"A douze mois de l’élection présidentielle force est de constater que le système démocratique sénégalais est à refonder. En effet, une véritable crise de confiance s’est installée depuis plusieurs années entre les sénégalais et leurs dirigeants politiques. Celle-ci se manifeste par les taux d’abstention élevés lors des différentes élections, par l’impossibilité des partis politiques de mobiliser des supposés militants sans faire recours à une distribution massive d’argent mais surtout par le développement d’un esprit de contestation des décisions politiques par les citoyens. Cette fracture entre les sénégalais et la politique, est nourrie par l’échec des politiques, les engagements jamais respectés et la transhumance.
Le fonctionnement de notre système démocratique est loin de correspondre au principe approuvé et adopté à l’article premier, alinéa 6 de la constitution du Sénégal: Gouvernement du peuple par le peuple et pour le peuple. En effet, la démocratie ne consiste pas à voter, une fois tous les cinq ans, pour des personnes que l’on n’a pas choisi de présenter et qui, une fois en fonction, auront le droit à peu près illimité d’agir à leur guise, échappant à tout contrôle. La démocratie ne se mesure pas au nombre de parties politiques, d’élections organisées, du droit de marche et de certains medias dominants qui n’arrêtent pas de nous la vendre malgré ses limites quotidiennes. (...)
(...) Il est indispensable pour un bon fonctionnement du système démocratique que des référendums sur certaines questions doivent être obligatoires de par la constitution et les citoyens doivent pouvoir en provoquer à volonté. En outre, des contre-pouvoirs citoyens doivent être prévus afin que ces derniers, quand ils ne décident pas eux-mêmes, puisse au moins ratifier ou s’opposer aux décisions des élus et les faire ainsi siennes.
Cette nouvelle approche de la démocratie (impliquer les citoyens dans le débat et la décision politique mais aussi son évaluation) peut grandement être facilitée par le numérique. En effet, à l’heure où la défiance envers les élus reste plus que jamais d’actualité au Sénégal avec la montée en puissance d’une conscience citoyenne, ASUTIC estime que les réponses à la complexité des défis démocratiques auxquels nous sommes confrontés ne se trouveront ni dans un bureau ministériel ni dans le huis clos d’une réunion d’experts.
Cette exigence citoyenne demande toutefois de repenser complètement notre pseudo démocratie. Nous avons besoin de passer à l’ère de l’intelligence collective et créer des contre-pouvoirs citoyens. Dans ce sens, le système représentatif sénégalais pour être performant et répondre aux exigences du moment devra désormais s’appuyer sur les méthodes collaboratives facilitées par le numérique. Les opportunités qu’offre le numérique en démocratie sont indéniables: améliorer l’information des citoyens, la transparence, mobiliser les citoyens, accroitre la participation citoyenne, évaluer et contrôler l’action des élus. Une démocratie numérique qui correspond davantage à la société de l’information que le Sénégal est entrain de construire avec des citoyens de plus en plus connectés, mieux informés, vigilants qui exigent leur implication dans la décision politique.
Le chemin qui y mène est très long et semés d’embuches car faire accepter l’idée d’une refondation de notre démocratie s’avère déjà difficile quand le système politique en place a déjà réussi à faire croire aux citoyens qu’ils sont dans une démocratie.
Enfin, pour rétablir les liens distendus entre les sénégalais et la politique, ASUTIC estime que la refondation de la démocratie sénégalaise pour une véritable démocratie ne devra pas être un leurre de plus. Si le but est seulement de rassurer les citoyens, de leur donner le sentiment qu'on les écoute, de leur laisser un petit espace d'agitation, l’objectif sera raté.
Aussi, ASUTIC invite les citoyens, la société civile, les partis politiques à une réflexion sur les réformes constitutionnelles à mettre en œuvre afin que les conditions de restauration de la confiance entre les sénégalais et la politique, soient créées. Dans ce sens, des réformes constitutionnelles visant à impliquer les citoyens sénégalais dans les décisions politiques et leur évaluation doivent être inscrites en lettres d’or dans le programme de tout candidat à l’élection présidentielle du 24 Février 2019.
Aussi, l’Association Sénégalaise des Utilisateurs des TIC (ASUTIC) recommande les réformes constitutionnelles suivantes:
La suppression de l’illégalité du mandat impératif;
La suppression de l’inviolabilité du mandat parlementaire;
L’inscription du droit de participation des citoyens à l’élaboration des politiques publiques ;
L’inscription du droit d’accès à l’information publique;
L’inscription du droit d’accès à Internet;
L’inscription du droit à la neutralité du net."
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