Lors des dernières élections législatives au Sénégal, on a assisté à ce que d’aucuns ont appelé une poussée islamiste avec l’entrée à l’Assemblée nationale de personnalités appartenant à des familles maraboutiques. La crainte d’un péril islamiste est-elle justifiée au Sénégal ?
Souleymane Bachir Diagne : Je n’ai pas d’inquiétude à ce sujet. Je n’appelle pas cela une « poussée » d’ abord. Ensuite ce n’est pas à proprement parler « l’islamisme » qui se serait ainsi propulsé à l’Assemblée nationale. Les députés élus ne l’ont pas été sur la base d’une plateforme qui ressemblerait à de l’islam politique. Leur agenda proclamé n’est pas celui-là et il n’y a aucune raison de douter de leurs convictions démocratiques et républicaines. Qu’ils apportent aux débats une volonté de conjuguer éthique et politique ne peut être qu’une bonne chose. J’ajoute que je connais personnellement Serigne Mansour Sy, l’imam Mbaye Niang et Ie professeur Iyane Sow. Ce sont des hommes que je suis heureux de voir figurer parmi tous ceux et celles qui nous représentent à l’Assemblée.
Le Nord du Mali est aujourd’hui sous le contrôle d’ Ansar Dine et leurs alliés d’Al-Qaida au Maghreb islamique (Aqmi). Ces mouvements islamistes détruisent des mausolées, imposent le voile aux femmes, interdisent la cigarette aux jeunes etc ? L’Islam est-il ce visage qui nous vient du Mali ?
Comment caractériser ce visage qui nous est présenté? C’est d’abord celui de ceux qui se sont décrétés meilleurs musulmans que tout le monde, chargés par on ne sait qui de faire la leçon au monde, de juger et de punir des pratiques qu’ils estiment impures : ils regardent tout le monde du haut de leur propre pureté supposée. Quand je vois des gens qui croient pouvoir définir le « vrai » islam et se poser en incarnation de celui-ci, je pense à ce que le Coran dit de ceux qui « exaltent leur propre pureté ». Il faut toujours avoir l’humilité de penser que les croyants partagent la recherche de Dieu, que leur compréhension et interprétations peuvent différer mais que ce qu’ils partagent de chercher les unit. Qui peut se prétendre seul héritier des Salaf, autrement dit « les pieux ancêtres » qui doivent être les modèles ? Toutes les voies, les écoles, les interprétations, croient aussi suivre le chemin des Salaf ! C’est cette manière de voir, naturellement pluraliste et tolérante qui est la meilleure définition de ce que l’on appelle le soufisme et à bien des égards, c’est celui-là le visage de l’islam que je pense correspondre au message de paix de cette religion où Dieu a commandé de parler avec douceur même à Pharaon, à échanger avec lui pour le persuader par l’éducation. Cet autre visage interdit de mépriser les autres et de trouver quelque justification que ce soit à la violence et au meurtre.
Pensez-vous que la communauté culturelle mondiale doit se mobiliser pour sauver Tombouctou ?
Tombouctou comporte pour nous, Ouest Africains, et pour le monde dans son ensemble, des significations multiples et essentielles. C’est l’impérieux devoir de la communauté internationale de protéger les habitants d’abord, leur vie, leur liberté, leur sécurité ; ensuite de protéger le message de Tombouctou, celui d’un islam lettré, d’un islam à la fois érudit et tolérant, tolérant parce qu’érudit, justement. Ce message s’est incarné dans les manuscrits dont la localité regorge, dans les monuments matériellement fragiles mais spirituellement éternels que les siècles ont érigé dans cette ville.
Le régime islamiste est-il compatible avec la démocratie ?
Si on appelle « islamisme » cet islam politique que prônent des gens qui pensent qu’ils ont la vérité dernière sur tout, alors la contestation, les alternances, l’idée que la seule légitimité dans nos affaires politiques vient du suffrage populaire sont des notions qui lui sont contraires. Or ces notions entrent dans l’essence même de la démocratie.
Source : Sud quotidien
Souleymane Bachir Diagne : Je n’ai pas d’inquiétude à ce sujet. Je n’appelle pas cela une « poussée » d’ abord. Ensuite ce n’est pas à proprement parler « l’islamisme » qui se serait ainsi propulsé à l’Assemblée nationale. Les députés élus ne l’ont pas été sur la base d’une plateforme qui ressemblerait à de l’islam politique. Leur agenda proclamé n’est pas celui-là et il n’y a aucune raison de douter de leurs convictions démocratiques et républicaines. Qu’ils apportent aux débats une volonté de conjuguer éthique et politique ne peut être qu’une bonne chose. J’ajoute que je connais personnellement Serigne Mansour Sy, l’imam Mbaye Niang et Ie professeur Iyane Sow. Ce sont des hommes que je suis heureux de voir figurer parmi tous ceux et celles qui nous représentent à l’Assemblée.
Le Nord du Mali est aujourd’hui sous le contrôle d’ Ansar Dine et leurs alliés d’Al-Qaida au Maghreb islamique (Aqmi). Ces mouvements islamistes détruisent des mausolées, imposent le voile aux femmes, interdisent la cigarette aux jeunes etc ? L’Islam est-il ce visage qui nous vient du Mali ?
Comment caractériser ce visage qui nous est présenté? C’est d’abord celui de ceux qui se sont décrétés meilleurs musulmans que tout le monde, chargés par on ne sait qui de faire la leçon au monde, de juger et de punir des pratiques qu’ils estiment impures : ils regardent tout le monde du haut de leur propre pureté supposée. Quand je vois des gens qui croient pouvoir définir le « vrai » islam et se poser en incarnation de celui-ci, je pense à ce que le Coran dit de ceux qui « exaltent leur propre pureté ». Il faut toujours avoir l’humilité de penser que les croyants partagent la recherche de Dieu, que leur compréhension et interprétations peuvent différer mais que ce qu’ils partagent de chercher les unit. Qui peut se prétendre seul héritier des Salaf, autrement dit « les pieux ancêtres » qui doivent être les modèles ? Toutes les voies, les écoles, les interprétations, croient aussi suivre le chemin des Salaf ! C’est cette manière de voir, naturellement pluraliste et tolérante qui est la meilleure définition de ce que l’on appelle le soufisme et à bien des égards, c’est celui-là le visage de l’islam que je pense correspondre au message de paix de cette religion où Dieu a commandé de parler avec douceur même à Pharaon, à échanger avec lui pour le persuader par l’éducation. Cet autre visage interdit de mépriser les autres et de trouver quelque justification que ce soit à la violence et au meurtre.
Pensez-vous que la communauté culturelle mondiale doit se mobiliser pour sauver Tombouctou ?
Tombouctou comporte pour nous, Ouest Africains, et pour le monde dans son ensemble, des significations multiples et essentielles. C’est l’impérieux devoir de la communauté internationale de protéger les habitants d’abord, leur vie, leur liberté, leur sécurité ; ensuite de protéger le message de Tombouctou, celui d’un islam lettré, d’un islam à la fois érudit et tolérant, tolérant parce qu’érudit, justement. Ce message s’est incarné dans les manuscrits dont la localité regorge, dans les monuments matériellement fragiles mais spirituellement éternels que les siècles ont érigé dans cette ville.
Le régime islamiste est-il compatible avec la démocratie ?
Si on appelle « islamisme » cet islam politique que prônent des gens qui pensent qu’ils ont la vérité dernière sur tout, alors la contestation, les alternances, l’idée que la seule légitimité dans nos affaires politiques vient du suffrage populaire sont des notions qui lui sont contraires. Or ces notions entrent dans l’essence même de la démocratie.
Source : Sud quotidien
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