas qu’aux autres. Dieu nous en préserve ; d’autant que force est de constater que le bon sens est la chose du monde politique la moins bien partagée. Et de rappeler à qui peut l’entendre que les cimetières sont remplis de gens que l’on qualifiait d’indispensables et irremplaçables.
Aux Sages du Conseil constitutionnel, nous dirons simplement : « l’avenir de notre démocratie et celui de notre pays sont entre vos mains. » Que le Tout-Puissant vous bénisse et vous guide. Vive la démocratie pour que vive un Sénégal debout et prospère.
Le Conseil constitutionnel avait en effet été saisi d’un recours en inconstitutionnalité par requête du 23 décembre 2005 contre la loi constitutionnelle n° 29/2005 prorogeant le mandat des députés élus à l’issue du scrutin du 29 avril 2001. Sous le magistère d’Abdoulaye WADE père de « Karim » Meissa Wade.
Cette loi constitutionnelle avait été votée le 16 décembre 2005
Le recours en question avait été introduit par un certain nombre de parlementaires parmi lesquels on peut citer feu Ousmane Tanor DIENG, Aminita MBENGUE NDIAYE, Abdoulaye BATHILY, feu Madieyna DIOUF, Madior DIOUF, Cheikh Hamidou KANE.
Les requérants demandaient au Conseil constitutionnel de se déclarer compétent et de décider que la loi déférée était contraire à la Constitution ; que c’était une fausse loi constitutionnelle et que la procédure prévue par l’article 103 de la Constitution avait été violée.
Par rapport à l’argument selon lequel la loi déférée devant la Haute juridiction était une fausse loi constitutionnelle, les demandeurs soutenaient qu’elle avait vocation à intervenir dans une matière législative régie par l’article 146 du code électoral, qu’elle ne substituait pas un ordre constitutionnel à un autre ordre constitutionnel, ni ne remplaçait une disposition constitutionnelle par une autre ; qu’au contraire, elle avait été adoptée pour régler une question ponctuelle, née d’une situation exceptionnelle. Aussi, estimaient-ils, en conséquence, que les Sages du Conseil constitutionnel devaient simplement requalifier la dite loi en loi ordinaire et la déclarer contraire aux dispositions de la Loi fondamentale.
La haute juridiction, avait alors décidé qu’elle n’avait pas compétence pour statuer sur la demande susmentionnée estimant que : la loi contestée prorogeant le mandat des députés à l’Assemblée nationale est une loi constitutionnelle aux motifs que , - la durée du mandat des députés était fixée par l’article 60 alinéa 1er de la Constitution (article59 alinéa 3 après la révision constitutionnelle 2016-10 du 05avril 2016) ; que la fixation et la prorogation de la durée du mandat des députés relèvent dès lors de la Constitution ; que l’article 146 du code électoral se borne à préciser la date d’expiration du mandat des députés ; - l’élection des députés, le 29 avril 2001, en application de l’article 60 précité, avait créé un ordonnancement constitutionnel ; que la loi prorogeant la durée du mandat des députés de cinq ans à cinq ans et huit mois modifiait dès lors cet ordonnancement constitutionnel ;
Et d’ajouter que le pouvoir constituant est souverain ; que sous réserve, d’une part, des limitations qui résultent des articles 39, 40 et 52 du texte constitutionnel touchant aux périodes au cours desquelles une révision de la Constitution ne peut être engagée ou poursuivie et, d’autre part, du respect des prescriptions de l’alinéa 7 de l’article 103 en vertu desquelles la forme républicaine de l’État ne peut faire l’objet d’une révision, il peut abroger, modifier ou compléter des dispositions de valeur constitutionnelle dans la forme qu’il estime appropriée et introduire explicitement ou implicitement dans le texte de la Constitution des dispositions nouvelles qui, dans le cas qu’elles visent, dérogent à des règles ou principes de valeur constitutionnelle, que cette dérogation soit transitoire ou définitive ;
Ce qu’il convient de retenir de cette jurisprudence du Conseil constitutionnel c’est la réserve bien énoncée selon laquelle sa déclaration d’incompétence dans le cas d’espèce, celui relatif à la loi n° 29/2005 prorogeant le mandat des députés élus à l’issue des élections du 29 avril 2001 votée par l’Assemblée nationale le 16 décembre 2005 était subordonnée au respect de l’alinéa 7 de l’article 103 de la constitution ; alinéa selon lequel, actuellement, la forme républicaine de l’Etat, le mode d’élection, la durée et le nombre de mandats consécutifs du Président de la République ne peuvent faire l’objet d’une révision.
L’on fera remarquer que la durée du mandat des députés ne bénéficie nullement de la clause d’éternité de l’article 103.
Au total l’on pourrait donc retenir que le Conseil constitutionnel devra logiquement se déclarer compétent pour connaître de la violation des dispositions de l’alinéa 7 de l’article 103 et, de ce fait, prévenir toute tentative de remise en cause de la clause d’éternité attachée aux mandats du Président de la République (nombre et durée).
Une clause d’éternité, salvatrice, fondamentale pour le renforcement de notre démocratie ; clause d’éternité sécurisante, sans laquelle des autorités déviantes d’une République, des délinquants politiques pourraient, à tout moment, selon leurs humeurs à géométrie variable, considérer que la forme républicaine de l’Etat n’est plus à leur convenance, et donc à la convenance du peuple ; qu’en conséquence, une incontournable révision constitutionnelle devrait instituer un royaume et pourquoi pas un Empire taillée à la mesure du guide éclairé ; ou alors qu’un mandat à durée limité serait trop bref et contraignant, indigne d’un guide visionnaire et irremplaçable ; qu’en conséquence, une révision de la Constitution pourrait lui permettre d’être Président à vie et d’être plus à l’aise pour mettre en œuvre ses mirobolantes ambitions pour le pays..
Cela ne s’est-il pas déjà produit quelque part en Afrique ?
Les malheurs ? Ils n’arrivent pas qu’aux autres. Dieu nous en préserve ; d’autant que force est de constater que le bon sens est la chose du monde politique la moins bien partagée. Et de rappeler à qui peut l’entendre que les cimetières sont remplis de gens que l’on qualifiait d’indispensables et irremplaçables.
Aux Sages du Conseil constitutionnel, nous dirons simplement : « l’avenir de notre démocratie et celui de notre pays sont entre vos mains. » Que le Tout-Puissant vous bénisse et vous guide. Vive la démocratie pour que vive un Sénégal debout et prospère.
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