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Après la tuerie de San Bernardino, l'Amérique face à la piste terroriste

Les auteurs de l'attaque qui a fait 14 morts mercredi en Californie auraient été en contact avec des groupes islamistes.



La nature planifiée de l'attaque, le portrait du couple, leurs connexions avec des réseaux terroristes en Amérique et à l'étranger… Tout pointe désormais un attentat terroriste islamiste, mais, à ce stade de l'enquête, le FBI comme la présidence se refusent pour l'instant à confirmer l'hypothèse. «Il serait irresponsable à ce stade de parler de terrorisme», a carrément déclaré le chef de la cellule du FBI de Californie, David Bowdich, jugeant qu'il était «trop tôt» pour spéculer et qu'il préférait avancer «lentement mais en donnant des informations correctes».
Briefé par le FBI et sortant tout juste d'un Conseil de sécurité réuni en urgence à la Maison-Blanche, Barack Obama s'est exprimé, lui aussi, avec une prudence extrême sur l'attaque qui a frappé San Bernardino ce jeudi, expliquant que les motivations du couple restaient «inconnues». Il est possible qu'il s'agisse d'un «acte lié au terrorisme» mais cela pourrait aussi être «un acte lié au travail» du mari, a-t-il dit, n'excluant pas «un mélange» des deux.
Cette dernière hypothèse laisse pensif, car si le couple de musulmans qui a tué 14 personnes et en a blessé 17, après avoir fait irruption dans une fête de Noël du département de la santé de San Bernardino, a commis cet acte atroce après avoir embrassé une idéologie islamiste extrémiste, le fait déclencheur change-t-il le fond de la motivation et donc la nature de l'attentat?
La question brûlante, qui sous-tend l'action du FBI, est bien de déterminer si Syed Rizwan Farook, un Américain d'origine pakistanaise de 28 ans, et sa femme, Tashleen Malik, 27 ans, étaient des loups solitaires radicalisés, et s'ils ont agi sous l'inspiration ou l'impulsion d'un réseau terroriste plus large. La division contre-terroriste du contre-espionnage américain s'est d'ailleurs saisie de l'affaire, a précisé le Washington Post ce jeudi.
Un bébé de six mois
 
Tous les éléments qui commencent à percer sur le couple et la manière dont ils avaient planifié leur attaque semblent en effet dessiner le portrait de loups islamistes radicalisés. La police a parlé d'une attaque «préparée» comme si le couple qui a massacré 14 personnes et en a blessé 17 autres avait été «en mission». Plus tard, la police a révélé que douze engins explosifs artisanaux avaient été retrouvés au domicile des deux tueurs. Trois autres engins explosifs artisanaux reliés entre eux et actionnables à distance ont aussi été retrouvés dans le bâtiment attaqué. D'autres engins avaient été stockés dans la voiture louée par Farook et sa femme. Le fait que le véhicule ait été loué est aussi perçu comme le signe de la planification d'une attaque imminente qui semble exclure la thèse d'un coup de colère. L'arsenal de guerre de milliers de munitions et de dizaines d'autres au domicile des deux époux va dans le même sens, ainsi que leur accoutrement très étudié - masques et treillis - lors de l'attaque.
La froideur du couple, qui avait laissé son bébé de six mois chez sa grand-mère pour aller frapper une fête d'innocents, sur le lieu de travail du mari, laisse penser à une démarche idéologique. Peut-on en effet imaginer une mère abandonnant un nourrisson pour des motifs «liés au travail de son mari»? Seule une mission très puissante peut avoir tué en elle l'instinct maternel, notaient jeudi plusieurs observateurs. Tashneen Malik, pakistanaise, était arrivée d'Arabie saoudite, où Farook était allé la chercher.
Peur d'une vague antimusulmans
 
Surtout, élément crucial, les forces de l'ordre affirment que le FBI a déjà remonté la piste des contacts que Farook avait créés depuis plusieurs années avec des extrémistes aux États-Unis et à l'étranger. L'un de ces contacts aurait été l'objet d'une investigation des autorités fédérales pour terrorisme. Farook lui-même en revanche n'était pas apparu sur le radar des agences de contre-terrorisme.
L'affaire, qui pourrait provoquer un séisme dans l'opinion américaine, où la crainte d'attentats n'a cessé de monter depuis les attaques terroristes de Paris, s'est invitée dans la campagne présidentielle. La droite va évidemment s'engouffrer dans la brèche et critiquera sans doute les analyses à chaud d'Obama, dont la prudence s'explique sans doute par la peur d'une vague antimusulmans. «Beaucoup d'entre nous sont profondément inquiets du fait qu'il s'agisse d'une manifestation de terrorisme, du terrorisme radical islamiste. Nous sommes en guerre, que notre Administration veuille le reconnaître ou non», a déjà déclaré le candidat présidentiel républicain Ted Cruz.
 

Le Figaro.fr


Vendredi 4 Décembre 2015 - 07:02